Un logement sur mesure serait un levier puissant pour sortir de la prostitution (iStock)

Un logement sur mesure serait un levier puissant pour sortir de la prostitution

Qui n’a pas entendu l’appellation « le plus vieux métier du monde » quand il est question de décrire la prostitution.

Ce que sous-tend cette maxime est qu’il est inutile de contrer cette pratique, qu’elle est au cœur même de la définition de l’humain grégaire au sein de sa société.

Vraiment?

Prostitution : idées reçues

Il est commun d’évoquer la prostitution comme une réalité universelle, intemporelle, bénigne – sinon normale – comme une fatalité inhérente à l’homme. Cela se traduit le plus souvent par l’assertion : « C’est le plus vieux métier du monde. »

Il s’agit d’une des idées reçues sur la prostitution parmi les plus fausses et les plus dangereuses.

Elle sous-tend qu’il est vain de vouloir lutter contre, que c’est un métier comme un autre, que ceux qui le pratiquent n’endurent aucune souffrance.

S’il est vrai qu’il peut sembler vain de vouloir lutter contre un fléau aussi profondément enraciné dans les mœurs et les mentalités, il est en revanche erroné de prétendre que « c’est le plus vieux métier du monde ».

En effet, la prostitution n’est pas enracinée partout et n’a pas toujours existé.

Dans les sociétés dites primitives ou traditionnelles, la prostitution est inconnue.

On note seulement, chez certaines d’entre elles, des pratiques d’hospitalité sexuelle.

Source : https://www.fondationscelles.org/pdf/extrait_malika_nor.pdf

(iStock)

Saviez-vous que la prostitution est légale au Canada?

Bon enfin. Entendons-nous. Les lois canadiennes ne punissent pas « directement » la prostitution.

Sans être une pratique inscrite dans un flou juridique, la prostitution jouit – sans jeu de mots – d’un statut légal sans l’être.

Le Code criminel ne définit pas le terme « prostitution ». Pour le faire, il faut se rapporter à la jurisprudence qui définit la prostitution comme étant une offre de services sexuels s’adressant à un nombre indéterminé de personnes et en échange d’une forme quelconque de rémunération (argent, bien, avantages quelconques).

Ce qui est légal 

Croyez-le ou non, le fait que deux adultes consentants aient une relation sexuelle contre rémunération – allons-y directement, que l’homme paie la femme, c’est la très grande majorité des cas – n’a jamais été illégal au Canada.

L’acte sexuel contre rémunération n’est pas illégal, mais ce qui l’entoure l’est.

Donc, ce qui est illégal dans ce contexte de légalité partielle

Communiquer :

Faire savoir dans un lieu public ou à la vue du public que l’on tente d’obtenir des faveurs sexuelles contre rémunération, c’est illégal : amende maximale de 2000 $ et/ou six mois de prison au minimum.

Maison de débauche

Dans ce cas-ci, tenir une maison de passe, un lupanar, un clandé ou autre appellation faisant référence à l’activité sexuelle contre rémunération et se faire prendre, on risque deux ans de prison.

Attention, il y a aussi des peines à prévoir si on ne fait qu’y habiter, qu’on s’y trouve sans excuse légitime ou encore d’être le propriétaire de l’immeuble où l’entreprise fait ses affaires.

On risque ici une amende maximale de 2000 $ et/ou six mois de prison au minimum.

Proxénétisme

Ici, le législateur frappe fort. En vertu de l’article 212 du Code criminel, un proxénète est passible d’une peine d’emprisonnement maximale de 10 ans.

Et si la victime est mineure, la peine de prison passe à 14 ans avec un minimum de deux ans derrière les barreaux.

La sortie de ce monde et les besoins en logements propres

L’organisme La Sortie annonce aujourd’hui la conclusion du projet Horizon, un projet dont l’un des objectifs était de se pencher sur un développement de mise en place de logements spécifiques pour les victimes d’exploitation sexuelle et pour celle qui veulent se sortir de la prostitution.

« Nous espérons avec cette recherche que les femmes victimes d’exploitation sexuelle au Québec soient entendues et qu’elles puissent avoir accès à des logements adaptés à leurs besoins. D’ailleurs, La Sortie compte s’appuyer sur les résultats de cette étude pour développer des modèles d’intervention en logement. »

Ronald Lepage, directeur de La Sortie.

https://mouranicriminologue.com/

C’est la firme Mourani-Criminologie qui a reçu en 2017 le mandat de La Sortie de réaliser une étude sur les besoins et préférences en logement des femmes et des filles de l’industrie du sexe, qu’elles soient prostituées ou danseuses nues.

Les résultats de la recherche sont rendus publics aujourd’hui.

« L’approche Housing First m’apparaît convenir à ces femmes et ces filles qui sont ou ont été dans l’industrie du sexe. Elle consiste à offrir rapidement aux personnes un logement permanent, et ce, sans condition ni étapes préalables. Dans la majorité des cas, elles sont logées en appartement avec un supplément au loyer, et une équipe mobile assure un soutien en vue d’aider au maintien en logement. Une autre variante de cette approche privilégie le logement regroupé. Cela répondrait aussi à la demande de logement permanent dans un immeuble réservé aux femmes et aux filles en situation de prostitution. »

Maria Mourani, présidente de Mourani-Criminologie.

La résidence comme première étape pour sortir du milieu, telle est le constat de l’étude réalisée auprès de 548 femmes de 17 ans et plus qui ont tenté de se sortir de cette industrie, qui y sont encore, ou qui ont réussi leur sortie.

« Ce que ces femmes-là nous disent, c’est que ce ne sont pas les mêmes réalités, même si les femmes qui sont dans l’industrie du sexe sont victimes de violence sexuelle. Elles n’ont pas les mêmes besoins et il y a le jugement aussi. Ces femmes-là me disent qu’elles ne sont pas à l’aise d’être dans ces maisons d’hébergement là, parce qu’elles se sentent jugées. C’est leur façon de voir les choses. Il se peut très bien qu’elles ne soient pas jugées, mais c’est ce qu’elles ressentent. »

Maria Mourani, présidente de Mourani-Criminologie.

L’approche « Housing First » (Parti Vert du Canada)

PC, Le Devoir, La prostitution au Canada, RCI

Plus :

Pour quitter la prostitution, c’est pas où? (Gazette des femmes)

La prostitution, plus vieux métier du monde? (Sciences humaines)

Difficile de sortir de la prostitution (Le Devoir)

La Fédération des femmes du Québec reconnaît que certaines femmes font le choix de travailler dans l’industrie du sexe (RCI)

Catégories : Santé, Société
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