Avec ses deux enfants de moins de 2 ans, la famille Berney-Edwards, dans le sud-est de l’Angleterre, est l’image de la réussite d’un couple de gais qui pensaient ne jamais avoir d’enfant et qui, grâce à une mère porteuse canadienne, ont réussi l’exploit de devenir pères de jumeaux.
Ils se sont d’abord tournés vers une clinique de Las Vegas où est pratiquée la fécondation in vitro. C’est là qu’ils ont appris qu’ils pouvaient avoir des jumeaux et être pères biologiques d’un enfant en fécondant un ovule avec le sperme de Simon et un autre ovule avec la semence de Graeme, puis en implantant les embryons ainsi produits dans une seule et même mère porteuse.
Ils ont fini par recourir à une mère porteuse canadienne, en partie parce que les lois de notre pays sur la maternité de substitution sont plus progressistes que celles qui sont en vigueur au Royaume-Uni et aux États-Unis.
Alexandra et Calder, maintenant âgés de 21 mois, sont nés à quelques minutes d’intervalle. Ils ont donc la même mère biologique, mais des pères différents.
Il y a des précédents au Canada
Les Montréalais Ludwig Ciupka et Dominic Tremblay sont les heureux pères de jumeaux d’un peu plus de 2 ans, nés de gestation pour autrui (GPA).
Ils disent pour leur part avoir eu recours à une mère porteuse aux États-Unis pour éviter des soucis juridiques au Québec, où ce genre d’entente serait mal encadré, selon eux.
Au Québec comme dans le reste du Canada, la femme obtient automatiquement un droit parental sur l’enfant qu’elle porte, ce qui peut compliquer la transaction.
Des lois désuètes des deux côtés de l’Atlantique?
Andrew Spearman, un avocat britannique spécialisé dans la fertilité et la maternité de substitution, affirme que les lois britanniques sont « archaïques » et que bon nombre de ses clients, à l’instar du couple Berney-Edwards, se tournent vers le Canada pour la maternité de substitution.
« Je pense que ça donne un élément de certitude. Cela donne la transparence, ce que nous ne pouvons pas toujours offrir, et cela donne une structure très claire », a-t-il déclaré à son bureau de Londres.
M. Spearman soutient que même si les mères porteuses et les futurs parents au Royaume-Uni rédigent des contrats décrivant les grandes lignes de leur entente, ces contrats ne sont pas juridiquement contraignants comme ils le sont au Canada.
Les limites de la loi canadienne sur les mères porteuses
Elle légalise la maternité de substitution, à condition que la mère porteuse soit âgée d’au moins 21 ans et qu’elle ne soit pas rémunérée par les parents d’intention. Elle interdit de payer les mères porteuses autrement que pour les remboursements de certains frais médicaux et de maternité. Il n’y a cependant pas de balises juridiques claires pour les ententes entre les parents et les mères porteuses.
Contrairement à l’Ontario, le Québec ne reconnaît pas le contrat entre la mère porteuse et les parents biologiques. Un flou persiste dans la loi québécoise. Il y a un vide juridique qui fait que, pour l’instant, ce sont les tribunaux qui vont statuer sur la filiation des enfants au Québec, notamment parce qu’il n’y a pas de lois qui permettent la reconnaissance de ces ententes-là.
Depuis 2014, au Québec, la Cour d’appel a été très claire. Pour reconnaître la filiation du deuxième parent, habituellement la mère intentionnelle, il faut passer par une procédure d’adoption, ce qui est long et coûteux.
À écouter : Isabel Côté est professeure au Département de travail social de l’Université du Québec en Outaouais. Elle est coauteure d’un ouvrage récent qui présente le point de vue des gens qui sont directement impliqués dans le processus, de part et d’autre dans le monde.
Le gouvernement fédéral serait en train de réexaminer la loi, notamment en tentant de déterminer avec plus de clarté les motifs de remboursement. Un député libéral a déposé, l’an dernier, un projet de loi d’initiative parlementaire qui aurait décriminalisé les paiements aux mères porteuses, mais des opposants ont dénoncé le projet qui équivaudrait, selon eux, à commercialiser le corps d’une femme.
RCI avec les informations de Kayla Hounsell et la contribution de Claude Bernatchez, Jhade Monpetit, Catherine Perrin, Arnaud Decroix, et Nicolas Vignault de Radio-Canada
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