Division d'une cellule cancéreuse Photo : iStock

Nouvelle percée scientifique canadienne et internationale dans la lutte contre le cancer par l’immunothérapie

L’immunothérapie en cancérologie continue de dévoiler ses prouesses. Une fois de plus, les travaux de chercheurs canadiens sont soulignés pour leur utilité dans la lutte contre le cancer, maladie considérée comme la première cause de mortalité dans les pays développés.

Une molécule clé dans la régulation du système immunitaire offre de réels espoirs

Cette molécule est connue sous le nom de TIM-3. Elle a été isolée par des scientifiques de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) et de l’Hôpital de Montréal pour enfants du CUSM (HME-CUSM) en partenariat avec une équipe de l’AP-HP (Hôpital Necker-Enfants malade et Saint-Louis), de l’INSERM et une équipe de l’Institut Imagine en France.

Leurs travaux démontrent que la protéine TIM-3 est la prochaine cible pour des traitements par immunothérapie chez des patients atteints de cancer.

Nada Jabado est chercheuse et clinicienne à l’Hôpital de Montréal pour enfants. Elle fait partie de l’équipe de chercheurs.

« Cette étude place la protéine TIM-3 au cœur de la régulation du système immunitaire. Cela renforce son utilisation comme cible dans les immunothérapies afin de déclencher des réponses immunitaires intensifiées chez certains patients atteints de cancer », dit la Dre Nada Jabado.

 

Nada Jabado, Coauteure principale de l’étude et chercheuse au sein du programme en santé de l’enfant et en développement humain à l’IR-CUSM et hémato-oncologue à l’HME-CUSM. Crédit : CUSM

La coauteure de l’étude décrit comment on en est arrivé à cette découverte. Elle annonce des innovations importantes dans le traitement des cancers et possiblement de bien d’autres maladies du système immunitaire. C’est ainsi que les chercheurs tentent à présent de voir si des patients atteints de maladies auto-immunes, comme le lupus, le VIH/Sida, le paludisme ou la sclérose en plaques, n’auraient pas de dysfonctionnement au niveau de TIM-3.

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Tenzin Gayden (chercheur postdoctoral du laboratoire) et la Dre Nada Jabado Crédit : Centre universitaire de santé McGill

Les chercheurs ont montré que lorsque la protéine TIM-3 est supprimée ou inactive, le système immunitaire devient complètement déréglé et les lymphocytes T sont suractivés de façon incontrôlée, ce qui résulte en une forme rare de lymphome (cancer des lymphocytes) : lymphome T sous-cutané de type panniculite (LTSCP).

L’équipe a trouvé deux mutations fondatrices à l’origine de ce syndrome, qui empêchent la protéine TIM-3 de s’exprimer à la surface des lymphocytes, et donc d’attaquer les cellules cancéreuses.

Représentation d'une tumeur cancéreuse.

Représentation d’une tumeur cancéreuse.  Photo : iStock

Ils se sont également aperçus, au fil des recherches, que cette forme de lymphome associée à la suractivation de la réponse immunitaire était un syndrome plus répandu qu’ils ne le pensaient.

Ces résultats amènent les chercheurs à considérer cette forme de lymphome comme une nouvelle maladie génétique.

Pathologie inflammatoire et non maligne?

Selon l’équipe de chercheurs, l’étude, intitulée en anglais : Germline HAVCR2 Mutations altering TIM-3 characterize suboutaneous pannicultis-likeT cell lymphomas with hemophagocytic lymphohistiocytic syndrome, aura permis de « résoudre une énigme médicale » au sujet d’une forme rare de lymphome chez un frère et une sœur montréalais.

Ils ont pu expliquer un syndrome génétique qui est très répandu en Asie du Sud-Est, en Polynésie, en Australie et en Europe.

La technique de séquençage génétique a été utilisée sur les deux enfants. Cela a permis aux chercheurs de découvrir qu’ils sont porteurs de la même mutation sur un gène appelé HAVCR2 qui code pour TIM-3. C’est une maladie génétique qui a été transmise par leurs parents.

La collaboration internationale avec des chercheurs français et australiens permet de comparer les données de 17 patients adultes et enfants présentant des cas similaires, avec la même mutation (Tyr82Cys) chez des descendants asiatiques ou polynésiens. Une autre mutation (Ile97Met) sur le même gène est vue chez des patients d’origine européenne.

L’énigme est résolue du fait que ces cas précis de lymphomes ne seront plus traités uniquement comme des cancers, mais en tenant davantage compte qu’ils peuvent être des réponses intensifiées du système immunitaire des patients.

« Pour ces patients atteints de cette forme rare de lymphome, nos résultats renforcent l’utilisation de traitements immunosuppresseurs qui vont donner de bien meilleurs résultats et moins d’effets secondaires que les chimiothérapies cytotoxiques », dit la Dre Nada Jabado, qui est également professeure de pédiatrie et de génétique humaine à l’Université McGill.

Deux autres chercheurs de l’équipe internationale font part de leur satisfaction :

Geneviève de Saint Basile, lauréate du prix Recherche INSERM 2011, responsable de l’équipe Homéostasie. Rôle de la cytotoxité lymphocitaire de l’unité 768. Crédit : CUSM

« Les résultats de cette collaboration démontrent le rôle régulateur de la molécule TIM-3 chez l’homme  et  apportent également des arguments forts pour reconsidérer cette entité comme une pathologie inflammatoire plutôt que maligne et pour favoriser l’emploi d’immunosuppresseurs dans son traitement », explique Dre Geneviève de Saint Basile, du laboratoire Base moléculaire des anomalies de l’homéostasie immunitaire, INSERM, à l’Institut Imagine et du centre d’étude des déficits immunitaires de l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP (coauteure principale de l’étude).

David Michonneau Crédit : CUSM

« La découverte de cette mutation a permis de mettre en lumière un mécanisme jusqu’alors non décrit qui permettait d’expliquer à la fois la présentation clinique et l’évolution très particulière de ces lymphomes sous traitement »,  explique le Dr David Michonneau du service d’hématologie-greffe de l’hôpital Saint-Louis AP-HP (coauteur principal de l’étude).

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