David Shentow a passé un an au camp de concentration d’Auschwitz.

David Shentow a passé un an au camp de concentration d’Auschwitz.
Photo Credit: CBC

Un résidant d’Ottawa se souvient de « l’horreur sur terre » 70 ans après Auschwitz

David Shentow avait 17 ans, lorsqu’un matin d’automne en 1942, on le força de débarquer d’un train à Auschwitz. Il ignorait alors qu’il venait d’arriver au plus tristement célèbre des camps de concentration nazis.

Il se rappelle encore d’avoir eu un « mauvais pressentiment » quand on lui demanda de laisser ses bagages à l’intérieur du train. Il découvrit l’horreur du camp quelques minutes plus tard.

« C’est un miracle que je sois encore ici […] un miracle que je ne vais jamais oublier. »— David Shentow, survivant du camp d’Auschwitz

Un homme demanda aux gardes de la SS s’il pouvait prendre une photographie, raconte M. Shentow plus de 70 ans plus tard, dans une entrevue bilingue accordée à CBC, le réseau anglais de Radio-Canada.

« Ils ont laissé les chiens sans laisses et un berger allemand a sauté sur cet homme, directement sur son cou [trad. libre] », se remémore-t-il. « Ses gémissements, ses pleurs, ses cris, c’était déchirant. Et c’était juste devant moi. Il y avait du sang qui s’écoulait de son cou, de sa bouche et de ses oreilles. Je savais qu’il était mort. [Je me suis demandé :]  »Mon Dieu, où suis-je? » »

M. Shentow se rappelle que, tout près, une jeune femme a débarqué du train avec un bébé en pleurs dans les bras.

« Les SS ont marché vers elle et ont montré le bébé du doigt :  »Fais en sorte qu’il garde le silence » », relate-t-il. « Peu importe comment elle tentait de calmer son bébé, il  recommençait à pleurer plus fort. [Un garde] a couru vers elle, a pris le bébé par les jambes et l’a lancé contre le train. À ce moment-là, je savais que j’étais en enfer. »

«Triage» des faibles et des personnes âgées

David Shentow a regardé avec horreur ceux qui étaient perçus comme faibles ou vieux être envoyés vers la gauche. On lui ordonna de marcher vers la droite.

« Je savais à ce moment précis que je venais de recevoir un sursis », lance-t-il. Dans les années qui ont suivi, M. Shentow doutait de ses chances de survie.

David Shentow porte encore son numéro de prisonnier sur son bras.
David Shentow porte encore son numéro de prisonnier sur son bras. © CBC

David Shentow porte encore la marque de son numéro de prisonnier, 72585, tatoué sur son bras.

Il se rappelle être passé par les portes du camp où l’on pouvait lire « Arbeit macht frei » [« Le travail rend libre »]. Il travaillait 10 heures par jour, mais il s’est rapidement aperçu que le travail n’était pas le but premier du camp.

« Nous devions transporter de lourdes pierres », se rappelle-t-il. « Puis, j’ai vu des prisonniers rapporter les mêmes pierres là où ils les avaient prises. Donc, je savais que c’était un camp de la mort. Ce n’était pas un camp de travail. »

« Nous devions transporter les morts, parce que plusieurs mourraient pendant le travail. »— David Shentow, survivant du camp d’Auschwitz

Une fois par jour, les prisonniers recevaient une petite portion de pain et de soupe, même lors les froids mois d’hiver ou après de longues journées de travail.

M. Shentow explique que, le matin, lui et d’autres prisonniers vidaient les poches de ceux qui étaient morts au cours de la nuit. Un morceau de pain, des souliers, une ceinture, une chemise : les quelques possessions d’un disparu aidaient les autres à survivre. « Soixante secondes plus tard, il était tout nu », dit-il.

« On me demande souvent comment j’ai survécu », révèle-t-il. « Quand j’ai été libéré, après trois ans d’enfer, je ne pouvais pas trouver les mots justes. Je ne sais pas comment j’ai survécu. Même aujourd’hui, 70 ans plus tard, je suis encore là. Peut-être que Dieu veille sur moi. »

Auschwitz a été libéré le 27 janvier 1945. À ce moment-là, David Shentow se trouvait au camp de concentration de Dachau. Il ne fut libéré que le 29 avril 1945, à l’âge de 20 ans.

M. Shentow affirme que 17 membres de sa famille, incluant son père, sa mère, ses sœurs, ses oncles et ses tantes, n’ont pas survécu aux camps nazis. Il s’est senti coupable d’avoir survécu.

Originaire d’Antwerp, en Belgique, il a déménagé au Canada en 1949 et vit à Ottawa. « Je sentais que c’était le temps de commencer une nouvelle vie », conclut-il.

RCI et Radio-Canada (d’après un reportage de la CBC)

À lire aussi :

Catégories : International
Mots-clés : , , , ,

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Pour des raisons indépendantes de notre volonté et, pour une période indéterminée, l'espace des commentaires est fermé. Cependant, nos réseaux sociaux restent ouverts à vos contributions.