Michaëlle Jean, sécrétaire générale sortante de la Francophonie Photo Credit: Organisation internationale de la francophonie

Vote vendredi pour la direction de la francophonie mondiale : la Canadienne Michaëlle Jean refuse de baisser les armes

Même si beaucoup de personnes considèrent comme très faibles les chances de Michaëlle Jean de rester à la direction de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), celle-ci s’entête dans sa lutte contre la candidate du Rwanda, Louise Mushikiwabo.

Les ailes plombées par des questions de dépenses jugées inappropriées, la Canadienne semblerait se diriger vers une défaite à l’approche du sommet d’Erevan, qui se tient jeudi et vendredi de cette semaine en Arménie et où sont conviés les 84 États membres de plein droit, associés et observateurs de l’OIF.

Au cours des derniers mois, l’ancienne gouverneure générale du Canada a vigoureusement défendu son bilan à la barre de l’OIF, fustigé les « campagnes de dénigrement, de désinformation et de diffamation » menées par les médias, qui l’ont accusée de faire des dépenses, et promis de moderniser les pratiques administratives de l’organisation multilatérale.

Les reportages sur les dépenses de la Canadienne n’ont probablement pas plombé ses chances de réélection, estime Martin Normand de la Chaire de recherche sur la francophonie et les politiques publiques de l’Université d’Ottawa. « Je ne sais pas dans quelle mesure la controverse [sur les dépenses] a eu une résonance à l’extérieur du Canada. L’histoire a plutôt nui à la réputation de Michaëlle Jean au Canada plutôt qu’à l’international », suggère-t-il.

Une adversaire redoutable aux appuis formidables

L’adversaire de Michaëlle Jean est la ministre des Affaires étrangères du Rwanda, Louise Mushikiwabo. Elle a l’appui de la France et d’un nombre considérable de pays de l’Union africaine.

Or, le professeur Jocelyn Coulon, chercheur au Centre d’études et de recherches internationales (CERIUM) de l’Université de Montréal, évoque les « ambitions françaises en Afrique » du président Macron. « La France est déterminée à maintenir et à consolider son statut de première grande puissance en Afrique », dit-il.

Macron verrait dans cette candidature une façon pour la France de resserrer aussi ses liens diplomatiques avec le Rwanda, particulièrement acrimonieux après le génocide des Tutsis en 1994.

Louise Mushikiwabo, la ministre rwandaise des Affaires étrangères bénéficie du soutien de la France comme future secrétaire générale de l’OIF.

Le Canada serait plus faible sur la scène internationale

La course aurait « probablement été plus haletante, plus serrée » si « le Canada avait une empreinte plus importante en Afrique », analyse Jocelyn Coulon. Ce déficit d’influence résulte du désengagement progressif qui s’est amorcé sous le précédent gouvernement canadien de Stephen Harper, et qui s’est poursuivi sous celui de Justin Trudeau, croit-il.

La candidature du Rwanda en fait tout de même grincer certains : le bilan du Rwanda en matière de droits de l’homme est un problème.

Le Rwanda a dans les faits aussi tourné le dos à la langue française en la remplaçant par l’anglais dans ses écoles en 2010. Si la Rwandaise remporte le vote, la Francophonie mondiale sera dirigée par une ressortissante d’une nation où à peine moins de 1 % de la population parle le français.

L’élection d’une secrétaire générale issue d’un pays où le français est si peu répandu ne serait toutefois pas inédite. Le tout premier dirigeant de l’OIF, Boutros Boutros-Ghali, était originaire de l’Égypte, pays où la langue française est parlée surtout dans les hautes sphères de la société.

La direction de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) est briguée par la Canadienne Michaëlle Jean et par la Rwandaise Louise Mushikiwabo.
PHOTOS ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

L’ex-gouverneure générale du Canada critiquée au Canada pour ses dépenses

Ce sont des journaux du Québec qui ont d’abord affirmé l’été dernier que Mme Jean avait fait rénover au coût de 500 000 $ de fonds publics la résidence officielle qu’elle loue à Paris, près de la tour Eiffel, en plus de se procurer un piano de 20 000 $.

Un ancien occupant de la maison de trois chambres semblait surpris l’an dernier de l’ampleur des travaux. Jean Pierre Blackburn, qui y a vécu quand il était ambassadeur du Canada à l’UNESCO, affirmait que les systèmes de climatisation et d’eau chaude avaient besoin de réparations quand il est parti, mais d’insinuer que la résidence était en mauvais état est une exagération.

Un séjour de 50 000 $ de Mme Jean au luxueux hôtel Waldorf Astoria à New York a aussi fait beaucoup sourciller ses détracteurs. Plus récemment, on apprenait qu’un projet de croisière pour de jeunes francophones à bord d’un grand voilier doit être renfloué et qu’il coûterait des centaines de milliers de dollars à même les budgets de l’OIF, faute de commanditaires privés.

Bien que l’OIF soit financé par 84 états, et qu’elle reçoive des contributions obligatoires de 15 millions de dollars du Canada et 1,5 million du Québec chaque année, l’organisme ne publie pas les dépenses de sa dirigeante. Des modifications dans la structure de l’organisation pourraient-elles éviter ce genre d’aveuglements financiers à l’avenir?

Michaëlle Jean élue présidente de l’OIF en décembre 2014. Photo : AFP

RCI avec La Presse Canadienne

En complément

Le premier ministre du Québec fustige à l’Élysée l’attitude dépensière de Michaëlle Jean de l’OIF – RCI

Francophonie : la candidature de Michaëlle Jean plombée par ses « somptueuses dépenses »? – RCI

OIF : Michaëlle Jean fait valoir ses atouts – RCI

Catégories : International, Politique
Mots-clés : , , , , , , ,

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Pour des raisons indépendantes de notre volonté et, pour une période indéterminée, l'espace des commentaires est fermé. Cependant, nos réseaux sociaux restent ouverts à vos contributions.