Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés demande au Canada de modifier sa façon de faire qui, souvent, n’est pas conforme au droit international

Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés demande au Canada de modifier sa façon de faire qui, souvent, n’est pas conforme au droit international
Photo Credit: HCR

Demandeurs d’asile emprisonnés ici par milliers depuis des années

Dans sa plus récente enquête, la journaliste Brigitte Bureau de Radio-Canada affirme qu’au moment même où des milliers de réfugiés syriens sont accueillis à bras ouverts au Canada, d’autres demandeurs d’asile, parmi eux des enfants, se retrouvent enfermés dans des centres de détention alors qu’ils ne représentent aucun risque à la sécurité du pays.

L’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) emprisonnerait ainsi chaque année plus de 4000 demandeurs d’asile en attendant que les autorités décident de leurs sorts, une façon de faire qui serait souvent contraire au droit international selon l’Organisation des Nations unies (ONU).

Dans un rapport datant d’octobre dernier, qui porte sur le Canada, le HCR, le Haut-Commissariat aux réfugiés se disait particulièrement préoccupé par la détention d’enfants.

Centre de détention au Canada où sont envoyés des demandeurs d’asile.
Centre de détention au Canada où sont envoyés des demandeurs d’asile, notamment des enfants. © CBC

Les recours à la prison et à la détention ne sont pas nouveaux

C’est en fait depuis 2012, sous le précédent gouvernement conservateur canadien de Stephen Harper, que le recours à la détention s’est transformé en une pratique banalisée par de nouvelles dispositions légales.

Dans le nouveau système canadien de tri des réfugiés adopté en juin 2012, des groupes d’hommes, de femmes et d’enfants de plus de quinze ans peuvent dorénavant être détenus pendant un an, en attendant que l’État canadien décide de leur sort.

Cette mesure de détention était un des nouveaux outils que voulait se donner le gouvernement canadien à l’époque afin de dissuader spécifiquement les flux de « faux » réfugiés et l’arrivée d’étrangers clandestins au pays. Les Roumains gitans et les Mexicains étaient particulièrement visés par cette nouvelle approche coercitive qui invoque des préoccupations liées à la sécurité.

Mais, selon une étude commandée par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), plus de 90 % des demandeurs détenus au Canada le sont pour des motifs qui n’ont rien à voir avec la sécurité.

Écoutez
La Charte canadienne des droits et libertés

Le saviez-vous?
L’article 9 de la Charte des droits et libertés du Canada stipule que « chacun a le droit de ne pas être arbitrairement détenu ou emprisonné. »
L’article 10 (c) prévoit que toute personne arrêtée ou détenue a le droit « d’avoir la validité de la détention déterminée par voie d’Habeas Corpus et d’être libéré si la détention est illégale. »
Ces dispositions constitutionnelles s’appliquent à tous les citoyens canadiens ou résidents permanents, mais plus maintenant aux demandeurs d’asile.
L’Habeas Corpus est une règle de droit qui garantit à une personne arrêtée une présentation rapide de quelques jours ou de quelques heures devant un juge afin qu’il statue sur la validité de son arrestation.
Le principe de l’Habeas Corpus est généralement respecté dans les sociétés démocratiques.
Cependant, lors d’une situation d’urgence, de crise, d’insurrection, d’invasion, de guerre, la règle de l’Habeas Corpus peut être suspendue.
Ce fut le cas aux États-Unis pendant la guerre de Sécession, pendant la Deuxième Guerre mondiale et suite aux événements du 11 septembre 2001, notamment pour les détenus de Guantanamo.

Prison de Guantánamo en 2011
Prison de Guantanamo en 2011 © SRC/Stringer / Reuters

Une approche canadienne qui n’est pas unique

Le Canada est loin d’être le seul pays à appliquer ce traitement-choc à des réfugiés qui se présentent à la frontière par exemple sans documents permettant de vérifier leur identité de manière fiable.

Le HCR déplore que la détention soit devenue la règle plutôt que l’exception pour répondre à l’entrée irrégulière des demandeurs d’asile dans de nombreux pays.

Le Haut-Commissariat aux réfugiés a d’ailleurs cru bon de lancer récemment une stratégie mondiale intitulée « Au-delà de la détention » et le Canada est l’un des 12 premiers pays à qui le HCR a demandé spécifiquement d’éviter le recours à la détention.

Plusieurs experts canadiens estiment également cette politique de détention obligatoire est une réaction irrationnelle, inefficace, coûteuse et peu canadienne.
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RCI avec la contribution d’Estelle Côté-Sroka et Brigitte Bureau de Radio-Canada

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Catégories : Immigration et Réfugiés, International, Politique
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