Le drame des Rohingyas continue de rebondir à la Une des médias de la planète de manière sporadique depuis quelques mois.

Le drame des Rohingyas continue de rebondir à la Une des médias de la planète de manière sporadique depuis quelques mois.
Photo Credit: Danish Siddiqui/Reuters

Justin Trudeau et le nettoyage ethnique des Rohingyas

Il y a une semaine, le premier ministre canadien, Justin Trudeau, affirmait devant des représentants des médias au Canada qu’Aung San Suu Kyi devait absolument sortir de son mutisme et prendre position afin de condamner publiquement les atrocités commises au Myanmar contre la minorité musulmane des Rohingyas.

Photo : Reuters
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Sans cette prise de position, disait le premier ministre canadien, la réputation de la dirigeante birmane et tous ses discours du passé à titre de championne des droits de la personne ne voudraient tout simplement plus rien dire. Plusieurs voix s’élevaient au même instant au Canada pour que le gouvernement retire à Mme Suu Kyi sa citoyenneté honoraire.

La semaine précédente, M. Trudeau avait eu un entretien téléphonique avec Aung San Suu Kyi qui avait été faite citoyenne honoraire du Canada en 2007 lorsqu’elle était toujours assignée à résidence surveillée à Rangoon. Le premier ministre lui avait alors signifié que les Canadiens étaient surpris, déçus et complètement renversés par son silence persistant face à l’oppression militaire brutale des Rohingyas dans son pays.

M. Trudeau lui précisait au téléphone que le Canada et le monde attendaient de Mme Suu Kyi et de son gouvernement qu’ils « protègent des vies innocentes ». Il demandait notamment que les responsables des violences soient arrêtés et traduits en justice à la suite d’enquêtes indépendantes et impartiales.

Aung San Suu Kyi, critiquée non seulement par le Canada, mais par plusieurs autres dirigeants notamment européens pour son inaction, semble vouloir corriger le tir si l’on en juge un discours de 30 minutes livré à sa nation la semaine dernière.

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Images d’un drône qui montrent l’étendue des camps Rohingya au Bangladesh – CBC

 Justin Trudeau avait évoqué le problème des droits de la personne au Myanmar avec Aung San Suu Kyi lors de sa visite au Canada le 7 juin dernier. Photo Credit: LARS HAGBERG/AFP/Getty Images


Justin Trudeau avait évoqué le problème des droits de la personne au Myanmar avec Aung San Suu Kyi lors de sa visite au Canada le 7 juin dernier. Photo Credit: LARS HAGBERG/AFP/Getty Images

Des Rohingyas sont détenus par des garde-frontières du Bangladesh dans une aire ouverte, le 3 septembre. Depuis octobre 2016, au moins 400 000 d’entre eux ont traversé la rivière Naf pour se réfugier au Bangladesh. Photo : Reuters / Mohammad Ponir Hossain

Des Rohingyas sont détenus par des garde-frontières du Bangladesh dans une aire ouverte, le 3 septembre. Depuis octobre 2016, au moins 400 000 d’entre eux ont traversé la rivière Naf pour se réfugier au Bangladesh. Photo : Reuters / Mohammad Ponir Hossain

Des pressions qui font effet?

Vingt-quatre heures après sa conversation téléphonique avec Justin Trudeau, dans un discours très attendu sur la persécution et l’exode de la minorité rohingya dans son pays, la dirigeante du Myanmar a fini par condamner « toutes les violations des droits de l’homme » et a promis que les auteurs d’exactions seraient traduits en justice.

Dans son allocution, Aung San Suu Kyi a dit vouloir établir les causes de l’exode des Rohingyas tout en promettant que des mesures seraient prises contre « tous ceux qui ont violé la loi ».

Dans l’espoir d’une solution durable à ce conflit, Aung San Suu Kyi est en outre prête à entamer un processus de vérification de l’identité des personnes qui ont trouvé refuge au Bangladesh pour organiser le retour de celles qui souhaitent rentrer en Birmanie.

Les Rohingyas, auxquels le gouvernement birman nie toute citoyenneté, disent avoir été contraints de fuir l’État d’Arakan, où ils vivent depuis plus de 200 ans, sous la pression de l’armée qui brûle les villages derrière eux pour éviter qu’ils ne retournent chez eux, selon des témoignages recueillis à la frontière du Bangladesh.

Aung San Suu Kyi lors de son discours télévisé à la nation birmane, le 19 septembre 2017. Photo. AP

Aung San Suu Kyi lors de son discours télévisé à la nation birmane, le 19 septembre 2017. Photo. AP

Des tensions ethniques historiques

© (Danish Siddiqui / Reuters)

L’origine d’une minorité musulmane Rohingya en Birmanie, un pays à majorité bouddhiste, est ancienne.

Les premiers Rohingyas seraient les descendants lointains de commerçants bengalis. Ils se seraient convertis à l’Islam au 15e siècle par l’intermédiaire des Routes de la soie. À l’époque, la région était un État vassal du Bengale.

De 1824 à 1826, lors de la première guerre entre l’Empire britannique et la Birmanie, les Rohingyas ont servi dans l’armée britannique et ils ont été considérés comme des traîtres par les indépendantistes birmans.

En 1948, lorsque la Birmanie retrouvait son indépendance,les Rohingyas avaient été rejetés et persécutés.

En 1978, la Birmanie a effectué environ 200 000 expulsions vers le Bangladesh. Puis, après le refus du Bangladesh de les recueillir, plusieurs milliers sont morts de faim.

En 1982, les Rohingya ont été privés de la nationalité birmane et sont devenus apatrides. Ils ont été exclus des 135 ethnies officiellement reconnues par l’État birman. Ces 135 ethnies correspondent aux minorités présentes en Birmanie avant 1824, c’est-à-dire avant l’arrivée des colons britanniques dans la région. Étant considérés comme un peuple importé par les Britanniques, les Rohingyas ne sont pas vus comme Birmans.

Un groupe de réfugiés Rohingyas fuient la Birmanie. Photo : Reuters / Mohammad Ponir Hossain
Un groupe de réfugiés Rohingyas fuient la Birmanie. Photo : Reuters / Mohammad Ponir Hossain

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Photo Credit: http://www.un.org/f

Photo Credit: http://www.un.org/f

RCI avec La Presse canadienne et la contribution de Michel C. Auger, Yvan Côté, Jean-Sébastien Bernathez, Sophie Langlois, Catherine Perrin et Anyck Béraud de Radio-Canada

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Catégories : Immigration et Réfugiés, International
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