Changements climatiques: le Yukon s’adapte à la réalité

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La route de l’Alaska est endommagée par la fonte du pergélisol. (Claudiane Samson/Radio-Canada)
Avec l’arrivée au pouvoir de Donald Trump à la présidence des États-Unis, la question de l’existence ou non des changements climatiques reprend de la place dans les médias. Pendant ce temps, les Yukonnais, eux, vivent avec ces changements au quotidien.

Que ce soit par la dégradation du pergélisol, la transformation des routes traditionnelles de chasse ou l’affaissement des bâtiments, les Yukonnais vivent déjà les conséquences des changements climatiques. « Les communautés qui sont au Nord sont certainement les communautés qui sont les plus conscientes des changements qui arrivent. Chez eux il n’y a pas de scepticisme envers les changements climatiques et c’est souvent eux qui sont les plus empressés, les plus motivés pour vraiment adresser ces questions », témoigne Fabrice Calmels, chercheur associé au Centre de recherche du Yukon et spécialiste des géosciences et de l’environnement du nord.

Je pense qu’aujourd’hui la communauté scientifique continue à sonner l’alarme sur ce qui se passe en matière de changements climatiques. Le Yukon, lui, est monté dans le camion, il a mis la sirène et il est dehors.

Fabrice Calmels, chercheur associé au centre de recherche du Yukon

Le chercheur, qui travaille sur les impacts des changements climatiques sur le pergélisol et les conséquences que cela peut avoir sur les communautés, explique que les Yukonnais essaient déjà de s’adapter. Il travaille, par exemple, à rendre certains tronçons de la route de l’Alaska plus résistantes à la dégradation du pergélisol.

L'impact de la dégradation du pergélisol sur les Yukonnais
Écoutez Fabrice Calmels en entrevue avec Julie Landry de Radio-Canada. Il y décrit les observations faites dans le cadre de son travail.
Les changements climatiques au collège
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Les dommages dus à la fonte du pergélisol sur la route de l’Alaska peuvent être un cauchemar pour les camionneurs. (Claudiane Samson/Radio-Canada)

Le Collège du Yukon a décidé d’agir face à ces changements climatiques en offrant, dès septembre 2017, un nouveau programme de Politique des changements climatiques. « L’objectif de ce cours est de contribuer à une meilleure communication entre les groupes d’experts scientifiques et les décideurs au niveau politique », explique Katrine Frese, la coordinatrice et instructrice au programme de Politique des changements climatiques au Collège du Yukon.

Le cours prévoit entre autres des études de cas pour voir comment les Yukonnais s’adaptent aux changements. Par exemple, les étudiants verront comment le centre de recherche du Yukon a cartographié les zones plus susceptibles de connaître des catastrophes naturelles comme la dégradation du pergélisol, des glissements de terrain et les inondations. L’objectif est de mieux planifier les nouvelles constructions d’immeubles.

Politique des changements climatiques
Découvrez les objectifs du nouveau programme du Collège du Yukon en écoutant Katrine Frese, en entrevue avec Julie Landry de Radio-Canada.
La sécurité alimentaire au coeur des préoccupations
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Merren Smith, l’agente de liaison communautaire sur les changements climatiques au Conseil des Premières nations du Yukon, après une chasse au caribou près de Old Crow. (Merren Smith)

Les Premières Nations sont en train de modifier leurs routes traditionnelles de chasse à cause de terrains rendus trop humides par la dégradation du pergélisol.

L’agente de liaison communautaire sur les changements climatiques au Conseil des Premières Nations du Yukon, Merran Smith, a déjà constaté des changements d’habitudes liés aux modifications du climat.

Il est maintenant plus difficile de préserver la viande que les chasseurs chassent et c’est lié aux températures plus élevées. « Tu as moins de temps à préparer la viande, et revenir à temps pour la congeler », raconte celle qui aide les communautés à faire des propositions de projet d’adaptation aux changements climatiques. Les communautés pensent aussi aux façons de mieux partager la nourriture, comme organiser un congélateur central et un système de distribution de viandes offertes parfois par des pourvoiries.

De plus en plus de Premières Nations commencent à faire pousser leur propre nourriture parce qu’ils s’inquiètent de ne plus pouvoir dépendre de la nourriture traditionnelle.

Inquiétudes des Premières Nations
Écoutez Merran Smith en entrevue avec Julie Landry de Radio-Canada. Elle explique comment les changements climatiques ont forcé les Premières Nations à changer leurs habitudes.
Agriculture au Yukon: un gros défi
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Sebastian Jones, de la Société de conservation du Yukon, qui travaille sur des projets d’adaptation aux changements climatiques, a réussi à faire pousser du quinoa à Dawson City. (Sebastian Jones)

Il serait facile de croire que le réchauffement climatique pourrait être avantageux pour faire pousser des récoltes, admet Sebastian Jones, l’analyste de l’énergie à la Société de conservation du Yukon. « Mais un des aspects des changements climatiques est la réduction de la prévisibilité », explique-t-il.

Des projets d’agriculture ont tout de même été mis sur pied, comme une serre communautaire et une ferme-école gérée par les Tr’ondek Hwech’in, près de Dawson City. « Ils sont très enthousiastes par rapport à la sécurité alimentaire et la possibilité de faire pousser leurs propres aliments ». Le but est de contrer le manque d’approvisionnement de nourriture qui risque d’arriver de plus en plus souvent, selon M. Jones.

La ville de Dawson a aussi adopté un plan d’adaptation aux changements climatiques. Par exemple, les températures plus chaudes isolent plus longtemps les gens de West Dawson, parce que la rivière ne gèle plus assez pour la traverser. « Le freeze-up est beaucoup plus long et plus difficile à prévoir », explique Sebastian Jones qui habite à West Dawson. Une mesure d’adaptation est donc de s’assurer que les résidents de cette zone s’approvisionnent mieux pour passer de longues semaines isolées, ou s’arrangent pour travailler de la maison.

Arrivée de Trump au pouvoir, inquiétude supplémentaire?

L’arrivée d’un climatosceptique à la tête des États-Unis inquiète-t-elle les Yukonnais? « En général, je ne crois pas que la présidence de Trump soit très bonne pour les efforts globaux pour réduire notre impact sur les changements climatiques », avance Sebastian Jones. Mais plus localement, ce qui inquiète surtout, c’est la survie de la harde de caribous Porcupine dont dépendent les Autochtones du nord du territoire. Cette harde met bas tous les étés dans la région du refuge faunique de l’Arctique, un secteur qui pourrait être ouvert à l’exploration pétrolière avec Trump au pouvoir.

Fabrice Calmels, lui, se dit très pragmatique. « C’est sûr que ce n’est pas encourageant d’avoir des gens qui sont climatosceptiques parmi les preneurs de décision, mais les faits sont ce qu’ils sont. Ce n’est pas une question de croire ou pas, c’est une question de savoir. »

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