Les défis : entrevue avec Danny Gaudet

« L’un des grands problèmes du Nord, c’est le manque de communications. C’est un obstacle à la création d’une économie dans une collectivité telle que Déline ». Danny Gaudet, négociateur en chef de l’autonomie gouvernementale, Première nation Déné de Déline. Photo : Eilís Quinn

Nom: Danny Gaudet

Occupation: Négociateur en chef de l’autonomie gouvernementale, Première nation Déné de Deline.

Ville natale: Deline, Territoires du Nord-Ouest, Canada.

Citation: « Les gens adorent les traditions et la culture autochtones. C’est l’une des richesses propres au Canada. Pourquoi ne pas la mettre en valeur? »

Intro : Danny Gaudet est membre de la Première nation Déné des Territoires du Nord-Ouest, au Canada. Il a toujours soutenu la création d’une économie durable pour la collectivité grâce à la valorisation des coutumes et traditions dénées. Dans cette entrevue, il expose les défis de la collectivité et les occasions à saisir pour réaliser son rêve.

Eilís Quinn: Quels sont les principaux obstacles à la création d’une économie durable à Deline?

Danny Gaudet: Deline est aux prises avec les mêmes problèmes que de nombreuses collectivités isolées des régions polaires – à part les quelques semaines en hiver durant lesquelles se forme la route de glace, l’avion reste le seul moyen de transport pour s’y rendre. D’autres enjeux tels que l’autonomie gouvernementale entravent la création d’une économie locale.

Qu’entendez-vous par là?

On impose aux Autochtones le modèle de gouvernement européen, sans y intégrer les coutumes et les croyances de ces peuples.

Pouvez-vous nous donner quelques exemples?

Ici, nous suivons le programme scolaire de la province de l’Alberta (plus au sud), depuis la maternelle jusqu’à la 12e année. Cela signifie que les sciences sociales, la biologie, les mathématiques sont enseignées exactement comme en Alberta. Pourquoi ne pas intégrer à ces disciplines les coutumes et les valeurs dénées?

Je crois qu’il y a moyen d’enseigner aux Autochtones le nouveau mode de vie (celui du sud), selon des méthodes traditionnelles. Nous apprenons par la vue et le toucher, et non à l’aide de théories et d’écrits comme les Européens. Si les Autochtones recevaient un enseignement pratique, ils surpasseraient tous les autres.

Comment cela contribuerait-il à créer une économie locale?

Cela touche à tous les domaines, du tourisme à la création d’entreprises. Les gens adorent les traditions et la culture autochtones. C’est l’une des richesses propres au Canada. Pourquoi ne pas la mettre en valeur? Si nous faisons en sorte que notre peuple soit fort, dynamique et qu’il cultive ses traditions au jour le jour, nous créerons une collectivité unique en son genre. Une région nordique isolée comme la nôtre présenterait alors un plus grand attrait pour les touristes – ils y viendraient pour vivre avec les Dénés l’expérience de la chasse, du trappage et des expéditions sur le territoire.

On entend souvent dire que, chez les Premières nations et les Inuits, les jeunes rejettent de plus en plus les traditions et la culture autochtones. Comment raviver leur intérêt?

Nous pourrions emmener les jeunes dans la forêt durant une ou deux semaines, voire un mois, pour faire la collecte des matières premières qu’utilisaient nos ancêtres pour la médecine traditionnelle et l’artisanat, afin de les transformer en produits.

Une fois le projet mis sur pied, nous pourrions enseigner aux habitants locaux à commercialiser ces produits. Nous pourrons ensuite les initier aux affaires et au droit, puis leur montrer comment réinvestir les bénéfices dans leur entreprise.

C’est un projet réalisable et durable. Nous exploiterons les terres et les ressources qui nous entourent pour construire notre avenir. Donnez-nous simplement les outils pour le faire. C’est tout ce que nous demandons. 


Écrivez à Eilís Quinn à eilis.quinn(at)radio-canada.ca

Eilís Quinn, Regard sur l'Arctique

Eilís Quinn est une journaliste primée et responsable du site Regard sur l’Arctique/Eye on the Arctic, une coproduction circumpolaire de Radio Canada International. En plus de nouvelles quotidiennes, Eilís produit des documentaires et des séries multimédias qui lui ont permis de se rendre dans les régions arctiques des huit pays circumpolaires.

Son enquête journalistique «Arctique – Au-delà de la tragédie » sur le meurtre de Robert Adams, un Inuk de 19 ans du Nord du Québec, a remporté la médaille d’argent dans la catégorie “Best Investigative Article or Series” aux Canadian Online Publishing Awards en 2019. Le reportage a aussi reçu une mention honorable pour son excellence dans la couverture de la violence et des traumatismes aux prix Dart 2019 à New York.

Son reportage «Un train pour l’Arctique: Bâtir l'avenir au péril d'une culture?» sur l'impact que pourrait avoir un projet d'infrastructure de plusieurs milliards d'euros sur les communautés autochtones de l'Arctique européen a été finaliste dans la catégorie enquête (médias en ligne) aux prix de l'Association canadienne des journalistes pour l'année 2019.

Son documentaire multimedia «Bridging the Divide» sur le système de santé dans l’Arctique canadien a été finaliste aux prix Webby 2012.

En outre, son travail sur les changements climatiques dans l'Arctique canadien a été présenté à l'émission scientifique «Découverte» de la chaîne française de Radio-Canada, de même qu'au «Téléjournal», l'émission phare de nouvelles de Radio-Canada.

Au cours de sa carrière Eilís a travaillé pour des médias au Canada et aux États-Unis, et comme animatrice pour la série «Best in China» de Discovery/BBC Worldwide.

Twitter : @Arctic_EQ

Courriel : eilis.quinn@radio-canada.ca

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