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8 $ pour un seul pain ou 27 $ pour du jus d’orange : au Nunavut, ce n’est pas un poisson d’avril

Depuis le 1er janvier dernier, dans le Grand Nord canadien, l’achat de produits comme les couches pour bébé et les produits alimentaires de base (pâtes, haricots secs, etc.) sont subventionnés dans le cadre du programme Nutrition Nord Canada, après que le gouvernement fédéral eut admis l’échec de certains de ses efforts pour réduire l’insécurité alimentaire.

Parmi les produits qui bénéficient de nouvelles subventions se trouvent aussi les fruits et légumes surgelés, le lait, les préparations pour nourrissons, les aliments pour bébés ou encore la farine, l’huile et le beurre.

« Les résidents du Nord et les Autochtones ont clairement fait savoir que Nutrition Nord Canada ne fonctionnait pas et nous les avons écoutés» , indiquait, en décembre dernier, Dominic LeBlanc, ministre des Affaires intergouvernementales et du Nord.

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Des subventions aux détaillants qui n’auraient pas profité aux consommateurs

Depuis 2011, le gouvernement a accordé des subventions aux détaillants afin de réduire les prix d’une liste de produits tels que la viande, le lait, le pain, les fruits et légumes et même le carton de jus d’orange.

Les citoyens du Nunavut, notamment, ont toutefois demandé au gouvernement de revoir le modèle en entier, estimant qu’il y avait un manque de transparence sur l’effet des subventions.

Une somme supplémentaire de 62,6 millions de dollars sur cinq ans est donc maintenant investie à compter de cette année, somme qui s’ajoute aux 100 millions par année qui sont versés de façon continue dans le programme Nutrition Nord Canada. Il a été conçu pour rendre les aliments nutritifs plus abordables dans 117 des collectivités les plus éloignées du nord du pays.

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Quand les aliments frais et de base sont hors de prix

18 $ pour une boîte de céréales

Malgré les subventions, les données de Statistique Canada indiquent que l’insécurité alimentaire dans le Nord a augmenté depuis la création du programme.

Les prix des produits alimentaires sont généralement de deux à trois fois plus élevés que dans le sud du pays, ce qui entraîne une insécurité alimentaire.

D’après une étude publiée en mai dernier par des chercheurs de l’Université Trent et de l’Université de Guelph en Ontario, environ 60 % des familles sur la côte nord du Labrador auraient de la difficulté à se procurer de la nourriture ou auraient peur d’en manquer.

8 $ pour deux litres de lait

Jo Ellen Pameolik, mère de quatre enfants à Iqaluit, dit qu’elle a du mal à subvenir aux besoins alimentaires de sa famille.

« Je gagne plus de 100 000 $ par année et je suis agent financier, mais ce n’est même pas assez, dit M. Pameolik au sujet du coût des produits alimentaires. Parfois, je me demande comment je vais passer le reste de la semaine. »

Au Nunavut, le nombre d’enfants vivant dans l’insécurité alimentaire – un manque d’accès à une alimentation saine et abordable – est passé de 50 % en 2011 à plus de 70 % en 2015-2016, selon les derniers chiffres disponibles.

« Ça fait mal de savoir qu’un enfant de l’âge de ma fille, qui n’a que 5 ans, a vraiment faim. On n’a pas l’impression de faire partie du Canada », dit Jo Ellen Pameolik.


Jo Ellen Pameolik, mère de quatre enfants à Iqaluit, dit qu’elle a du mal à subvenir aux besoins alimentaires de sa famille. (Katie Pedersen/CBC)

Éviter de s’approvisionner au magasin local

De nos jours, de nombreuses familles se donnent beaucoup de mal pour éviter de payer les prix alimentaires du Nord.

Sheila Lumsden, 51 ans, prend des vols fréquents pour Ottawa. Elle voyage avec de grands bacs en plastique qu’elle remplit de provisions.

Elle dit que ses amis et sa famille à Ottawa empaquettent le plus d’épicerie possible dans leurs bagages lorsqu’ils viennent lui rendre visite à Iqaluit. Une amie a déjà mis un sac de farine sous sa chemise en montant à bord d’un avion pour éviter de payer des frais supplémentaires pour ses bagages. Lumsden l’appelait en plaisantant un « bébé farine ».

En 2014, au Nunavut, près des deux tiers des moins de 18 ans vivaient dans des ménages en situation d’insécurité alimentaire, a renchéri Valerie Tarasuk, professeure en sciences nutritionnelles à l’Université de Toronto, qui étudie les problèmes alimentaires liés à la pauvreté. « C’est énorme. Cette situation devrait être considérée comme une crise nationale. »

Graphique : Radio-Canada

RCI avec les informations de Marie-Laure Josselin de Radio-Canada et la contribution de Katie Pedersen, Greg Sadler et David Common de CBC News

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