La pandémie de la COVID-19 n'épargnerait aucun groupe d'âge. Crédit : Istock

COVID-19 : «  tous à risque! Prendre la menace au sérieux » – Dr Pelloux

Patrick Pelloux est urgentiste et président de l’Association des médecins hospitaliers de France. Dans une entrevue à Radio-Canada mardi, il appelle les gens à faire preuve d’une extrême prudence avec la pandémie de la COVID-19. Il soutient qu’il ne serait pas exclu que l’administration chinoise ait communiqué de fausses informations sur l’incidence réelle de cette pandémie au sein de sa population.

Voici quelques grandes orientations de la déclaration de M. Pelloux

– Les Chinois auraient menti sur les données concernant le nombre de cas, le nombre de décès et les personnes à risque.
– En raison de la présence de jeunes patients dans les unités de soins intensifs, ce n’est pas tout à fait vrai qu’ils s’en tireraient mieux. Une jeune fille de 15 ans est décédée récemment en France, tuée par la COVID-19.
– Le Canada ne devrait rien laisser de côté et prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger sa population en raison de la menace importante.
– Certains équipements médicaux sont en manque en raison de la trop forte demande américaine.

Les mesures prises au Canada contre la COVID-19

Les mesures imposées par les autorités de santé publique rappellent celles qui ont été prises dans le foyer de l’éclosion de cette pandémie, à Wuhan, en Chine. Ce sont :

  • le dépistage massif,
  • le confinement,
  • la distanciation physique,
  • le respect des règles d’hygiène de base : lavage des mains, désinfection des surfaces communes.

Le Canada aurait-il pu mieux faire dans les circonstances?

Ce protocole chinois est sensiblement le même utilisé à l’échelle mondiale contre cette pandémie qui fait a déjà fait plus de 37 000 morts sur la planète, avec près de 800 000 cas de contamination, et 164 000 personnes rétablies.

Au Canada, on se rapproche de la barre de 7500 cas, avec 92 morts, dont de nombreux aînés. En comparaison à certains pays d’Europe, dont l’Italie, l’Espagne, la France et en Amérique les États-Unis, le Canada pourrait être vu comme un des pays les moins durement frappés.

Malgré tout, le nombre de décès en hausse dans certaines résidences d’aînés et dans certaines communautés inquiète sur la capacité réelle des personnes à respecter les directives de la Santé publique en place.

13 résidents, et une bénévole d’une même résidence pour aînés à Toronto, en Ontario, sont décédés en l’espace de quelques jours, en raison de la contamination à la COVID-19. Durant ces derniers jours à Montréal, au Québec, on a assisté à un scénario quasi similaire dans une résidence pour aînés à LaSalle, où 11 résidents sont contaminés, avec un mort. Ce décès vient s’ajouter aux autres décès et cas de contamination survenus dans d’autres résidences pour aînés (Lavaltrie et Sherbrooke), toujours à Montréal, ce mois de mars.

Le nombre total de décès au Québec comme en Ontario concerne davantage les aînés, ce qui vient en quelque sorte corroborer le constat des autorités chinoises. Le directeur de la Santé publique du Québec, Horacio Arruda, indique que 88 % des personnes décédées au Québec ont plus de 76 ans, 8 % ont 70 ans et plus, 40 % des décès sont survenus dans les résidences pour aînés et 32 % dans les CHSLD.

Selon Radio-Canada, certaines communautés semblent avoir minimisé l’impact de la COVID-19 sur l’île de Montréal, en négligeant les recommandations des autorités de santé et des paliers gouvernementaux, ce qui aurait contribué à l’augmentation du nombre de nouveaux cas, notamment dans les quartiers Côte-des-Neiges et Notre-Dame-de-Grâce, où 161 personnes en sont touchées, sur un total de 1700 cas sur l’ensemble de l’île de Montréal.

Le Dr Karl Weiss, médecin microbiologiste et infectiologue à l’Hôpital juif, qui figure parmi les centres de traitement des personnes contaminées au Québec, a indiqué qu’il y a une tendance à la hausse des cas de patients en soins intensifs. Il attribue cette hausse à plusieurs facteurs :

– la fin de la relâche scolaire matérialisée par le retour au pays de personnes qui ont séjourné dans certaines régions jugées à risque : Floride, Caraïbes, Europe, entre autres;

– le retour au pays de personnes qui étaient en vacances ailleurs dans le monde;

– les rassemblements dans certaines communautés religieuses.

Selon le Dr Weiss, il s’agit de facteurs aggravants, liés aux voyages et aux modes de vie qui augmentent les risques de transmission communautaires par la suite.

Les cas de décès et de contamination sur l’île de Montréal doublés à la surreprésentation des aînés dans le tableau des morts aussi bien au Québec qu’en Ontario sont-ils révélateurs d’une faille dans la mécanique en place au pays pour contrer la menace de la COVID-19?

Aurait-on pu faire les choses différemment et freiner la propagation dans certaines communautés et dans les centres pour aînés si on avait eu de vrais chiffres au sujet de cette pandémie en Chine? Le modèle chinois serait-il viable à tous égards?

Le médecin et urgentiste français Patrick Pelloux soutient qu’il serait difficile de se baser sur les chiffres probablement tronqués de l’administration chinoise pour extrapoler et procéder à des comparaisons fiables avec ce qui se passe en Europe et en Amérique du Nord, avec plus de 3000 morts aux États-Unis et en France, et plus de 11 000 en Italie.

Dans un reportage sur France 24 mardi, une analyste a également remis en cause les chiffres chinois sur le nombre de morts total au pays. Ce nombre dépasserait largement les 3305 morts et 81 518 cas avancés par Pékin, en raison du nombre d’urnes contenant les cendres des victimes décédées, et du nombre de personnes qui attendaient dans une file pour récupérer ces urnes.

Bien que la Chine ait mentionné qu’il y avait quelques patients jeunes parmi les victimes de la COVID-19, et que cette pandémie sévit davantage au sein de la population plus âgée, Patrick Pelloux invite les autorités du Canada à « prendre cette maladie au sérieux », car en réalité elle n’épargne aucun groupe d’âge.

Pour le moment, les mêmes mesures de confinement, de dépistage massif et d’hygiène demeurent, et les autorités canadiennes n’ont de cesse de souligner l’importance de les observer, parce qu’elles sont les seules pour l’instant qui semblent porter leurs fruits. Prendre la menace au sérieux consisterait-il à imaginer des mesures additionnelles?

En attendant d’avoir une réponse à cette interrogation, le manque de matériel hospitalier se pose comme l’un des enjeux de cette pandémie dans bien des hôpitaux en Europe, aux États-Unis et dans certains hôpitaux du Canada, où les masques et les appareils respiratoires sont en quantité insuffisante. Au Québec, le premier ministre Legault a eu à envisager la possibilité de laver et de réutiliser certains masques en raison de la menace de pénurie.

Les modèles chinois et allemand en ce qui a trait à la disponibilité des équipements peuvent aiguiller les autorités sur la façon d’anticiper d’autres crises. Selon les explications du Dr Weiss, ces deux pays se sont démarqués par l’implication de leurs industries dans le processus de fabrication des équipements médicaux stockés pendant plusieurs années dans la perspective d’une crise sanitaire.

Au Canada, le gouvernement fédéral semble avoir saisi ce message avec l’appel lancé par le premier ministre Trudeau aux entreprises du pays à produire des masques, gants, vêtements de protection et autres instruments dont le système de santé a besoin. Depuis, près de 3000 entreprises ont répondu à l’appel.

Avec Radio-Canada, l’OMS, l’AFP et quelques informations de France 24

Catégories : International, Politique, Santé
Mots-clés : , , , , , , ,

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Pour des raisons indépendantes de notre volonté et, pour une période indéterminée, l'espace des commentaires est fermé. Cependant, nos réseaux sociaux restent ouverts à vos contributions.