Les juges de la Cour suprême du Canada devront maîtriser les deux langues officiellesCrédit photo : PC/Adrian Wyld

La Cour suprême du Canada semble beaucoup moins partisane et polarisée que son homologue américaine

Cour suprême du Canada : une chambre moins polarisée que celle des USA

Malgré les changements successifs de gouvernements à Ottawa, 60 % des décisions de la Cour suprême sont prises à une majorité d’au moins 7 juges sur 9. Aux États-Unis, la proportion de décisions partagées 5-4 oscille entre 15 et 30 %, selon les époques.

Lorsque les Américains élisent leur président, ils sont aussi très conscients que leur choix va modifier la couleur politique du plus haut tribunal du pays. Ils élisent la personne qui nommera de nouveaux juges à la très polarisée Cour suprême. Un enjeu à peu près absent des élections générales au Canada.

Une analyse récente de tous les arrêts prononcés par la Cour suprême du Canada depuis 16 ans offre des pistes de solution pour expliquer cette différence dans les moeurs politiques. Malgré les changements successifs de gouvernements à Ottawa, 60 % des décisions du plus haut tribunal du pays sont prises à une majorité d’au moins sept juges.

Les juges de la Cour suprême du Canada
Les juges de la Cour suprême du Canada © PC/Blair Gable

Cette étude, menée par le Centre Manning, s’est penchée sur près de 1200 arrêts rendus par la Cour suprême du Canada de janvier 2000, lorsque Beverley McLachlin a été nommée juge en chef, à juin 2016. Les résultats de l’étude semblent accréditer la thèse selon laquelle la Cour suprême canadienne est moins polarisée que l’américaine.

L’esprit partisan est source de blocage aux États-Unis

Depuis la mort du juge conservateur Antonin Scalia, en février, le mécanisme pour lui trouver un remplaçant à la Cour suprême des États-Unis a été miné par l’esprit partisan. Le Sénat, contrôlé par les républicains, a même refusé de convoquer en audience d’approbation le candidat choisi par le président Barack Obama, le juge fédéral Merrick Garland, laissant plutôt les mains libres au futur président, Donald Trump.

En septembre, au coeur de la campagne électorale présidentielle, M. Trump a publié une « liste définitive » de ses candidats potentiels à la Cour suprême, en prenant soin de préciser que « les libertés que nous chérissons, les valeurs et les principes sur lesquels notre pays a été fondé, sont en péril ». Un discours rarement utilisé dans les campagnes électorales canadiennes.

Le juge Antonin Scalia en octobre 2015
La processus de nommination d’un remplaçant du juge Antonin Scalia a donné lieu à une passe d’armes entre démocrates et républicains aux États-Unis © AP/Jim Mone

« Au Canada, les juges ne semblent pas s’identifier à des causes en particulier, soutient Carissima Mathen, professeure de droit constitutionnel à l’Université d’Ottawa. Ils ont plutôt tendance à éviter les étiquettes politiques, contrairement à ce que l’on voit aux États-Unis. »

L’auteure de l’étude du Centre Manning, Portia Proctor, une étudiante de l’Université McGill, a analysé les arrêts, parfois dissidents, des 22 juges qui ont siégé à la Cour suprême ces 16 dernières années. Elle n’a pu, par ailleurs, identifier un magistrat particulièrement anticonformiste ou dissident.

Claire L’Heureux-Dubé, qui a pris sa retraite en 2002, et la nouvelle venue Suzanne Côté, nommée en décembre 2014, ont été les plus dissidentes de tous. Leurs noms apparaissent dans 13 % des jugements dissidents. Le juge Morris Fish, qui a pris sa retraite en 2013, suit avec 12 % de positions dissidentes.

Des groupes de femmes manifestent devant la Cour suprême où des groupes religieux réclament de ne pas financer la contraception avec Obamacare.
La Cour suprême a rendu plus de décisions unanimes que son homologue canadienne © Joshua Roberts / Reuters

Des 1184 causes examinées, seulement 10 % des arrêts de la Cour suprême du Canada ont été rendus par une majorité d’une seule voix. Par contre, environ 83 % des arrêts ont été prononcés par une marge d’au moins cinq juges. Et un peu plus du quart des arrêts ont été rendus à l’unanimité des neuf juges.

Cela dit, paradoxalement, le plus haut tribunal américain, pourtant réputé « polarisé », rend davantage de décisions unanimes que la Cour suprême du Canada. Environ 40 % d’arrêts en cinq ans, selon une étude récente, contre 27,4 % au Canada.

Autres constatations de l’étude du Centre Manning :

  • 35,5 % de toutes les causes examinées par la Cour suprême étaient de nature criminelle, et 26,1 de nature constitutionnelle;
  • La Cour suprême a autorisé un appel dans 39,6 % des requêtes, et l’a rejeté dans 53,7 % des cas;
  • 87,2 % des demandes d’appel provenaient de cours d’appel provinciales, contre 11,8 % de la Cour d’appel fédérale.

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