Plusieurs entreprises canadiennes du secteur du bois d’œuvre auront à payer des droits compensateurs pouvant aller jusqu’à 24 %, selon l’annonce préliminaire du département du Commerce des États-Unis. Une annonce qui crée une certaine agitation au sein de l’industrie canadienne qui redoute les effets dévastateurs d’une telle mesure, malgré le fait que les économistes tendent à minimiser son impact à l’échelle nationale.
Certaines régions plus touchées que d’autres
Les effets de la décision du département du Commerce américain d’imposer des droits compensatoires rétroactifs de 3 à 24 % sur le bois d’œuvre exporté par le Canada seront variables d’une entreprise à une autre, selon qu’elle se trouve à l’ouest ou à l’est du Canada.
Parmi les provinces qui seront les plus durement frappées, la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick où les compagnies forestières paieront de 24 à 25 % de droits compensatoires, mais aussi le Québec où certaines entreprises auront à payer jusqu’à 12 %.
Trois provinces seulement seront exemptées pour le moment de ces droits : Terre-Neuve-et-Labrador, la Nouvelle-Écosse et l’Île-du-Prince-Édouard.

Droits compensateurs : une « attaque frontale » pour certaines provinces, des impacts peu importants sur l’économie globale, selon les économistes
Selon les analystes, les pertes pour l’ensemble des compagnies forestières à l’échelle du pays seront assez importantes.
La contribution totale du bois d’œuvre à l’économie du Canada se situait autour de 2,7 % en 2004 (81,1 % des exportations étaient destinées au marché américain). En 2009, cette proportion est tombée à environ 1,2 % (la proportion est passée à 58,7 % en 2010).
En 2015, 75 % des exportations canadiennes de bois d’œuvre sont destinés aux États-Unis, pour une contribution de près de 4 milliards de dollars à l’économie nationale. Un chiffre en progression, bien qu’en dessous des 81,1 % enregistrés en 2004.
Se basant sur cette observation, les économistes tendent à minimiser l’impact de la décision du département du Commerce américain sur l’économie nationale dans son ensemble.
Parallèlement, ils affichent une certaine inquiétude quant à l’impact spécifiquement sur le secteur forestier national qui risque de connaître une baisse des exportations ainsi que des pertes massives d’emploi.
Sur un plan plus général, les analystes redoutent l’impact du protectionnisme américain sur l’ensemble de l’économie canadienne, et ils estiment que l’annonce du département du Commerce américain représente un mauvais présage pour la renégociation de l’ALENA.

Au Québec, nous nous sommes entretenus avec Alexandre Cusson, maire de Drummondville et premier vice-président de l’Union des municipalités du Québec.
M. Cusson voit en la décision du département du Commerce américain une attaque frontale contre les régions du Québec.
L’impact financier d’une telle décision pourrait dépasser les 200 millions de dollars pour l’industrie québécoise et les 220 municipalités de la province dont l’économie est directement reliée au secteur forestier. Ce sont également des milliers d’emplois qui sont directement menacés.
ÉcoutezLe premier ministre de la province, Philippe Couillard, s’est engagé à mettre en place un programme de garantie de prêts de 300 millions de dollars pour soutenir l’Industrie, ce qui est bien accueilli par l’Union des municipalités du Québec. Alexandre Cusson a également salué certaines mesures à court terme du gouvernement fédéral pour soutenir l’ensemble des régions forestières du Canada, mais il a dit espérer un engagement formel de la part d’Ottawa à reconnaître l’importance de l’économie forestière pour les communautés de partout au pays qui en dépendent.

Pas d’argent supplémentaire sur la table à Ottawa pour les industries forestières
À Ottawa, où les industries du pays attendent un geste fort, le ministre des Ressources naturelles du Canada Jim Carr, dans un point de presse, s’est contenté de rappeler l’existence de fonds d’innovation annoncés dans le dernier budget fédéral, tout en dénonçant des droits injustes et punitifs à l’égard des industries canadiennes.
Il a par ailleurs retracé l’historique des cinq crises sur le bois d’œuvre avec les États-Unis, avant d’annoncer l’intention du Canada de défendre vigoureusement les entreprises canadiennes, de porter plainte devant les instances internationales et d’avoir gain de cause comme par le passé, contre les États-Unis.
Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, et les premiers ministres des autres provinces vont se concerter sur les réponses possibles à cette crise. Les industries espèrent des mesures concrètes, un plan soutenu d’Ottawa pour leur permettre de survivre en face d’une crise dont les conséquences s’annoncent désastreuses pour la plupart d’entre elles.
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