Le diplomate britannique James Richard Cross PHOTO : LA PRESSE CANADIENNE

Mort de James Richard Cross ex-otage du Front de libération du Québec en 1970

James Richard Cross, un diplomate britannique en poste à Montréal qui avait été retenu en otage pendant 59 jours par un groupe séparatiste violent et radical québécois en 1970, vient de mourir à 99 ans. Il est donc mort un peu plus de 50 ans après la crise politique soulevée par son enlèvement et connue sous le nom de la crise d’Octobre.

Le décès est survenu plus tôt ce mois-ci et n’a été confirmé que mercredi par son gendre, John Stinger, qui a déclaré à CBC News que Cross était mort de la COVID-19.

Le délégué commercial britannique avait été enlevé le 5 octobre 1970 à son domicile par des révolutionnaires armés appartenant à une cellule du Front de libération du Québec (FLQ).

Fondé en 1963 et actif jusqu’en 1972, le FLQ prônait l’insurrection, souvent violente avec des bombes, pour réaliser l’indépendance du Québec du reste du Canada. Ses membres, appelés felquistes, souhaitaient l’établissement d’une société de travailleurs.

Des soldats ont pris la relève de la garde, le 16 octobre 1970, au domicile montréalais du délégué commercial britannique James Richard Cross (La Presse canadienne)

Un autre enlèvement, cinq jours plus tard, d’un ministre québécois cette fois

Quelques jours après avoir kidnappé le diplomate britannique, le 10 octobre, une autre cellule du FLQ avait enlevé le vice-premier ministre et ministre du Travail Pierre Laporte. Ce dernier a été tué le 17 octobre et son corps retrouvé dans le coffre arrière d’un véhicule.

Tout cela avait provoqué la pire crise politique au pays depuis sa création en 1867. Le premier ministre canadien Pierre Elliott Trudeau, père de l’actuel premier ministre Justin Trudeau, avait invoqué la loi des mesures de guerre pour traquer les membres du FLQ. Des troupes militaires fédérales s’étaient mises à patrouiller dans les rues de Montréal et des centaines d’arrestations avaient été effectuées souvent de manière arbitraire.

En octobre dernier, le chef d’un parti d’opposition à la Chambre des communes, le Bloc québécois, a exigé que le premier ministre Justin Trudeau présente des excuses au nom du gouvernement fédéral pour la mise en œuvre de la Loi sur les mesures de guerre. La mesure a été rejetée.

La crise d’Octobre a donné lieu à l’une des photos les plus emblématiques de l’histoire du Canada : James Richard Cross en train de jouer aux cartes alors qu’il est assis sur une caisse apparemment remplie de dynamite.

Près de deux mois de captivité

Cinquante-neuf jours après son enlèvement, James Richard Cross a été libéré en échange d’un passage sûr vers Cuba pour certains membres du FLQ.

Au terme de sa captivité, il avait perdu 10 kilos. Sinon, il était en bonne santé. Il n’avait pas été blessé et décrivait ses ravisseurs comme ayant été courtois. 

Deux jours plus tard, il s’envolait en avion vers le Royaume-Uni. Il confessait alors dans un entretien : « Bizarrement, je suis arrivé à la conclusion que je n’avais pas peur de la mort. Plus tard, j’ai eu peur qu’ils m’étranglent, je ne voulais pas être étranglé. Ça ne me dérangeait pas qu’on me tire dessus. Mais je n’avais pas vraiment envie d’avoir un bout de fil autour du cou et de le voir serré. »

« Mais ce qui m’inquiétait tout le temps, c’était le sort de ma femme. Car ce qui me préoccupait particulièrement à l’époque, c’était sa situation financière. Et j’ai composé deux lettres, dans mon esprit seulement, l’une était un testament final à ma femme disant vous savez, combien je l’aimais et tout, l’autre était une lettre à M. Trudeau l’appelant à faire quelque chose pour elle. »

Après la mort du ministre québécois Pierre Laporte, James Richard Cross n’avait plus vraiment envie de parler à ses ravisseurs. Et dans ses mémoires de 1998, il a clairement indiqué qu’il n’avait aucune sympathie pour les membres du FLQ.

« Je les détestais tous et je les aurais volontiers tués si l’occasion s’était présentée. Cela ne signifie pas que je ne pouvais pas entretenir des relations amicales en surface. Je fonctionnais à deux niveaux. Un, mes pensées réelles, et deux, une correspondance superficielle avec eux. »

James Richard Cross avec sa femme Barbara (Archives)

Une scène choquante et irréelle dans les rues de Montréal

Cross avait été enlevé sous la menace d’une arme à feu à son domicile le 5 octobre 1970, sous le regard de sa femme Barbara et de leur chien dalmatien. Il a été embarqué dans une voiture et emmené dans une maison où il a passé ses journées menotté, autorisé à lire et à regarder la télévision sans voir le visage de ses ravisseurs.

Ses ravisseurs avaient formulé plusieurs exigences aux autorités, notamment la libération des « prisonniers politiques » et la publication du manifeste du groupe.

Le manifeste du FLQ sera lu au complet sur les ondes de Radio-Canada et sur ses stations affiliées en province.

Après la crise d’Octobre, James Richard Cross est devenu sous-secrétaire dans diverses divisions du ministère britannique du Commerce et de l’Industrie et du ministère de l’Énergie.

Des soldats surveillent un pont à Montréal après l’imposition de la Loi sur les mesures de guerre le 16 octobre 1970. Photo : La Presse canadienne

RCI avec CBC News, La Presse canadienne et RCI

Catégories : International, Politique, Société
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