Roderick Rabbitskin

Roderick Rabbitskin
Photo Credit: Radio-Canada

Décès du collègue Roderick Rabbitskin

« Wachiyak mis-soo-waa, nii Roderick Rabbitskin,» voilà comment il ouvrait son émission quotidienne en Cris à l’antenne du réseau nordique de Radio-Canada.

Il n’a jamais eu la chance de dire au revoir à ses auditeurs.

Durant plus de vingt ans, le populaire animateur radio Roderick Rabbitskin accompagnait les Cris du Eeyou Istchee au nord du Québec, dans leurs cuisines, leurs voitures et aux campements lors des chasses.

Il est décédé lundi dernier à 49 ans des suites d’une crise cardiaque.

« Il avait cette façon bien à lui de toucher son auditoire, » a déclaré sa collègue Betsy Longchap. Madame Longchap a grandi avec Roderick à Mistissini au Québec. Elle l’a ensuite côtoyé au travail durant 13 ans.imgres

« On le sentait passionné par les dossiers qu’il couvrait, par les histoires qu’il racontait.»

Au-delà de sa voix si chaude et familière, on se souviendra aussi de Roderick Rabbitskin pour l’impact qu’a eu son « coming out » en 2010 dans les pages du mensuel The Nation alors qu’au cours d’une entrevue teintée d’Émotions, Roderick a ouvertement parlé de son homosexualité, ce qu’il a fait quelques jours plus tard à l’antenne.
Après de nombreuses années à le cacher, il a pris la décision d’en parler publiquement. Dans la foulée, il a de ce fait aidé d’autres Cris homosexuels à avoir le courage de parler publiquement de leur sexualité.

« Je ne crois pas que cela n’a fait que libérer son âme, » a déclaré Daniel Mark-Stewart de la communauté crie d’Eastmain près de la Baie James. « Je crois qu’il voulait que l’on prenne conscience de cette réalité. Par ce choix, Roderick a donné beaucoup de courage à certaines personnes. »

Au cours des dernières années, Roderick Rabbitskin a aussi parlé de la violence et des abus dont il a été victime durant son enfance.

Daniel Mark-Stewart dit que ces révélations, cette ouverture de la part de Roderick, ont aidé de nombreux Cris à s’accepter tels qu’ils sont et à accepter les différences d’autrui.

« Avec les grands chefs, Roderick était, sans aucun doute l’une des personnes les plus connues de la nation crie. »

Au début de sa vie d’adulte, Roderick Rabbitskin faisait jouer de la musique gospel à la station de radio locale de Mistissini. C’est en 1993 qu’il est venu à Montréal pour y travailler à l’antenne de l’unité radio du service nordique en langue crie de Radio-Canada. Il animait l’émission « Eyou Dipajimoon », ce qui se traduit par « les histoires d’un people,»

Betsy Longchap se souvient de voyage qu’elle faisait avec Roderick Rabbitskin dans Eeyou Istchee alors qu’ils recueillaient des sujets à diffuser à l’émission de l’heure du midi.

« Un jour, un aîné nous a abordé et nous a raconté, pointant vers son épouse, à midi moins cinq, elle s’empare d’une chaise, s’assoit près du récepteur radio et elle attend que vous entriez en ondes. Elle ne bouge pas de là jusqu’à ce que l’émission soit terminée. »

Après près de vingt ans au service nordique à Montréal, fatigué de la vie citadine et éprouvant le profond désir de se rapprocher des siens, Roderick Rabbitskin est revenu à Mistissini, où il a poursuivi sa carrière d’animateur radio sur les ondes de JBCCS, la société de communication de la Baie James.

De nombreux témoignages ont afflué, tant à la radio de Mistissini qu’au service nordique de Radio-Canada au sujet de Roderick Rabbitskin, de sa passion pour la sauvegarde de la langue et de la culture cries et de son rire chaleureux.

Ses funérailles se tiennent aujourd’hui à Mistissini.

Au revoir collègue. Kwè.

Texte original de Jaime Little.

Catégories : Arts et divertissements, Autochtones, Santé, Société
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