Une des clôtures qui séparent les États-Unis du Mexique. Vue de Los Algodones, du côté mexicain. Sur l’affiche : « Danger. Températures extrêmes ».
Photo Credit: Radio-Canada/Yanik Dumont Baron

Les murs : sécurité, repli sur soi ou leurre politique?

« Les Européens et les Occidentaux ont imaginé que l’on irait vers un monde sans frontières. Or, c’était presque un paravent parce que, oui, le monde était sans frontières pour les Occidentaux, mais si vous veniez du Sud alors là, la frontière périphérique, extérieure de l’Union européenne, devenait de plus en plus dure et devient encore aujourd’hui de plus en plus dure, de plus en plus armée, policée et externalisée parce que, aujourd’hui, les frontières ne sont plus uniquement les lignes frontalières, mais ça va très loin à l’extérieur des pays. Il y a aujourd’hui toute une problématique des camps de détention de migrants aussi loin qu’en Mauritanie. »

Élisabeth Vallet, directrice de l’Observatoire de géopolitique de la Chaire Raoul-Dandurand

Romulus aurait un jour dit à Remus : « Mon territoire commence ici, personne n’y aura droit d’accès. » Le jumeau a enfreint cette règle, Romulus l’a tué.

L’empereur Hadrien voulait isoler son empire des hordes du Nord de ce qui est aujourd’hui la Grande-Bretagne. Aujourd’hui, tout près de l’endroit où l’Écosse et l’Angleterre se rejoignent, les moutons paissent paisiblement sur le mur d’Hadrien.

(Université d’Ottawa)

De tout temps, on construisait des murs pour se protéger, pour tenir « l’autre », l’étranger, le mauvais à l’extérieur. Les châteaux forts médiévaux s’inscrivaient dans cette logique, tout comme la – on devrait dire « les » grande muraille de Chine.

(lamurailledechine.net)

Il en va de même du mur de Berlin, de la clôture entre la Hongrie et la Serbie, de l’enfermement d’Israël, des murs entourant les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla en territoire marocain.

« Souvent le gouvernement américain et le gouvernement israélien montreront un mur en vantant son efficacité à un endroit précis. Ce qu’on ne montre pas, c’est qu’en fait, les flux seront détournés vers d’autres zones, beaucoup plus dangereuses. Aujourd’hui, on sait qu’entre 2000 et 2016, aux États-Unis, en sol américain, il y a eu plus de cadavres retrouvés dans les déserts à la suite du franchissement de la frontière qu’il n’y a eu de morts cumulés du 11 septembre et de Katrina. On parle de 6000 cadavres retrouvés dans les États frontaliers américains avec le Mexique. »

Les frontières, les murs, ce sont, ultimement, des constats d’échec. Échec de compréhension, échec de rapprochement, victoire du repli sur soi.

Mur de Berlin, mur de la honte (Radio-Canada)

« Les frontières murées se multiplient dans le monde au point de devenir une réponse acceptable. Et c’est là en fait où il y a une évolution importante. C’est dans l’acceptabilité de l’emmurement en quelque sorte. »

Élisabeth Vallet

Et, réchauffement climatique oblige, quand viendront les réfugiés climatiques, quelle sera la nature des murs que nous érigerons?

Au moment de la chute du mur de Berlin, il y a un quart de siècle, on comptait 16 murs défendant des frontières. En 2016, la chercheuse Élisabeth Vallet, de l’Université du Québec à Montréal, en répertoriait 66, construits pour dissuader les migrants, mais aussi pour des raisons sécuritaires.

Élisabeth Vallet, directrice de l’Observatoire de géopolitique de la Chaire Raoul-Dandurand est l’invitée au micro de Raymond Desmarteau.

Écoutez

Murs frontaliers dans le monde (Radio-Canada)

Catégories : Immigration et Réfugiés, International, Politique, Société
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