Les premiers ministres des provinces et des territoires sont conscients de la nécessité de travailler ensemble pour contrer les effets du protectionnisme

Conseil de la fédération : se serrer les coudes face au protectionnisme américain

Face à l’incertitude économique causée notamment par les États-Unis, le plus important partenaire du Canada, les premiers ministres des provinces et des territoires réunis au Nouveau-Brunswick ont convenu de se serrer les coudes. Ils vont renforcer les échanges interprovinciaux et créer de nouveaux partenariats avec les pays émergents. 

Pour le meilleur et pour le pire, le Canada et les États-Unis sont liés. Ils partagent la plus longue frontière terrestre au monde. Le Canada compte un peu plus de 36 millions d’habitants, et 80% d’entre eux résident à une centaine de kilomètres de cette frontière non militarisée.

Les deux partagent le même mode de vie. Globalement, et à quelques nuances près, ils ont les mêmes valeurs. Ce sont des alliés sur la scène internationale. Les peuples de part et d’autre se considèrent comme de bons voisins, des amis, voire des membres de la même famille.

Donald Trump, le chien dans un jeu de quilles

Mais l’arrivée de Donald Trump au pouvoir a ébranlé des certitudes dans les relations canado-américaines. Le Canada est devenu un partenaire comme un autre, un pays contre lequel Washington peut invoquer des impératifs de sécurité nationale pour justifier des mesures protectionnistes. Du jour au lendemain, des acquis, des convictions et des évidences sur le plan commercial sont remis en question.

Le président américain Donald Trump et le premier ministre Justin Trudeau lors de leur rencontre de lundi, à Washington. (Photo: Kevin Lamarque/Reuters)

Les relations entre le Canada et les États-Unis se sont détériorées depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche. (Photo: Kevin Lamarque/Reuters)

Côté canadien, on continue de croire que le partenariat des deux voisins nord-américains contribue à leur sécurité économique. Et les dirigeants des provinces et territoires canadiens s’engagent à soutenir leurs efforts de coordination, de collaboration et de mobilisation afin de maintenir et de consolider cette relation séculaire. Ils rappellent que la zone nord-américaine de libre-échange est la plus vaste région économique au monde. Elle constitue un marché de 29 billions de dollars regroupant plus de 480 millions de consommateurs.

Juste en 2017, le commerce bilatéral entre le Canada et les États-Unis dépassait les 889 milliards de dollars. Chaque jour, plus de 2,3 milliards de dollars en biens et services franchissent la frontière des deux pays. Les premiers ministres soulignent aussi que près de 9 millions d’emplois américains dépendent du commerce et des investissements avec le Canada. Parallèlement, plus de la moitié de toutes les importations canadiennes de 2017,  soit 294 milliards de dollars  proviennent des États-Unis.

Réunis à St. Andrews, au Nouveau-Brunswick, les premiers ministres des provinces et territoires ont insisté sur la nature intégrée des économies canadienne et américaine et sur la manière dont les biens et les services de qualité produits dans le cadre de ce partenariat solide contribuent à une prospérité continue pour ces deux pays.

Ajouter d’autres cordes à l’arc canadien

Bousculés par l’administration Trump, les dirigeants des provinces et territoires canadiens sont plus convaincus que jamais de la nécessité de diversifier les partenaires, d’explorer de nouvelles possibilités et de s’ouvrir aux marchés émergents. Ils appuient donc les efforts d’Ottawa en vue d’accroître les échanges commerciaux internationaux.

La récente signature de l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP) ainsi que le renforcement des relations commerciales avec l’Europe occasionné par la signature de l’Accord économique et commercial global (AECG) sont le genre d’initiatives dont le Canada a besoin, selon eux.

En outre, ils exhortent Ottawa à travailler à la conclusion de nouveaux accords dans des marchés clés, particulièrement dans la zone Asie-Pacifique, afin d’assurer aux biens canadiens un accès aux marchés internationaux en croissance.

Et puisqu’il faut prêcher par l’exemple, les premiers ministres se sont montrés plus favorables à l’amélioration du commerce interprovincial. C’est ainsi que jeudi, à St. Andrews, le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Brian Gallant, qui accueille ses homologues, a soutenu l’idée d’une plus libre circulation de la bière et de l’alcool dans tout le pays. Il adhère ainsi à la proposition du premier ministre du Manitoba, Brian Pallister qui, il y a quelques jours, demandait aux provinces d’abolir les entraves à au transport d’alcool pour usage personnel.

Brian Gallant estime que la suppression des entraves à la circulation du vin, de la bière et des spiritueux offrirait plus de choix aux consommateurs et plus de marchés aux producteurs. Cette apparente volte-face est la bienvenue pour le commerce interprovincial.

Il faut se rappeler que le Nouveau-Brunswick était engagé dans une bataille judiciaire avec  l’un de ces citoyens, Gérald Comeau, arrêté en 2012 pour avoir transporté de l’alcool du Québec voisin.  Mais M. Gallant assure que cette affaire en était moins une de protectionnisme que de « compétence »  provinciale.

Ottawa et les provinces vont se concerter

Cet automne, le premier ministre Justin Trudeau va rencontrer les premiers ministres provinciaux afin de discuter des moyens d’encourager la croissance économique du Canada. Les deux principaux axes de discussions seront la diversification du commerce international et l’amélioration des échanges à l’intérieur de nos frontières.

L’objectif, pour ce second point étant de renforcer et d’intégrer l’économie canadienne. Une économie débarrassée d’obstacles et de restrictions que les provinces et les territoires s’imposent inutilement.

Justin Trudeau rappelle que « Les entreprises étrangères ne devraient pas avoir un meilleur accès aux marchés canadiens que les entreprises canadiennes d’autres provinces. Je suis impatient de discuter avec les premiers ministres des façons de bâtir une économie encore plus forte et plus intégrée, en plus de créer de bons emplois pour la classe moyenne dans toutes les régions du pays. »

Le premier ministre du Québec Philippe Couillard, à gauche et son homologue Doug Ford de l’Ontario au centre, ont convenu de renforcer le partenariat entre les deux provinces. (Andrew Vaughan/Canadian Press)

Mais l’harmonie n’est pas totale dans la « maison Canada »

Au niveau interprovincial les premiers ministres du Québec Philippe Couillard et de l’Ontario Doug Ford ont réaffirmé que leur détermination à maintenir et renforcer leur partenariat, rappelant qu’ensemble, « l’Ontario et le Québec sont le moteur économique du Canada. Ils représentent plus de la moitié du PIB total de notre pays.» Ils affirment aussi que la vigueur de l’économie de deux provinces assure celle de l’économie du Canada.

Mais des pommes de discorde existent dans la grande famille canadienne. En campagne électorale, le premier ministre Doug Ford avait promis de retirer sa province du marché du carbone commun avec le Québec et la Californie. Il avait aussi  promis de s’opposer à toute taxe carbone fédérale.

Le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, à gauche, et le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, ont convenu de s’opposer à la taxe sur le carbone. (Andrew Vaughan / Presse canadienne)

À Saint Andrews, Doug Ford s’est joint à son homologue Scott Moe de la Saskatchewan pour annoncer que l’Ontario appuierait la province des Prairies en contestant le droit du gouvernement fédéral d’imposer une taxe sur le carbone aux provinces qui ne respectent pas son plan. Le prix du carbone imposé par Ottawa commencerait à 20 dollars la tonne et passerait à 50 dollars la tonne d’ici 2022.

De l’autre côté, la Colombie-Britannique et l’Alberta demeurent à couteaux tirés au sujet de l’oléoduc Trans Mountain. Ce pipeline qui relie l’Alberta à la Colombie-Britannique fonctionne depuis 1953. Mais son propriétaire, Kinder Morgan veut l’élargir et tripler sa capacité, pour pouvoir acheminer 890 000 barils de pétrole de l’Alberta jusqu’à l’océan Pacifique, d’où il serait transporté vers les marchés asiatiques. Les Britanno-Colombiens et bien d’autres Canadiens s’inquiètent de l’impact environnemental des changements annoncés.

(Avec L’AFP, PC, et Cobseil de la fédération)

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