Qu’est-ce qui tue les chevaux sauvages de l’île de Sable ?
C’est la question que se posent des chercheurs canadiens qui effectuent, depuis deux ans, des nécropsies sur la population unique de chevaux sauvages qui peuplent la petite île située dans l’océan Atlantique à 300 kilomètres des côtes canadiennes.
Surnommée le cimetière de l’Atlantique à cause des centaines de naufrages qui s’y sont produits, l’île de Sable est une barre de sable de 42 kilomètres de long surtout connue pour les chevaux sauvages qui serait aujourd’hui au nombre de 500.
La croyance populaire veut que les ancêtres des chevaux de l’île de Sable aient été des survivants d’un naufrage. Cependant, tout semble indiquer que les chevaux actuels sont les descendants de chevaux acadiens transportés dans l’île, au milieu du XVIIIe siècle, en même temps que des bovins, des porcs et des moutons, par un marchand bostonnais qui a tenté en vain d’établir une ferme sur l’île.
Une espèce en difficulté ou en voie de disparition?

Emily Jenkins est vétérinaire et parasitologue et professeure agrégée à l’Université de la Saskatchewan. (Emily Jenkins)
Une équipe de chercheurs, dirigée par Emily Jenkins, professeur agrégé au département de microbiologie vétérinaire de l’Université de la Saskatchewan, s’est rendue à l’île de Sable au cours des deux dernières années pour découvrir ce qui cause la mort d’un nombre anormalement élevé de chevaux.
« Un cheval mort est un mystère à résoudre. Qu’est-ce qu’il y a dedans ? Qu’est-ce qui l’a tué ? C’est un puzzle scientifique » dit Emily Jenkins qui a atterri sur l’île pour la première fois en avril 2017.
Tous les travaux de recherche en cours sur les chevaux de l’île de Sable utilisent des techniques non invasives. Les chevaux et leur habitat sont désormais officiellement protégés par la loi depuis que l’île de Sable a été désignée réserve de PARC NATIONAL en 2011. D’où l’intéret d’effectuer des recherches sur les carcasses et non sur les bêtes vivantes.

Emily Jenkins et une équipe de chercheurs étudient les causes de la mort des chevaux de l’île de Sable. (Emily Jenkins)
Ce que révèlent les carcasses
L’équipe a examiné les carcasses de 30 chevaux morts, soit un peu plus de la moitié des quelque 50 chevaux qui seraient morts durant le seul hiver précédent.
Ces mortalités représentent donc 10% de la population. Un pourcentage qui » n’est pas hors norme » pour la faune, indique M. Jenkins, mais qui est jugé élevé selon les normes de l’île de Sable.
« La dernière fois qu’un scientifique a étudié les chevaux d’un point de vue vétérinaire, c’était dans les années 1970, de sorte que » nous savions très, très peu de choses sur les causes de la mort des chevaux sur l’île « , dit Jenkins.
Depuis 1977, elle est un refuge d’oiseaux migrateurs. On y trouve aussi plus de 500 chevaux sauvages et près de 50 000 phoques gris.
Au fil de son histoire, on y a dénombré près de 350 naufrages. On la surnomme « le cimetière de l’Atlantique».
L’île connaît plus de 125 jours de brouillard par année.

L’île de Sable est une bande étroite de terre de 42 km de long. Cette lamelle de sable courbée dans l’Atlantique est ceinturée de plages battues par les vents. Photo : Radio-Canada / Robert Short
Pas assez de végétation
Il semble que la famine a été l’un des facteurs clés de la mort des animaux, en particulier des jeunes d’un an, qui ont un statut social inférieur et un accès plus difficile aux pâturages de choix.
Ce manque de fourrage se reflète dans les os des chevaux. Jenkins indique que les chevaux en bonne santé ont de la graisse partout – sous leur peau, autour de leurs organes et dans leur moelle osseuse. Lorsque la nourriture manque, la graisse de la moelle est la dernière à s’épuiser.
Certains chevaux morts de l’île de Sable en étaient à leur dernière réserve de graisse, et il ne restait que six pour cent de graisse dans leur moelle.
Problèmes de dentition et de parasites
Ce n’est pas seulement le manque de nourriture qui affecterait la survie des chevaux. Leurs mauvaises dents, usées par les grandes quantités de sable dans leur alimentation, les empêchent de bien mastiquer leur nourriture et de recevoir autant d’éléments nutritifs qu’il serait souhaitable.
Le sable omniprésent sur l’île contribue aussi plus directement à la mort de certains chevaux, car il peut bloquer leurs boyaux intestinaux
Les chercheurs ont aussi découvert une bactérie qui cause les gourmes, un virus qui cause les maladies infectieuses respiratoires et l’avortement. On a aussi détecté dans les cadavres la présence d’un ver parasite pulmonaire – une surprise, dit Jenkins, puisque le ver pulmonaire est habituellement associé aux ânes.

La grande quantité de sable dans l’alimentation des chevaux de l’île de Sable peut contribuer à la mauvaise dentition et au blocage intestinal. (Sarah Medill)
RCI avec les informations de Frances Willick de CBC News et la contribution de Radio-Canada et de l’Encyclopédie canadienne.
En complément
What is killing Sable Island’s horses? – CBC
Qu’est-ce qui tue les chevaux sauvages de l’île de Sable? – Radio-Canada
Parcs Canada invite le public à donner son avis sur l’île de Sable – Radio-Canada
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