Pamphinette Buisa représente le rugby canadien à l’international ainsi qu’aux Jeux Olympiques. Impliquée dans la lutte contre le racisme depuis la mort tragique de George Floyd aux États-Unis, la joueuse aux origines congolaises a participé à de nombreuses manifestations et actions en Colombie-Britannique. Elle essaye également d’utiliser son influence d’athlète pour donner une voix à ceux mis de côté. Elle a accepté de raconter à Radio Canada International son expérience avec le racisme au Canada :
« La toute première fois, j’étais très jeune, j’étais à la garderie. Et, vous savez, quand on est à la garderie, on est très jeune et on n’a pas vraiment de notion précise de ce que sont la race ou le racisme. On n’est qu’un enfant.
Nous jouions dans la cour de récréation, et je me souviens qu’une fois, nous étions assis et une petite enfant, une petite enfant blanche, m’a dit : « Pourquoi t’es noire ? » Et moi, j’ai répondu : « Je ne sais pas ».
Et puis, tout d’un coup, elle a dit le mot en « N ». Et elle a ajouté : « Ma mère dit ceci », puis elle l’a dit. Je ne savais pas ce que ça voulait dire, mais je savais que ça faisait mal.
En grandissant, je ne comprenais pas nécessairement ce que signifiaient ces mots qui m’avaient été décrits et donnés, mais en voyant comment je me sentais, c’était assez difficile de comprendre, de me faire à l’idée du poids de ces mots.
Ce n’était pas nécessairement quelque chose que je comprenais, mais c’était quelque chose qui avait été utilisé historiquement pour armer, détruire et blesser beaucoup de personnes qui me ressemblent.
Et donc pour moi, une grande partie de ce concept de race est quelque chose dont j’ai toujours été hyper consciente, surtout quand j’étais jeune, me déplaçant dans différentes sphères, surtout si c’était une sphère à prédominance blanche. C’est à cette période que j’ai réalisé que j’étais différente. Un jour, je suis rentré à la maison et j’étais comme « Maman, ce gamin m’a appelé le mot en N ». Mais mes parents n’avaient pas l’air surpris. Ils savaient.
Puis, je me souviens d’avoir eu une conversation [avec mes parents], à l’âge de sept ans il me semble. Je me souviens qu’ils m’ont dit : « Tu vas commencer à le remarquer. Tu vas devoir travailler dur ». Et puis des choses comme : « Tu ne peux pas courir tout le temps parce qu’ils vont te voir plus qu’ils ne verront tes amis courir partout. C’est donc toi qui auras des problèmes, pas tes amis ».
Et c’est ainsi que j’ai réalisé qu’il y avait une sorte de double standard. Encore une fois, je ne savais même pas d’où cela venait, mais c’était maintenant la réalité à laquelle je devais faire face simplement à cause de la couleur de ma peau.
Et, en plus de cela, étant une enfant un peu plus agitée, étant une enfant beaucoup plus énergique, je me suis rendu compte que c’était quelque chose que je devais maintenant affronter et traiter de manière disproportionnée par rapport à mes homologues blancs.
Avec mon privilège [en tant qu’athlète], les possibilités de voyager, de participer à des compétitions internationales offrent davantage de possibilités de partager le message, de communiquer et de responsabiliser les différents acteurs.
C’est important pour moi de mieux comprendre les complexités de ce que signifie représenter le Canada. Je pense que, souvent, je me déplaçais, je travaillais et j’étais aveuglé parce que je ne connaissais pas la diversité de mon pays.
Puis, plus je m’impliquais dans la communauté et observais, surtout à Victoria, à quel point la façon dont nous nous traitons les uns les autres pose des problèmes importants, plus je réalisais ce que cela signifie réellement de représenter le Canada à travers les yeux de quelqu’un qui est citoyen de ce pays mais qui n’a pas d’eau potable, par exemple.
C’est donc quelque chose que j’ai vraiment essayé de promouvoir dans tous les domaines, et pas seulement dans le domaine sportif : « Comment puis-je avoir davantage de discussions où je ne monopolise pas l’espace, mais où je mets en avant et renforce ceux qui sont autour de moi et qui ne sont pas dans cet espace ? »
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