Aung San Suu Kyi

Aung San Suu Kyi, conseillère spéciale de l’État, l’équivalent d’un premier ministre, et ministre des Affaires étrangères du Myanmar
Photo Credit: Khin Maung Win

Génocide des Rohingyas : ni mère Teresa ni Margaret Thatcher, deux identités que décline Aung San Suu Kyi

La communauté internationale a vivement critiqué la dirigeante birmane, Aung San Suu Kyi, pour sa gestion de la crise des Rohingyas, minorité musulmane apatride, qui a été torturée et contrainte de fuir le Myanmar pour se réfugier au Bangladesh. Depuis, l’ONU a qualifié de génocide le traitement qui a été réservé à cette minorité dans ce pays où deux journalistes ont été incarcérés pour avoir traité de la question. Cela a suscité des commentaires de Mme Suu Kyi qui en ont laissé perplexes plus d’un.

RCI avec L'AFP et You Tube

Des journalistes condamnés pour avoir enquêté sur le massacre des Rohingyas : ils ont enfreint la loi, selon Mme Suu Kyi

Aung San Suu Kyi a récemment reconnu que la gestion de crise des Rohingyas dans son pays n’a pas toujours été exemplaire. On sait qu’il y a eu toutes sortes d’exactions de l’armée contre cette minorité, des viols de femmes, des massacres à grande échelle, ainsi que des incendies et des destructions de leurs biens, afin qu’ils quittent définitivement le territoire birman.

Les deux journalistes ont enquêté sur ce génocide reconnu par le Canada, qui a fait plusieurs efforts depuis le début de la crise pour venir en aide à cette population réfugiée.

La condamnation de ces journalistes à sept ans de prison a suscité une vague de critiques dans le monde, ce qui a poussé la dirigeante birmane à tenter de justifier le geste. Pour elle, les deux hommes ont enfreint la loi en faisant leur travail d’investigation.

« Ils n’ont pas été emprisonnés parce qu’ils sont des journalistes, mais parce que le tribunal a estimé qu’ils ont enfreint la loi […] Si nous croyons en l’état de droit, ils ont tout à fait le droit de faire appel au jugement », a déclaré en substance Aung San Suu Kyi.

Les organisations de défense de droits de la personne et de la liberté d’expression ont vivement condamné ces propos, car la sentence n’avait pas été assortie de preuves dans un pays qui est loin d’être un modèle de démocratie.

C’est le cas des ONG Human Rights Watch et de la Commission internationale des juristes.

Cassure avec l’ONU

Depuis l’été 2017, plus de 700 000 Rohingyas ont été obligés de fuir le Myanmar dans des conditions inhumaines. On se souvient que l’envoyé spécial du premier ministre du Canada dans la région, Bob Ray, avait fait un rapport sombre de la situation de cette minorité au Bangladesh. Il y a eu des massacres, ceux qui partaient étaient à la merci des intempéries, ils manquaient de tout et les jeunes filles et les femmes étaient victimes d’agressions sexuelles de la part des soldats. Des faits qui ont ému le monde et mis la dirigeante birmane et tout le pays sur la sellette.

Le silence de Mme Suu Kyi a été maintes fois critiqué. Des voix se sont élevées pour réclamer qu’elle soit déchue du Prix Nobel de la paix qui lui avait été décerné en 1991 pour son combat contre la dictature et en faveur des libertés dans son pays.

L’ONU, qui continue d’enquêter sur cette crise, et qui évalue les possibilités d’un retour des Rohingyas au Myanmar, a récemment demandé que des poursuites judiciaires soient intentées contre le chef de l’armée birmane et cinq hauts gradés, en raison de ce qu’elle a qualifié de nettoyage ethnique et de génocide.

Le rapport qui a été déposé par ses experts vise aussi l’autorité morale que représente Aung San Suu Kyi, ainsi que les milices bouddhistes.

Des réfugiés rohingyas participent à une manifestation au camp de réfugiés de Kutupalong pour marquer le premier anniversaire de leur exode au Bangladesh.

Plusieurs pays, dont les États-Unis, ont soutenu l’idée de poursuites judiciaires internationales contre les responsables militaires birmans. Photo : Reuters/Mohammad Ponir Hossain

La crise des Rohingyas a fortement terni l’image de la dirigeante birmane. L’année dernière, ayant essuyé de nombreuses critiques sur l’horreur infligée aux Rohingyas, Aung San Suu Kyi s’était déjà distinguée par plusieurs déclarations surprenantes :

« Nous sommes prêts à lancer des opérations de vérification de citoyenneté pour leur retour […] Je pense que « nettoyage ethnique » est une expression trop forte pour décrire ce qui se passe […] Je suis simplement une politicienne. Je ne ressemble pas à Margaret Thatcher, non. Je ne suis pas mère Teresa non plus. »

Étant donné que les Rohingyas sont une minorité apatride, l’issue de ce processus de vérification de citoyenneté est évidente.

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