Une étape judiciaire historique
La Cour suprême du Canada recueille aujourd’hui pendant toute la journée les opinions de juristes canadiens sur la constitutionnalité des lois canadiennes qui régissent la prostitution. Cette question arrive au parquet du plus haut tribunal canadien à la suite d’une décision de la Cour d’appel de l’Ontario rendue l’an dernier qui a invalidé les articles du Code criminel qui interdisent l’existence au Canada de maisons de débauche.
Le tribunal ontarien estime que ces maisons contribuent à mettre les prostituées en péril puisque les risques de violence sont moindres lorsqu’elles peuvent exercer leurs activités à l’intérieur. Ces maisons enfreindraient aussi leur liberté.
En vertu de ce jugement ontarien, le fait de criminaliser les maisons de débauche et le proxénétisme contrevient à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui stipule que chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne.

L’enjeu délicat, complexe et controversé de la prostitution au Canada
En acceptant d’entendre l’appel du gouvernement canadien, le plus haut tribunal du pays amorce une remise en question qui pourrait, ultimement, changer le visage légal de la prostitution au Canada. Ultimement, au cœur de ce litige se trouvent les droits des prostitués, les règles entourant ce que d’aucuns considèrent comme « un métier » et la question, litigieuse et controversée, de la légalité – ou de l’illégalité – de la prostitution.
Le saviez-vous?
Des zones grises sur le plan légal
- À proprement parler, la prostitution n’est pas illégale au Canada.
- Au pays, on ne pénalise que les activités criminelles qui y sont associées.
- Autrement dit, iI n’est pas illégal d’accorder des faveurs sexuelles en échange de rétribution, sauf lorsque la prostitution a trait à des mineurs.
- Au Canada il est cependant illégal d’exploiter ou d’utiliser une maison de débauche de faire du proxénétisme et de faire de la sollicitation dans un lieu public ou à la vue du public.

Dans le camp des travailleuses du sexe
Les prostitués sont représentés devant la Cour suprême du Canada aujourd’hui par le professeur de droit, Alan Young de la région de Toronto. Young est cofondateur et directeur du Projet Innocence de Osgoode, qui vise à enquêter et à faire renverser les cas de condamnation injustifiée.
Young a représenté de nombreux clients dans des affaires liées à la capacité du gouvernement à réglementer les activités consensuelles. En 2005, il a obtenu une décision favorable de la Cour suprême concernant la légalisation des clubs échangistes.
Alan Young représente spécifiquement les intérêts de trois travailleuses du sexe : Terri-Jean Bedford, Valerie Scott et Amy Lebovitch.
Un peu d’histoire
Comment tout a commencé…
- À l’origine de cette cause figure Terri-Jean Bedford, 53 ans, qui a travaillé pendant des années comme prostituée à Calgary, Vancouver, Windsor et Toronto avant de devenir « une dominatrice ».
- En 1998, la justice reconnaît Terri-Jean Bedford coupable d’avoir tenu une maison close. À ce moment, un long processus judiciaire s’enclenche, plaçant Mme Bedford et deux autres travailleuses du sexe, Amy Lebovitch et Valerie Scott, en tête d’une bataille pour la légalisation des lieux de débauche.
- En septembre 2010, lorsque la Cour supérieure de l’Ontario leur donne raison, les demanderesses crient alors victoire.
- Par la suite, le gouvernement fédéral décide de faire appel du jugement de la Cour supérieure de l’Ontario invalidant certaines dispositions de la loi canadienne qui restreignent la prostitution.

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