Il y a deux ans, Corey Fleischer s’est trouvé une mission : effacer les graffitis haineux des murs de la ville de Montréal. Depuis qu’il a commencé à faire ce travail de façon bénévole, plusieurs villes à travers le monde lui demandent d’y faire la même chose. Même si cela donne encore plus de sens à son projet, Fleischer se lamente de constater que les crimes haineux se trouvent sur les murs des bâtiments des quatre coins du monde.
Paloma Martinez, de Radio Canada International, s’est entretenue avec lui et lui a demandé, en premier lieu, quel type de haine il efface le plus souvent.
R- 90 % des graffitis que j’ai effacés jusqu’à maintenant à Montréal étaient antisémites, contre les populations juives; 5 % des graffitis sont homophobes; 2,5 %, islamophobes; et 2,5 %, ce sont de graffitis haineux tout court, adressés de façon négative à des cultures ou des religions données. C’est ce que nous trouvons à Montréal. Mais le problème, c’est que Montréal n’est pas l’exception. Je crois que ces mêmes chiffres peuvent être extrapolés ailleurs. J’ai des demandes pour organiser des séances d’effacement de graffitis haineux venant de partout dans le monde, et les mêmes pourcentages font surface.
Q – Mais, est-ce que cela fait de Montréal une ville antisémite?
R – Non. Écoutez, j’ai grandi ici et je n’ai jamais été confronté à un sentiment généralisé antisémite à Montréal. Je n’ai jamais été une victime de cela à l’école ou ailleurs. Je ne l’avais pas vraiment remarqué avant d’entrer dans le monde du nettoyage des graffitis. Ça ne veut pas dire que cette ville est une ville antisémite, mais c’est plutôt que rien n’avait jamais été fait pour effacer les crimes haineux de nos murs. Depuis la première utilisation de la peinture en spray et jusqu’à il y a un an ou deux, à Montréal on n’a jamais nettoyé ces graffitis haineux. La municipalité ne les nettoie pas, les gens qui les voient ne les rapportent pas… et jusqu’au moment que nous avons implanté ce système de nettoyage des crimes haineux, les gens les ignoraient tout simplement.

Gracieuseté de Corey Fleischer
Q- On parle beaucoup d’islamophobie. Les musulmans du Canada en font l’expérience de toutes sortes de manières. Vous ne voyez pas l’islamophobie sur les murs?
J’ai effacé autour de mille graffitis haineux pendant les deux dernières années et depuis, je n’ai effacé que 5 à 10 graffitis islamophobes. Mais les graffitis ne sont pas la seule façon d’exprimer de la haine. Les graffitis haineux ne sont qu’une façon et en ce qui concerne l’islamophobie je ne la vois pas sur les murs, mais c’est partout. On la voit dans les médias et on a vu ce qui est arrivé à la grande mosquée de Québec. Donc, c’est là.
Q- Plusieurs personnes vous ont déjà traité de héros. Comment vous sentez-vous lorsque cela vous arrive?
C’est le travail de ma vie, c’est ce que j’ai choisi de faire parce que bien. Mais, ce n’est pas parce que c’est bien, ce que je fais, que je suis un héros. C’est flatteur, et j’apprécie quand les gens me le disent, mais entre vous et moi, quand je pense à un héros, je pense à une personne qui a mené un combat jusqu’au bout!

Gracieuseté de Corey Fleischer
En 2015, Corey Fleischer a reçu la médaille de la paix, décernée par le YMCA Québec pour son travail. Il a vécu ce moment comme « l’un des moments les plus heureux de sa vie »
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