À qui appartient le drapeau métis?

Le drapeau métis. (Victoria Dinh/Radio-Canada)
Une pétition pour dénoncer le statut de marque officielle/interdite du drapeau métis.

Plusieurs Métis des TNO s’opposent à la tentative de mainmise du Ralliement national des Métis (RNM) sur le drapeau métis – le symbole de l’infini au milieu d’un rectangle –, même s’ils n’ont pas manifesté l’intention de signer la pétition circulant en ce sens.

« Je crois que tous les Métis au nord ou au sud du 60e devraient avoir le droit d’utiliser le drapeau, affirme le président de la Northwest Territories Métis Nation (NTMN), Garry Bailey. C’est la même chose pour le nom Nation métisse. Le RNM (Métis National Council) n’est pas la seule Nation métisse. »

Le RNM fédère des organisations métisses de l’Ontario et des trois provinces de l’Ouest. Il ne reconnaitrait pas la NTMN, selon M. Bailey, qui ne semble pas s’en formaliser. « Ils ont leurs politiques et nous n’y cadrons pas. Nous faisons notre propre affaire et nous préférons que le gouvernement nous reconnaisse comme une entité, comme notre propre gouvernement. »

Tous ne sont pas inclus

La North Slave Métis Alliance (NSMA) n’est pas non plus membre du RNM [NDLR: North Slave est une région des Territoires du Nord-Ouest]. Pour son président, Bill Enge, il est prématuré d’aller de l’avant en faisant du drapeau une marque déposée puisque tous les Métis n’ont pas été identifiés.

« C’est douteux qu’on ait à demander au RNM la permission de lever notre drapeau », déplore Bill Enge, ajoutant que le RNM n’a pas reconnu formellement la NSMA comme étant une organisation métisse légitime.

M. Enge souligne que dans deux cas de cour, le caractère métis de son organisation a été reconnu en vertu du test Powley.

Richard Hardy est président de la Société foncière métisse de Fort Norman basée à Tulita et a contribué à fonder le Collectif métis du fleuve Mackenzie. Il ignorait les démarches du RNM tout autant que la pétition. « C’est dans le domaine public, rétorque-t-il. Ils ne devraient pas être capables de faire ça. »

Le drapeau métis continuera de flotter au-dessus du bureau de la société foncière, assure M. Hardy.

« À quand la poupée Louis Riel? »

L’ancienne présidente de la Fédération franco-ténoise (FFT), Rachelle Francoeur, est une Métisse de l’Est, hors des limites de ce que le RNM définit comme étant l’aire métisse. Mme Francoeur trouve déplorable qu’on utilise un « symbole d’union, d’alliance et de métissage infini » pour en faire une marque. « À quand la poupée Louis Riel ? », ironise-t-elle.

Elle dit comprendre que le RNM veuille protéger la culture, mais dénonce le caractère possessif et non inclusif de la démarche.

Le Ralliement national des Métis a enregistré le symbole de l’infini au milieu d’un quadrilatère auprès de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) dans la catégorie « marque interdite; marque officielle » en 2015, en vertu de la Loi sur les marques de commerce, comme tout insigne, écusson, emblème ou marque adoptée et employée par une autorité publique.

À partir du moment où la démarche du RNM a été rendue publique dans le journal de l’OPIC, personne ne peut avoir le droit exclusif sur le drapeau et intenter une poursuite contre quelqu’un l’utilisant, explique un agent de l’OPIC. C’est comme si le drapeau métis devenait officiellement dans le domaine public. Et la loi ne contient pas de disposition pour s’opposer à un enregistrement comme marque officielle, a écrit le 19 décembre dernier Jepharry Brennant, de I’OPIC, à Allen Mercier, qui s’opposait à ce statut. La Cour Fédérale possède la compétence exclusive pour annuler une marque officielle une fois que l’avis public a été donné.

Marque de commerce ou marque officielle: confusion

Depuis le 21 décembre dernier, le site Internet du RNM affiche un texte faisant état des démarches entreprises. On y explique que le RNM a œuvré à faire du drapeau une marque de commerce, ce qui a eu pour résultat – bizarrement – d’en faire une marque officielle.

La manœuvre aurait été rendue nécessaire en raison du grand nombre d’individus et d’organisations s’identifiant comme des Métis et s’appropriant les symboles et le nom de la Nation métisse.

Or, une marque de commerce et une marque officielle sont des choses totalement différentes. Une marque de commerce donne un droit exclusif et permet un recours légal contre l’usage non autorisé.

La pétition (bilingue) a été lancée par Alexandria Anthony, qui se dit descendante d’un des combattants métis de la bataille de Seven Oaks, Cuthbert Grant. Deux-cent-trois personnes l’avaient signée au moment de mettre sous presse. La pétition confond marque déposée et marque officielle.

Mme Anthony s’insurge contre la prétention du RNM d’être une autorité publique représentant tous les Métis. « Le RNM a reçu une marque officielle et non une marque de commerce, écrit-elle à L’Aquilon. Cela peut être contourné. » Mais l’OPIC a accepté le RNM comme étant une telle autorité.

Clarification : Nous avons précisé que la Cour Fédérale possède la compétence exclusive pour annuler une marque officielle une fois que l’avis public a été donné.

Denis Lord, L'Aquilon

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