Une agence de renseignement canadienne aurait espionné les citoyens canadiens
Une des plus importantes agences d’espionnage au pays, le Centre de la sécurité des télécommunications du Canada (CSTC), viole le droit à la vie privée octroyé par la Charte des droits et libertés, selon une poursuite déposée par l’Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique et l’organisme OpenMedia.
Des représentants des deux groupes de défense des droits civils soutiennent que la surveillance à grande échelle et non contrôlée des Canadiens par le CSTC est inconstitutionnelle.
Le saviez-vous?
- Le CSTC se rapporte au ministère de la Défense et se décrit comme « l’organisme national de cryptologie du Canada ».
- Le CSTC a le droit de lire les courriels et les textos et d’écouter les appels téléphoniques des Canadiens qui communiquent avec une personne qui est à l’extérieur du Canada.
- Lorsqu’elle veut intercepter le contenu de courriels, de textos et d’appels de Canadiens à l’intérieur du pays, l’agence doit demander une autorisation du ministre de la Défense.
Le rapport qui a pointé du doigt le CSTC
À la fin du mois d’août, dans son dernier rapport au Parlement canadien avant de quitter ses fonctions, le commissaire du CSTC Robert Décary a évoqué la possibilité que l’agence de renseignement ait pu prendre pour cible des Canadiens au cours de la dernière année.
Le dévoilement du rapport du commissaire Décary coïncidait avec de troublantes révélations concernant l’interception de communications de citoyens américains et britanniques par leur gouvernement.
M. Décary, un ancien juge, n’a pu arriver cependant à une conclusion définitive sur cette question en raison du manque de clarté ou d’informations dans quelques documents.
Les droits des Canadiens auraient bel et bien été violés selon les poursuivants
La poursuite, déposée en Cour suprême de la Colombie-Britannique, allègue que deux facettes des travaux du CSTC violent les protections de la Charte contre les fouilles et les saisies déraisonnables et enfreignent la liberté d’expression, soit : l’interception des communications privées des Canadiens, et la collecte à grande échelle de données produite par les Canadiens dans le cadre de leurs activités quotidiennes en ligne et lors de conversations téléphoniques.

Aucune mesure de contrôle, selon le BCCLA
« Nous sommes profondément inquiets que le CSTC ait un accès secret et illégal aux communications privées des Canadiens ordinaires sans qu’il y ait de mesures pour contrôler ses activités », a déclaré un des avocats de la BCCLA, Joe Arvay.
« L’expérience dans d’autres pays a démontré que les agences gouvernementales ont tendance à repousser et même dépasser les limites de l’espionnage à moins d’être sujettes à des vérifications », a-t-il ajouté.
Le BCCLA note que contrairement à ce qui se fait aux États-Unis, aucune cour ou comité au Canada n’est chargé de surveiller les interceptions des communications privées par le CSTC et il n’y a pas de contrôle judiciaire de ses importants pouvoirs.
D’autre part, en vertu d’une directive du ministère de la Défense édictée en 2011, le CSTC peut également récolter et analyser les métadonnées qui sont produites chaque fois qu’un Canadien se sert d’un téléphone cellulaire ou navigue sur Internet.

Le point de vue du Centre de la sécurité des télécommunications du Canada
Le CSTC est resté avare de commentaire, sa conseillère principale en communications se limitant à transmettre la déclaration suivante: « En vertu de la loi, il est interdit à cette organisation de cibler les Canadiens. »
Mais en août dernier un ancien responsable canadien a tenté de mettre en contexte les accusations portées contre le CSTC. Les Canadiens ne devraient pas s’inquiéter outre mesure de ce rapport, avait affirmé Ray Boisvert, qui était, jusqu’à l’an dernier, directeur adjoint du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).
Selon lui, il est inévitable qu’une poignée de Canadiens innocents soient espionnés au passage, considérant la masse d’informations analysées par les ordinateurs du CSTC.
« Est-ce qu’il s’agit d’une grande conspiration pour tromper les Canadiens ou tenter de s’infiltrer dans leur vie privée? Absolument pas », a lancé M. Boisvert, qui a travaillé une trentaine d’années pour le SCRS et la Gendarmerie royale du Canada.
Écoutez notre reportage du 9 octobre
Espionnage au Brésil : pas de mea culpa de la part du Canada Écoutez
CSTC canada
Reportage du Téléjournal de Radio-Canada télédiffusé le 1er avril 2008
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