Produits laitiers canadiens Photo Credit: Radio-Canada

ALENA : Ottawa doit maintenir l’exception qui préserve la gestion de l’offre

Alors que les négociations en vue de la conclusion d’un nouvel Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) sont à leur point culminant et que les parties envisagent un dénouement imminent, après plusieurs mois de tiraillement, les Producteurs laitiers du Québec s’inquiètent pour l’avenir des fermes et des travailleurs. C’est pourquoi ils invitent Ottawa à demeurer ferme jusqu’au bout du processus.

Les producteurs laitiers estiment que le Canada ne devrait pas continuer de concéder des marchés au détriment des intérêts des fermes et des familles canadiennes.

L’industrie laitière est l’un des deux principaux secteurs agricoles dans 7 des 10 provinces canadiennes. Selon une étude menée par ÉcoRessources en 2015, à l’échelle du pays, le secteur laitier assure le maintien d’environ 221 000 emplois équivalents temps plein et contribue à hauteur d’environ 19,9 milliards de dollars par année au produit intérieur brut (PIB) du Canada. L’industrie verse aussi annuellement 3,8 milliards de dollars en recettes fiscales aux niveaux fédéral, provincial et régional.

La fermeté devrait ainsi être de mise jusqu’à la fin de la renégociation de l’ALENA, croit le président des Producteurs de lait du Québec, Bruno Letendre.

À l’assemblée annuelle de l’organisme, les participants ont souligné à l’unanimité la nécessité pour le gouvernement fédéral de maintenir l’exception qui préserve la gestion de l’offre dans l’accord.

La gestion de l'offre, c'est quoi?
Le système de gestion de l’offre alloue des quotas aux producteurs de lait, d’oeufs et de volailles, ce qui leur assure un certain revenu, sans subvention gouvernementale. Ottawa s’engage par ce système à limiter l’entrée de produits importés pour que la demande soit comblée par la production canadienne. Ce mécanisme a été mis en place dans les années 1970.
À ce jour, le Canada rejette fermement la demande américaine d’abolir notre politique agricole. Leur propre politique agricole, le Farm Bill de 1000 milliards de dollars, qui subventionne directement ou indirectement leurs agriculteurs, n’est pas sur la table de négociations. Rien ne justifie que la nôtre le soit! Le Canada doit refuser d’accorder tout accès supplémentaire à notre marché dans l’ALENA, mais aussi dans les traités à venir, à commencer par celui avec les pays du Mercosur! Bruno Letendre, président des Producteurs de lait du Québec,

Les drapeaux des trois pays signataires de l’ALENA
Photo Credit: IS / iStock

Des « demandes injustifiées » qui exaspèrent les producteurs 

Les producteurs laitiers de l’État du Wisconsin demandent depuis plusieurs mois un libre accès au marché canadien pour résorber des pertes de ventes de 150 millions de dollars américains. En réponse, dans un discours prononcé dans cet État il y a un an, le président des États-Unis, Donald Trump, avait promis à ces producteurs de revoir les accords commerciaux avec le Canada. Des accords qu’il avait qualifiés d’« injustes » avant de souhaiter un « commerce équitable » avec tous les partenaires.

Du bétail emmené près du parlement canadien par des agriculteurs lors d’une marche de protestation contre les concessions il y a quelques années. Photo : PC/Sean Kilpatrick

Dans la foulée, Washington avait souhaité l’abolition de la gestion de l’offre.

Un souhait qui avait essuyé moult critiques du côté canadien, où les producteurs laitiers avaient estimé que la demande était « totalement injustifiée », surtout dans un contexte où les États-Unis semblent bien s’en tirer sur le plan commercial avec le Canada, son partenaire privilégié.

En effet, 200 000 tonnes de produits laitiers américains sont vendues annuellement sur le marché canadien, ce qui place Washington au premier rang des exportateurs de ces produits dans le pays.

En raison de cet avantage des États-Unis, de nouvelles concessions apparaissent tout aussi injustifiées, souligne le président des Producteurs qui rejoint en cela les observations faites par l’ambassadeur du Canada aux États-Unis, dans une lettre adressée aux gouverneurs du Wisconsin et de New York, en réponse aux critiques de leurs producteurs laitiers.

L’industrie laitière canadienne est moins protectionniste que celle des États-Unis, qui met des barrières techniques afin d’exclure les produits laitiers canadiens de son marché. Le Canada importe 6,3 % de ses fromages et 10 % de son beurre, tandis que les États-Unis importent 3 % de ses fromages et 3 % de son beurre.David MacNaughton, ambassadeur du Canada aux États-Unis

M. Letendre estime que le Canada paie déjà très lourdement les frais de l’Accord du Partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP).

C’est pourquoi de nouvelles concessions dans le cadre de l’ALENA devraient être assorties d’une condition : celle de voir les États-Unis réintégrer le PTPGP, étant donné que les concessions dans le marché laitier canadien avaient été consenties dans ce nouveau partenariat à la demande des Américains.

RCI avec  les Producteurs de lait du Québec et les Producteurs de lait du Canada

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Catégories : Économie
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