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Santé mentale des travailleurs de la santé sévèrement malmenée par la pandémie

Selon une analyse menée à l’Université d’Ottawa par le professeur Jude Mary Cénat, le manque de sommeil des travailleurs de la santé résultant d’une surcharge de travail et de soucis les expose à des problèmes à plus long terme.

Jude Mary Cénat (UoO)

Les travaux du Dr Cénat ont porté sur 55 études internationales regroupant quelque 190 000 participants. Ses conclusions sont publiées par le journal médical Psychiatry Research.

« La différence entre la population en général et les travailleurs de la santé, c’est surtout au niveau de l’insomnie, explique-t-il dans une entrevue accordée à La Presse canadienne.

Le professeur Cénat s’était penché dans le passé sur l’impact que pouvait avoir l’épidémie d’Ebola en Afrique équatoriale sur la santé mentale des communautés de cette région.

« Ils sont au front et ils voient la souffrance des gens. Ils peuvent aussi vivre beaucoup d’anxiété du fait qu’ils se demandent s’ils vont être infectés ou s’ils vont infecter leur famille. Quand on se couche et qu’on commence à penser à la situation, le sommeil devient beaucoup plus difficile. »

Les chercheurs de l’Université d’Ottawa rapportent une hausse de 24 % de la prévalence d’insomnie, de 22 % de la prévalence de trouble de stress post-traumatique (TSPT), de 16 % de la prévalence de dépression et de 15 % de la prévalence d’anxiété. « On s’attendait à ce qu’il y ait des impacts, mais pas des impacts aussi élevés », souligne le professeur Cénat.

En effet, si l’on compare aux données d’avant la pandémie habituellement rapportées par l’Organisation mondiale de la santé, au sein des travailleurs de la santé du pays, la dépression était ainsi trois fois plus fréquente, l’anxiété quatre fois plus fréquente et le TSPT cinq fois plus fréquent.

Les plaintes d’insomnie étaient beaucoup plus nombreuses parmi les travailleurs de la santé que dans le reste de la population canadienne, ce qui pourrait laisser présager des lendemains difficiles.

« Peut-être que demain, ils vont présenter plus de troubles de stress post-traumatique, peut-être que demain ils vont présenter plus de dépression ou d’anxiété », conclut le professeur Cénat.

(CBC)

Quelle est la situation dans la population canadienne en général?

Pour de nombreux Canadiens, les difficultés liées aux mesures de distanciation physique, la capacité réduite de travailler ou de contribuer à la société et la pression qu’accompagne la prestation de soins aux membres de la famille en confinement peuvent accroître les sentiments d’anxiété, de solitude et de stress.

L’été dernier, notre agence nationale de la statistique avait demandé aux Canadiens d’évaluer leur santé mentale en indiquant si elle était mauvaise, passable, bonne, très bonne ou excellente. Un peu plus de la moitié de la population canadienne âgée de 15 ans et plus (54 %) avait déclaré avoir une santé mentale excellente ou très bonne pendant la pandémie de COVID-19.

Selon les résultats, les femmes, les jeunes, les personnes souffrant de problèmes de santé physique et celles très ou extrêmement préoccupées par les tensions familiales engendrées par le confinement étaient moins susceptibles de déclarer une santé mentale excellente ou très bonne qu’une santé mentale bonne, passable ou mauvaise.

D’autre part, un récent examen par Statistique Canada des cinq plus importants groupes de population désignés comme minorités visibles au Canada (les Sud-Asiatiques, les Chinois, les Noirs, les Philippins et les Arabes) montrait que les citoyens sud-asiatiques affichaient les pires résultats en matière de santé mentale.

Ils étaient plus susceptibles que les autres minorités visibles de déclarer, d’après leur propre évaluation, avoir une santé mentale « passable » ou « mauvaise » et « un peu moins bonne » ou « bien moins bonne » depuis le début des mesures de distanciation physique.

Les Sud-Asiatiques, à l’exception des participants philippins, se montraient aussi plus enclins à déclarer des symptômes correspondant à un trouble d’anxiété généralisée modéré ou grave dans les deux semaines précédant leur participation à l’enquête de Statistique Canada.

RCI avec La Presse canadienne et Statistique Canada

Catégories : Santé, Société
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