Est-ce vraiment possible de vendre des armes à feu tout en assurant la sécurité et la non-prolifération? Dans un contexte mondial de plus en plus fragilisé par toutes sortes de conflits, alors que les drames humains se multiplient à différents endroits de la planète du fait de la possession des armes à feu par des individus irresponsables, de manière parfais légale dans certains contextes et très souvent illégale dans d’autres, il est opportun de s’interroger sur la façon dont les États parviennent à exporter les armes dans le monde tout en assurant un contrôle rigoureux, pour éviter que ces armes se retrouvent au centre d’atrocités et autres controverses.
Nous avons interrogé Christine Cianfarani, la présidente de l’Association des industries canadiennes de défense et de sécurité (AICDS) qui a émis une déclaration au sujet du Traité sur le commerce des armes à feu des Nations Unies.
Dans cette déclaration, madame Cianfarani assure croire en un régime national de contrôle des exportations des armes à feu « rigoureux, transparent et prévisible », ainsi qu’à tous les autres instruments internationaux qui permettent un commerce sécuritaire à l’échelle de la planète. C’est ce qui justifierait le fait pour l’AICDS et ses 1000 membres qu’elle déclare avoir consultés, d’appuyer l’adhésion du Canada au traité sur le commerce des armes des Nations-Unies.
ÉcoutezSelon madame Cianfarani, le Canada devrait adhérer rapidement à ce traité pour non seulement offrir l’opportunité aux entreprises canadiennes de défense et de sécurité d’exporter leurs technologies dans le monde, mais aussi pour leur permettre de « contribuer positivement à renforcer la sécurité mondiale et la non-prolifération ».

D’où viennent les armes à feu vendues illégalement?
L’on pourrait comprendre que madame Cianfarani soutienne ainsi l’adhésion du Canada au Traité sur le commerce des armes à feu des Nations Unies : près de 1000 entreprises nationales sont impliquées dans ce commerce qui génère près de 12,6 milliards de dollars chaque année, dont la moitié provient de l’exportation. À cela, il faut ajouter des milliers d’emplois pour les Canadiens.
l’on serait tout de même tenté de se demander si sa confiance absolue au régime national et aux autres instruments internationaux de contrôle des exportations des armes à feu prend en compte le contrôle aussi bien sur le marché légal que sur le marché illicite.

En effet, le commerce illicite des armes à feu issues très souvent du vol, de la contrebande et de la fabrication illégale et légale, permet d’alimenter les criminels et autres jeunes délinquants partout dans le monde, ce qui représente une menace constante à la paix et à la sécurité.
Plusieurs recherches ont permis de relever que des armes à feu importées légalement sur le marché autorisé, peuvent avoir été exportées illégalement, tout comme des armes à feu importées illégalement peuvent avoir été fabriquées et exportées légalement. De même, des armes à feu acquises illégalement dans un coin du monde peuvent être vendues légalement dans un autre, etc.

Nécessité de contrôler aussi bien le marché légal qu’illégal
Des chercheurs ont aussi démontré que certains règlements nationaux peuvent encourager la prolifération dans la mesure où lorsque des pays, très souvent du sud, se retrouvent avec des armes interdites qu’ils ne peuvent détruire faute de technologies, il peut en résulter un surplus susceptible d’alimenter aussi bien le marché autorisé que non autorisé, ce qui crée une certaine cacophonie.
Un tel enchevêtrement ne permet que difficilement de contrôler le commerce et d’éviter la prolifération tant sur le plan national qu’international.

Le groupe d’experts des Nations Unies qui a travaillé sur la réglementation des armes à feu a déclaré avoir « constaté une augmentation des activités de transfert transnational illicite d’armes à feu conçues à des fins militaires ». Cela représente un danger pour tous les pays du monde, étant donné que ces armes peuvent se retrouver partout et alimenter toutes sortes de conflits et de carnages.
C’est pourquoi il serait important que les États qui adhèrent au traité sur le commerce des armes des Nations Unies, contrôlent aussi bien le marché légal qu’illégal, « restreignent » leurs exportations d’armes au même titre qu’ils ont « restreint » les importations, car comme le démontrent les recherches, les armes à feu qui sont importées de manière illégale viennent forcément de quelque part où elles ont été exportées, souvent avec des complicités insoupçonnées.
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