Déboutée par le Tribunal arbitral du sport, Caster Semenya reçoit des messages d'appui, y compris du Canada. REUTERS/Denis Balibouse - UP1ED8O1H86R8

Caster Semenya n’est pas seule au monde… Elle a des appuis au Canada

Le Canada a joint sa voix à celles qui dénoncent la décision du Tribunal arbitral du sport (TAS) de rejeter le recours de la Sud-Africaine Caster Semenya contre le règlement sur l’hyperandrogénie.

Mercredi, le TAS a débouté la double championne olympique du 800 m, qui contestait les règles de la Fédération internationale d’athlétisme (IAAF) qui obligent les athlètes hyperandrogènes, comme elle, à faire baisser leur taux de testostérone sous le seuil de 5 nmol/l.

L’IAAF estime que les femmes ayant un fort taux de testostérone jouissent d’un avantage injuste et souhaitaient qu’elles contrôlent médicalement leur testostérone pendant au moins six mois avant la compétition.

Cet avis n’est pas partagé par le TAS. Il soutient plutôt qu’il n’y a pas suffisamment de preuves scientifiques pour démontrer que la Sud-Africaine est avantagée dans cette épreuve par rapport à ses adversaires, en raison de son niveau de testostérone naturellement plus élevé que la normale.

Le président de l’IAAF Sebastian Coe n’entend pas se soumettre aux recommandations du Tribunal arbitral du sport. REUTERS/Éric Gaillard

Discriminatoire

Le TAS juge également « discriminatoire » les dispositions sur les différences de développement sexuel et a demandé la Fédération internationale d’athlétisme de modifier plusieurs points de son règlement. Il lui a aussi demandé de retarder l’application de ces dispositions controversées.

Cette requête du TAS a aussitôt été rejetée par le président de l’IAAF Sebastian Coe. La Fédération donne jusqu’au 8 mai aux athlètes concernées pour faire baisser leur taux de testostérone avec un traitement si elles veulent participer aux compétitions internationales du 400 m au mile (1609 m) aux Championnats du monde, à Doha, au Qatar (27 septembre-6 octobre).

« Je suis très déçue de cette décision. » Kirsty Duncan, ministre des Sciences et du Sport du Canada

La ministre canadienne des Sciences et du Sport, Kirsty Duncan, fait partie des nombreuses personnes déçues par la décision du TAS. Une décision qui, selon elle, « témoigne d’un mépris total pour la dignité humaine ». « Je ne pense pas qu’un organisme sportif doive décider de qui est une femme ou de ce qui fait une femme. Je ne pense pas qu’une organisation sportive devrait demander à un athlète de modifier la chimie de son corps. »

Kirsty Duncan, la ministre canadienne des Sciences et du Sport, dénonce la décision du TAS contre Caster Semenya. REUTERS/Chris Wattie

Kirsty Duncan trouve aussi anachronique de demander aux athlètes d’une part de ne pas se droguer, et d’autre part de les obliger à modifier la composition chimique de leur corps.

La cycliste transgenre torontoise Kristen Worley a également exprimé sa déception à l’égard de la décision du TAS. Mme Worley avait pour sa part saisi le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario pour modifier les pratiques et les attitudes des organismes cyclistes canadiens et mondiaux à l’égard des femmes avec les chromosomes XY.

Selon elle, l’affaire Semenya met une fois de plus en exergue le pouvoir de l’économie dans le sport au détriment des droits de la personne.

L’impuissance face à l’injustice

L’athlète kényane Margaret Wambui, aussi soumise à un haut taux de testostérone, a qualifié jeudi d’« injuste » la décision du TAS de rejeter le recours de Caster Semenya contre le règlement sur l’hyperandrogénie.

La Kényane Margaret Wambui, hyperandrogyne elle aussi, a exprimé son soutien à Caster Semenya. REUTERS/Lucy Nicholson FOR EDITORIAL USE ONLY.

« C’est une vie dans laquelle nous Africains n’avons rien à dire dans ce monde. Il n’y a rien que nous puissions y faire. Alors, désolé ma chère. C’est si douloureux », a déclaré Wambui dans un message adressé à Semenya.

Par ailleurs, divers observateurs dénoncent le sexisme de l’IAAF qui ausculte le taux de testostérone naturelle des femmes et ne s’en préoccupe pas chez les hommes. Pourquoi ne cherche-t-on pas à connaître le taux de testostérone de tel sprinteur par rapport à tel autre?

Mettre Semenya hors d’état de nuire

Une forte testostérone suffit-elle pour garantir des victoires en athlétisme? Si tel était le cas, il faudrait donc conclure que le Kenya, l’Éthiopie ou encore la Jamaïque, grandes pépinières de sprinteurs et de coureurs de fond bénéficient de doses de testostérone qu’on ne trouve nulle part ailleurs!

Des règlements spéciaux seraient adoptés par l’IAAF dans le seul but d’endiguer la domination de Caster Semenya dans certaines épreuves. REUTERS/Denis Balibouse – UP1ED8O1KPTTW

Pendant qu’on y est, se demandent toujours ces observateurs, pourquoi ne conteste-t-on pas la grandeur, la petite taille, la minceur ou la masse épaisse qui profiteraient à certains athlètes masculins dans telle ou telle discipline?

Leur conclusion, tout cela est discriminatoire envers les femmes en général et envers Caster Semenya en particulier. Athlète dominante depuis son entrée dans le monde de l’athlétisme, elle semble visée par des règlements taillés sur mesure.

(Avec l’AFP et La Presse canadienne)

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