Encourager le piégeage du loup ne sauvera pas les hardes de caribous, disent des chercheurs

Les Territoires du Nord-Ouest ont un projet pilote pour mieux récompenser les chasseurs qui abattent les loups qui se nourrissent de caribous. (iStock)
Les nouvelles mesures incitatives pour abattre les loups et aider à la sauvegarde des hardes de caribous dans les Territoires du Nord-Ouest, dans l’Arctique canadien, seraient davantage une distraction politique qu’une solution, selon deux chercheurs spécialisés dans l’étude de la faune.

Cet automne, le ministère de l’Environnement et des Ressources naturelles s’est dit alarmé par le déclin des hardes de caribou de Bathurst et de Bluenose-Est, dont les populations ont diminué d’environ la moitié en trois ans.

Une baisse qui résulte d’un cycle naturel accéléré par plusieurs facteurs, dont les changements climatiques et la prédation des loups, selon le gouvernement.

Pour contrer cette baisse, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest a bonifié en février son programme de récompenses pour les chasseurs qui abattent les loups qui se nourrissent des deux hardes.

Sous le nouveau programme, un chasseur qui abat un loup dans la zone désignée de la région du North Slave peut gagner jusqu’à 1650 $ par animal, selon la qualité de la fourrure.

Aucune preuve

Selon le professeur agrégé au Collège d’agriculture et de ressources biologiques de l’Université de la Saskatchewan, Ryan Brook, aucune preuve concrète ne suggère que le fait de tuer des loups augmente la population de caribous.

« Les politiciens aiment dire : « Nous allons abattre des loups et sauver la mise. », croit Ryan Brook. À court terme, si on veut avoir l’air d’un politicien qui prend les choses en charge, c’est fantastique. Plus tard, après un retour à la réalité, rien n’est réglé, mais on a été réélu. »

Une opinion que partage son confrère biologiste de l’Université du Montana, Mark Hebblewhite.

« Ça n’aura pas d’effet sur le caribou, les gens vont juste être heureux que quelque chose se passe. »

Mark Hebblewhite, biologiste, Université du Montana

Dans un courriel, le gouvernement rappelle que le projet pilote n’est que l’une des stratégies envisagées pour appuyer le rétablissement des hardes de caribou. Les mesures incitatives ainsi que différentes options doivent être examinées dans le cadre d’un processus de cogestion avec les différents partenaires autochtones du gouvernement.

Le caribou de la toundra est le type de caribou le plus nombreux et le plus répandu aux T.N.-O. (Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest)
Une méthode inefficace

En 2017, un groupe de travail chargé par le gouvernement territorial d’examiner les différentes méthodes pour réduire les populations de loups près des hardes de caribous a comparé les coûts, l’efficacité et l’humanité de plusieurs méthodes.

Sans faire de recommandations finales sur la meilleure façon de faire diminuer la population de loups, le groupe a attribué le meilleur résultat à une méthode qui consiste à abattre l’ensemble d’une meute de loups à l’intérieur sa tanière. Le fait de tirer des coups de feu sur des loups à partir d’un avion figurait également en haut de la liste.

Malgré leur bas coût, le piégeage et l’installation de collets ont obtenu un faible résultat, notamment à cause de leur faible taux d’efficacité et de leur niveau de cruauté. Ryan Brook estime que le choix de payer les chasseurs pour tuer des loups au hasard par piégeage pourrait en réalité aggraver le problème.

Selon lui, les loups se regroupent en meutes et il n’y a généralement qu’un seul couple reproducteur par meute. Si un membre de ce couple est tué, la meute risque de se disperser et de former plusieurs autres groupes plus petits.

« Tout à coup, au lieu d’avoir une portée par an, on en a au moins trois par an […] Cette approche désordonnée pourrait entraîner davantage de loups », croit le professeur.

Le député de Frame Lake, Kevin O’Reilly, a déclaré à CBC/Radio-Canada qu’il ne comprenait pas pourquoi le gouvernement territorial avait introduit le nouvel incitatif, en particulier après les conclusions du groupe de travail.

Il pense que le gouvernement s’est détourné des autres méthodes comme les tirs ciblés aériens ou au sol, car l’opinion publique ne les accepte pas.

Le gouvernement rétorque par courriel que le rapport du groupe de travail n’en est pas venu à des recommandations sur la meilleure méthode à utiliser.

Le gouvernement conclut toutefois que les informations de l’étude devront être prises en compte lorsqu’il travaillera avec ses partenaires de cogestion pour mettre en oeuvre son plan pour protéger les hardes de caribous.

Avec des informations d’Hilary Bird et de Rachel Zelnicker de CBC North

Radio-Canada

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