Un photographe norvégien d’origine samie est à la recherche de ses origines

« Mes deux parents sont allés dans des écoles résidentielles. Ils ont par la suite décidé de ne pas nous enseigner leur langue. Ils avaient peur que nous nous sentions honteux et rejetés », explique le photographe. Sur la photo : Jahan Ante et son troupeau de rennes. (Courtoisie de Fred Ivar Utsi Klemetsen)
À Montréal, dans le cadre du premier Printemps nordique, le photographe Fred Ivar Utsi Klemetsen présente une exposition sur son travail documentaire avec le peuple sami en Norvège.

« Je sais que je suis Sami, mais je ne parle pas cette langue. La langue est essentielle à l’identité, il y a donc une part manquante dans ma relation avec ma propre culture et cela m’attriste beaucoup », nous révèle le photographe rencontré à l’espace d’exposition du Printemps nordique à Montréal lundi.

Fred Ivar Utsi Klemetsen a été élevé à Nordkapp dans l’extrême nord de la Norvège au sein d’une famille de huit frères et soeurs. Il est Sami de père et de mère, mais a été élevé dans le christianisme et sans apprendre la langue de ses ancêtres. Sa mère vient d’une famille nomade qui élève les rennes dans les montagnes du Nord depuis des siècles, son père est issu d’une longue lignée de Samis qui a toujours vécu de la pêche et de la ferme.

« Mes deux parents sont allés dans des écoles résidentielles. Ils ont par la suite décidé de ne pas nous enseigner leur langue. Ils avaient peur que nous nous sentions honteux et rejetés », explique le photographe. « Je viens d’une région où les Samis ne sont pas majoritaires et pendant longtemps, nous avons été marginalisés. Beaucoup des membres de ma famille ont laissé tomber leur mode de vie et leur culture. »

  Le photographe d’un peuple en transformation

Le peuple sami est essaimé en Russie, en Norvège, en Suède et en Finlande. Leur mode de vie traditionnel est aujourd’hui en complète dissolution et une minorité des 85 000 Samis vivent encore de la pêche ou de l’élevage des rennes. C’est ici qu’intervient le photographe norvégien qui documente la culture samie dans son évolution, ses transformations depuis 1990.

Aujourd’hui, il ne reste plus que 1500 Samis qui se déplacent avec leur troupeau. Avec l’abandon du mode de vie traditionnel, la culture tend également à se dissoudre dans la modernité.

« Cette photo est l’une des premières de ma série sur la culture samie, je l’ai prise alors que je faisais mon service militaire. Elle m’a permis de reprendre contact avec la culture de ma mère et d’effectuer la transhumance annuelle des rênes, qui ne se fait presque plus à pied aujourd’hui, cette photo a été prise en 1991 », explique Fred Ivar Utsi Klemetsen. (Courtoisie de Fred Ivar Utsi Klemetsen)

« Je suis très concerné par la question des terres ancestrales dont mon peuple se fait déposséder petit à petit. Il existe un parlement sami, mais si celui-ci se positionne contre un projet d’oléoduc par exemple, le parlement norvégien peut tout à fait décider d’aller de l’avant à l’encontre de la volonté samie », nous dit le photographe.

Des scènes de la vie quotidienne

L’exposition présentée à Montréal présente une trentaine de photographies : des scènes de la vie quotidienne du peuple sami en Norvège. Entre pratiques religieuses, élevage de rennes et mariages traditionnels, Fred Ivar Utsi Klemetsen capture l’essence d’une culture en transformation. Il documente par son travail photographique les changements de paradigmes d’une société vue de l’intérieur.

« J’ai pris cette photo en 1992, alors que je suivais un éleveur de rennes, Mathis Somby. La nuit je dormais dans la même cabane que lui et il avait la fâcheuse tendance à se rapprocher de moi, plus la nuit avançait plus je m’en éloignais, car il sentait très fort. Le lendemain, il m’a expliqué que je n’avais pas d’autre choix que de dormir collé contre lui, sinon je me lèverai frigorifié ou malade », raconte Utsi Klemetsen. Sur la photo, Mathis Somby remplit ses bottes komager avec de l’herbe séchée pour isoler ses pieds du froid. (Courtoisie de Fred Ivar Utsi Klemetsen)

« S’il y a quelque chose d’inoffensif, c’est bien le savoir qui n’est pas dangereux du tout. Je souhaite que les gens qui viennent voir l’exposition ressortent de la salle avec une meilleure compréhension de qui nous sommes. Je suis très fier de ma culture samie, je suis très fier d’être ici à Montréal avec cette exposition », nous raconte Fred Ivar Utsi Klemetsen.

L’exposition se poursuit jusqu’au 29 avril 2018 à la Place des Arts de Montréal au Canada.

 

 

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