Ému aux larmes, Justin Trudeau s’excuse auprès des Inuits du Nord canadien

Justin Trudeau fait une pause lors de ses excuses officielles présentées aux Inuits pour la gestion de la tuberculose dans l’Arctique par le gouvernement fédéral des années 40 aux années 60, lors d’un événement à Iqaluit, au Nunavut, vendredi. (Sean Kilpatrick/La Presse canadienne)
Accueilli par une chorale formée de femmes inuites qui a entonné le Ô Canada en chœur, le premier ministre canadien Justin Trudeau a présenté vendredi à Iqaluit des excuses officielles au peuple inuit pour la mauvaise gestion du gouvernement fédéral de la crise de la tuberculose dans les années 1940, 1950 et 1960.

Finalement parvenu à Iqaluit, dans l’Arctique canadien, le premier ministre a salué les membres de la communauté venus entendre ses excuses, 24 heures plus tard que prévu. Une tempête l’avait empêché d’atterrir, jeudi, quand devait avoir lieu la cérémonie. « La météo est la vraie patronne », a-t-il lancé sur une note humoristique avant d’amorcer son discours.

« Je suis ici aujourd’hui pour présenter des excuses officielles pour la gestion par le gouvernement fédéral de l’épidémie de tuberculose dans l’Arctique, des années 1940 aux années 1960. »
Justin Trudeau, premier ministre du Canada

Au cours de cette épidémie de tuberculose, un bateau-clinique canadien, le C.D. Howe, était chargé de se rendre dans les communautés autochtones du Nord québécois afin d’y soigner les personnes atteintes de la tuberculose. Forcés de monter sur le bateau pour être emmenés dans des villes plus méridionales sans pouvoir dire au revoir à leurs proches, plusieurs malades sont morts dans des hôpitaux canadiens sans que leurs proches les revoient jamais.

Les Inuits étaient ainsi emmenés de force en train, en avion ou par bateau dans des villes comme Hamilton ou Edmonton, « Ce furent des années d’isolement, de confusion et de douleur, a commenté M. Trudeau. Malheureusement, la politique pernicieuse du gouvernement à l’égard de l’épidémie de tuberculose s’inscrit dans une longue histoire de colonialisme destructeur. »

« Des familles séparées à jamais. Des vies brisées qui ne seront jamais réparées, a poursuivi le premier ministre. Ce sont des torts que nous ne pourrons jamais effacer. Et le Canada doit porter cette culpabilité et cette honte. »

« Cette approche était coloniale et mal avisée. Elle a fait du tort aux Inuits. »
Justin Trudeau, premier ministre du Canada
Une réalité dans le Nord, une réalité dans le Sud

« Je sais que plusieurs personnes présentes cet après-midi ont été touchées par cette politique injuste et continuent de souffrir de la perte d’êtres chers », a-t-il reconnu en précisant qu’il était normal que les Inuits se méfient désormais du gouvernement canadien.

De nombreuses familles ont ainsi perdu des proches sans savoir où ni comment ils étaient morts, alors que d’autres patients, guéris, ont été retournés dans la mauvaise communauté. Les dépouilles des Inuits étaient identifiées par un simple chiffre et mises en terre à des milliers de kilomètres de leur communauté.

« Alors qu’il travaillait à notre adhésion à la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies, le gouvernement du Canada traitait les habitants de l’Inuit Nunangat comme des personnes de moindre importance, et identifiait les Inuits par des numéros plutôt que des noms, a déploré M. Trudeau. Alors qu’il se félicitait que les enfants du Sud apprenaient à écrire, il punissait les enfants inuits qui parlaient leur langue. Alors qu’il travaillait à établir un système de santé universel, il forçait les Inuits à déménager dans des lieux où les maladies et les infections faisaient des ravages. »

« Les enfants qui rentraient chez eux revenaient parmi des proches dont ils ne se souvenaient plus et qui parlaient une langue qui leur échappait, dans une région dont ils ne gardaient aucun souvenir. Ce furent des années d’isolement, de confusion et de douleur », a ajouté le premier ministre.

« C’est un chapitre douloureux et honteux de notre histoire. »
Justin Trudeau

« Nous sommes désolés de vous avoir arraché à vos familles, nous sommes désolés de votre souffrance, nous sommes désolés d’avoir brisé ce vous aviez de plus précieux, un foyer aimant », a déclaré le premier ministre, vendredi. « Aujourd’hui, nous acceptons la responsabilité pour les torts causés par les politiques et les actions du gouvernement fédéral. Le racisme et la discrimination auxquels les Inuit ont fait face étaient et seront toujours inacceptables. »

Des excuses… et des promesses

M. Trudeau a toutefois indiqué que « de simples excuses ne suffisaient pas » et qu’il fallait poser des gestes concrets pour parvenir à une réconciliation entre les peuples. Il a ainsi annoncé que le gouvernement fédéral allait investir 27 millions de dollars sur cinq ans pour mettre sur pied un programme afin que les familles puissent tenter de retrouver des proches disparus au cours de la crise de la tuberculose.

« Les excuses de ce matin constituent une promesse, la promesse de ne jamais oublier le tort qui vous a été fait […] et de bâtir l’avenir ensemble. »
Justin Trudeau

Les vaccins, le dépistage et les médicaments ne suffiront pas à enrayer la tuberculose, a toutefois prévenu le premier ministre Trudeau. Versant une larme en énumérant avec émotions les conditions difficiles dans lesquelles vivent de nombreux Inuits, il a promis que son gouvernement investirait 640 millions de dollars pour la construction de logements afin d’améliorer leur qualité de vie.

« Nous devons nous attaquer à la pauvreté, à l’insécurité alimentaire et aux mauvaises conditions de logement », a poursuivi le premier ministre. En parallèle avec nos efforts pour lutter directement contre la tuberculose, nous investissons dans des services de base. »

Soucieux de ne pas répéter les erreurs du passé, le gouvernement canadien investit cet argent dans un plan conçu par les Inuits et qui sera réalisé par ses citoyens. « Au nom de tous les Canadiens et Canadiennes, nous promettons de bâtir un avenir meilleur. Et nous promettons de bâtir cet avenir ensemble », a-t-il conclu.

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