Les feux qui dévorent de vastes étendues de forêt en Alberta pourraient être catastrophiques pour l’économie de l’Alberta, voire celle du Canada. En cause : l’arrêt de plusieurs sites d’exploitation des sables bitumineux.
Depuis deux ans, l’industrie pétrolière canadienne, concentrée dans l’Alberta, pâtissait de la dégringolade des cours du brut. À présent, elle va enregistrer un effondrement de sa production.
A cause des feux qui consument la forêt boréale au nord de Fort McMurray, pratiquement toutes les grandes compagnies pétrolières ont soit arrêté, soit ralenti leur production.
Production amputée de moitié
Vendredi, alors que le prix du baril était aux alentours de 46 dollars, soit son plus haut depuis six mois, diverses compagnies pétrolières exploitant des mines de sables pétrolifères au nord de Fort McMurray ont suspendu leur production
Syncrude en a fait de même samedi en arrêtant la production de sa mine de Mildrew Lake. Ce groupe est détenu par le premier pétrolier canadien Suncor, qui a également fermé des sites non loin tout comme auparavant Shell, ConocoPhillips, Total, Imperial Oil (Exxon), Nexen (CNOOC) ou encore Husky et BP.

L’expert pétrolier Dan McTeague affirme que la production de tout le bassin nord de l’Alberta a été amputée de moitié, soit l’équivalent de 1 à 1,5 million de barils par jour (bpj). Ce qui représente un quart de la production canadienne.
Avant l’annonce de Syncrude, qui a une capacité de 350.000 bpj, Matt Smith de ClipperData estimait vendredi « à un million de barils par jour le volume de production retiré du marché ».
En entrevue sur la chaîne CTV, Dan McTeague a soutenu qu’en raison « des inquiétudes sur la production de pétrole qui commencent à pointer, à la fois aux États-Unis et au Canada, on pourrait voir les prix du brut s’envoler ».
Rachel Notley, Première ministre de l’Alberta convient que les feux de forêts affectent de toute évidence les opérations pétrolières dans la région. Mais elle assure que les secours s’emploient à protéger les sites des compagnies afin de leur permettre, dès que les feux ne les menaceront plus, de reprendre la production.

Une perturbation inopportune pour l’économie canadienne
La reprise de la production ne se fera pas avant plusieurs jours. Il faudra d’abord rapatrier les milliers de travailleurs évacués à des centaines de kilomètres. Les 4800 salariés de Syncrude par exemple ont été évacués ce week-end par de gros porteurs de l’armée.
Tant pour les compagnies pétrolières que pour l’économie canadienne, cette catastrophe tombe au plus mauvais moment. Sur les deux dernières années, les pétrolières ont dégraissé leurs effectifs et la croissance canadienne est même tombée en récession l’an dernier, le secteur énergétique comptant pour 10% du PIB.
En 2015, le secteur pétrolier et gazier a opéré 30.000 licenciements, selon les chiffres du cabinet Petroleum Labour market, après déjà quelques milliers l’année précédente.
Le pétrole emploie un salarié sur 10 en Alberta et pour Fort McMurray, l’impact est énorme car toute l’activité en dépend. La population de la ville a quintuplé en 20 ans, à près de 100.000 habitants.

Doublement du taux de chômage en Alberta
Avant même le départ des feux il y a tout juste une semaine, l’économie albertaine était déjà en souffrance avec, pour le seul mois d’avril, 21.000 emplois supprimés et un taux de chômage de 7,2%, soit plus de deux fois son niveau d’avant la crise pétrolière il y a deux ans.
Selon Dan McTeague, la chute de la production canadienne va se répercuter au-delà des frontières, en particulier sur l’approvisionnement des raffineries du Midwest américain
Avec les feux, dit McTeague, un certain nombre de compagnies « ne seront pas en mesure de produire des carburants ou d’autres produits pétroliers ».
Cinquième producteur mondial de pétrole, le Canada cherche à maintenir une activité si essentielle à sa croissance et, à la fin de l’hiver, le gouvernement libéral de Justin Trudeau a promis une aide d’un milliard de dollars canadiens à l’Alberta.
(Avec L’AFP)
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