Bilinguisme

(archives)

Alberta et Saskatchewan, pas de statut bilingue tranche la Cour d’appel

L’Alberta n’a pas l’obligation de publier ses lois en français et en anglais, tranche la Cour d’appel de cette province de l’ouest canadien. Le gouvernement albertain avait également le droit de se déclarer unilingue anglophone en 1988, statuent les juges.

Le tribunal confirme ainsi le statut unilingue de l’Alberta, jugeant que le bilinguisme n’était pas un droit constitutionnel reconnu et transférable au moment où la province a vu le jour.

La décision a des répercussions dans la province voisine en Saskatchewan, qui a vu le jour de la même façon et la même année que l’Alberta voisine, en 1905. La Saskatchewan s’est elle aussi déclarée unilingue anglophone en 1988, après la décision de la Cour suprême du Canada dans la cause Mercure.

Cette cause avait statué que les lois sur le bilinguisme qui existaient en Saskatchewan étaient valides, mais n’étaient que de simples lois provinciales, non enchâssées dans la Constitution. Ces lois pouvaient donc être abrogées, ce qu’ont fait les gouvernements saskatchewanais et albertain.

Les trois juges de Cour d’appel de l’Alberta ont confirmé ce raisonnement vendredi. Fait à noter, deux des trois juges ne se sont pas appuyés sur l’arrêt Mercure et ont donné gain de cause au gouvernement albertain pour d’autres raisons.

Une cause née d’une contravention

L’homme à l’origine du procès, Gilles Caron, se bat depuis des années pour faire reconnaître le statut bilingue de l’Alberta, et par extension, de la Saskatchewan. Depuis 2003, il conteste une contravention rédigée uniquement en anglais.

Gilles Caron réagit à sa défaite en Cour d'appel de l'Alberta, le 21 février 2014 à Edmonton.
Gilles Caron réagit à sa défaite en Cour d’appel de l’Alberta, le 21 février 2014 à Edmonton. © Radio-Canada/Sylvain Bascaron

Son action en justice s’est élargie à la question du bilinguisme dans les lois provinciales. L’Association canadienne-française de l’Alberta et l’Assemblée communautaire fransaskoise se sont jointes à sa cause.

Leurs avocats affirmaient que les droits linguistiques reconnus aux Métis en 1870 devraient s’appliquer aux provinces des Prairies, plutôt que seulement au Manitoba, où le bilinguisme s’applique dans les lois et dans les tribunaux. Ils ajoutaient que ces droits avaient été annexés à la Constitution lors de la création de ces trois provinces.

Dans son argumentaire écrit de vendredi, le juge Frans Slatter limite la portée des droits linguistiques.

« Même si l’obligation d’adopter les ordonnances en français existait, celle-ci se limitait à colonie de la rivière Rouge, qui a formé plus tard le Manitoba. Il n’y a aucune raison d’interpréter les documents pertinents de manière à étendre cette obligation au reste de la Terre de Rupert ou aux Territoires du Nord-Ouest »— Juge Frans Slatter, Cour d’appel de l’Alberta

Si Ottawa avait voulu, il l’aurait fait

L’Alberta avançait que depuis la création du Canada, le gouvernement fédéral avait toujours eu un pouvoir absolu sur les territoires et qu’il avait consciemment choisi de ne pas inclure les droits linguistiques dans l’acte de création de l’Alberta et de la Saskatchewan.

Les juges de la Cour d’appel sont d’accord. La juge Patricia Robowtham cite la Cour suprême du Canada, qui disait dans l’arrêt Mercure que « le Parlement savait très bien comment enchâsser une disposition s’il voulait le faire, c’est-à-dire en prescrivant expressément des droits linguistiques […] comme il l’a fait dans le cas de l’article 23 de la Loi de 1870 sur le Manitoba ».

« À mon avis », écrit la juge Robowtham, « l’absence de disposition visant à enchâsser les droits linguistiques dans le Décret de 1870 constitue un obstacle insurmontable à l’argument des appelants. »

Les avocats de la Couronne avaient aussi souligné au procès que si M. Caron obtenait gain de cause, un chaos législatif serait inévitable.

Lors de la proclamation royale de 1869, la reine d’Angleterre a reconnu les droits acquis des Métis, dont les droits linguistiques. Ces droits ont aussi été formellement reconnus dans la loi menant à la création du Manitoba en 1870. Durant cette même année, le Canada a annexé les autres terres de l’ouest du pays.

Jugement de La Cour d’appel de l’Alberta

RCI et Radio-Canada

Catégories : Politique, Société
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