Construction d'un pipeline en hiver

Construction d'un pipeline en hiver

Étude de faisabilité – Le pétrole des sables bitumineux vers Tuktoyaktuk

Le gouvernement provincial de l’Alberta se penche sur une autre route potentielle pour acheminer via pipeline le pétrole des sables bitumineux du nord de la province vers ses marchés externes. De fait, si les projets de pipelines, Keystone XL vers le Texas ou Northern Gateway vers le nord-ouest de la Colombie-Britannique n’aboutissent pas, l’Alberta porte son regard vers le nord.

La firme de consultants Canatec Associates International Ltée de Calgary a été mandatée par la province pour la réalisation d’une étude de faisabilité d’acheminer par pipeline du pétrole brut extrait des sables bitumineux de la région de Fort McMurray vers un port dans les Territoires du Nord-Ouest. Les analystes estiment à 30 milliards de dollars par année la valeur du pétrole qui reste en Alberta faute d’accès à des marchés internationaux.

Le pipeline proposé Keystone XL vers la côte du Texas sur le Golfe du Mexique est toujours en attente d’une autorisation de construction de la part du Département d’état des États-Unis et du président Obama. De plus, le projet d’inverser le flux du pipeline est-ouest en ouest-est vers l’Ontario et le Québec est très controversé et rencontre une forte opposition, notamment au Québec. Soulignons également que le projet d’Enbridge d’un pipeline vers Kitimat sur la côte du Pacifique en Colombie-Britannique est attaqué de toutes parts tant par les environnementalistes que par des nations amérindiennes qui verraient le pipeline traverser leurs terres.

Tout ceci amène le gouvernement de l’Alberta à envisager une autre avenue, celle d’acheminer le pétrole des sables bitumineux le long de la vallée du fleuve McKenzie jusqu’au port en eaux profondes qui serait construit à Tuktoyaktuk dans les Territoires du Nord-Ouest. De ce point, le pétrole pourrait être chargé à bord de pétroliers qui feraient ensuite route vers les marchés asiatiques et européens.

Selon Nathan Lemphers de l’Institut Pembina « cela démontre à quel point l’accès aux marchés internationaux est primordial. L’industrie pétrolière fait face à une situation comparable à un goulot d’étranglement en matière d’acheminement. Les pétrolières peinent à acheminer leur produit vers les marchés parce que les pipelines sont beaucoup plus difficiles à construire de nos jours que par le passé. »

Reste qu’une route vers le nord pourrait être tout aussi difficile à « vendre au public » que les autres projets (Northern Gateway, Keystone XL, inversion du flux est-ouest en ouest-est en Ontario et au Québec)

Pipeline en construction
Pipeline en construction

Le premier ministre des Territoires du Nord-Ouest, Bob McLeod, dit que le projet vers Tuktoyaktuk l’intéresse. De plus, le gouvernement territorial et le fédéral ont signé un accord de décentralisation en matière de gouvernance énergétique qui pourrait être très avantageux pour Yellowknife.

Doug Matthews, un expert albertain en ressources à l’emploi du gouvernement territorial depuis 25 ans, affirme que le pipeline projeté devrait pouvoir acheminer au moins 500 000 barils de pétrole par jour pour qu’il puisse voir le jour.  Il ajoute « Comme il acheminerait essentiellement du pétrole brut, les environnementalistes monteraient au front, c’est certain. Par contre, la grande majorité des gens du Nord appuieraient le projet, je crois. »

La construction projetée de ce pipeline ne serait qu’une partie de l’équation de l’acheminement du pétrole albertain vers le Nord. Le développement du port en eaux profondes de Tuktoyaktuk n’est pas très avancé, surtout pour les navires pétroliers. Des opérations de dragages de grande envergure doivent être envisagées pour permettre le chargement du pétrole, qu’il s’agisse de chargement en rade ou d’acheminement par gros tuyaux plus loin de la côte.

Tuktoyaktuk
Tuktoyaktuk

Obstacles financiers et techniques

Selon le professeur Robert Page, directeur du Enbridge Centre for Corporate Sustainability à la Haskayne School of Business  de l’Université de Calgary, la construction d’un tel pipeline en zone nordique représente d’énormes défis financiers et techniques. « Transporter du pétrole brut visqueux exige un pipeline chauffé « dit-il. « Et l’ombre thermique générée autour du pipeline fera fondre le pergélisol (permafrost). Il faudra donc surélever le pipeline, ce qui implique un concept particulier et une augmentation substantielle des coûts de construction. De plus, contourner le puissant fleuve McKenzie, et même passer en dessous serait un autre défi gigantesque, ne serait-ce qu’au printemps avec la puissance de la débâcle. »

Le professeur Page ajoute « Techniquement, c’est réalisable. Mais financièrement, ce pétrole, lorsque arrivé sur les marchés mondiaux, est rendu très cher. Ce qui fait que le transport en soi devient un coût ajouté très important en termes de viabilité du projet et de compétitivité du pétrole sur les marchés mondiaux. »

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