Le Canada exhorte officiellement ses pays alliés a faire comme lui et de ne plus verser de rançons aux ravisseurs. Mais quelle stratégie adoptée quand c’est un pays qui s’empare d’un de nos citoyen sous des prétexte fallacieux comme ce fut le cas tout récemment en Iran pour la canado-iranienne Homa Hoodfar?
Interrogé il y a six mois sur la décapitation quelques jours plus tôt aux Philipines d’un premier touriste canadien, John Ridsdel, qui avait été kidnappé par le groupe Abou Sayyaf six mois auparavant, le premier ministre canadien avait martelé le message que le Canada ne paie pas et ne paiera jamais de rançon aux terroristes, directement ou indirectement.
De préciser alors le premier ministre : « Nous ne voulons pas qu’un tel financement permette de commettre des actes terroristes contre des innocents.
Payer des rançons pour des membres de notre nation mettrait aussi en danger la vie de tous les Canadiens qui vivent, qui voyagent et qui travaillent à travers le monde selon Justin Trudeau.
Quelques semaines plus tard, un deuxième otage canadien aux Philippines était à son tour tué sur fond de refus de la part du Canada de verser le montant de la rançon. La famille du malheureux avait entrepris vainement de négocier seule avec les ravisseurs, sans même la participation indirecte du gouvernement canadien.
L’ancien premier ministre ontarien Bob Rae qui connaissait bien une des victimes explique comment il a essayé sans succès, dans les limites de la politique du gouvernement, de faciliter le travail de négociation de la famille avec les terroristes.
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ÉcoutezLa position du gouvernement canadien est acceptée par les Canadiens
Si Justin Trudeau refuse, tout comme le Royaume-Uni, de payer des rançons pour libérer des otages c’est aussi afin de ne pas compromettre la sécurité des Canadiens qui voyagent. Ses déclarations sur cette question n’ont pas déclenché de vagues de mécontentement ou de surprise le printemps dernier au pays.
Si certains à l’étranger ont critiqué la stratégie canadienne, au Canada l’avis des citoyens comme des spécialistes est favorable dans l’ensemble à cette prise de position du gouvernement.
David Morin est professeur de politique appliquée, et codirecteur de l’Observatoire sur la radicalisation et l’extrémisme violent. Michel Juneau-Katsuya est expert pour sa part en sécurité nationale et est ancien agent du Service canadien du renseignement de sécurité. Ils expliquent tous deux pourquoi la stratégie canadienne a de plus en plus de sens dans un monde qui vit à l’heure du terrorisme.
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ÉcoutezQuoi faire quand c’est un État étranger qui s’en prend à un Canadien?
Va pour les ravisseurs privés. La stratégie canadienne de ne pas verser un sou semble avoir du sens pour beaucoup de Canadiens.
Mais quelle politique le Canada applique t-il en coulisse quand la prise en otage d’un Canadien à l’étranger est pratiquée non pas des individus, mais par un État comme ce fut le cas récemment pour la féministe irano-canadienne Homa Hoodfar en Iran qui est revenu au pays il y a une dizaine de jours à peine.
Dans des cas comme celui-là, la stratégie canadienne semble se dessiner au cas par cas en fonction bien souvent du type de relations diplomatiques et commerciales qui existent entre nos deux nations. L’Iran a mal digéré, même 35 ans plus tard, le rôle joué par un ancien ambassadeur canadien à Téhéran, qui avait réussi à cacher et a extirpé du pays plusieurs citoyens américains lors de la fameuse prise des otages américains lors de la révolution iranienne.
Ferry de Kerckhove est ancien ambassadeur du Canada en Égypte, au Pakistan et en Indonésie. Il nous montre comment le Canada s’y est sans doute pris pour faire libérer l’anthropologue canado-iranienne Homa Hoodfar, détenue en Iran pendant 110 jours.
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ÉcoutezQuels principes appliquer quand il faut négocier avec un pays ami?
Le Canada fait-il aussi des compromis lorsqu’il doit intervenir dans le cas d’un prisonnier d’opinion publique qui se trouverait faussement incarcéré a ses yeux dans la prison d’un important partenaire économique?
La question se pose ces jours-ci dans le cas d’un jeune blogueur saoudien qui n’est pas Canadien, mais dont l’épouse s’est réfugiée au Canada avec ses trois enfants.
En décembre dernier, alors qu’il venait de prendre le pouvoir un mois plus tôt, le premier ministre Justin Trudeau avait déclaré qu’il n’était pas prêt à intervenir personnellement et à saisir par exemple le téléphone pour réclamer auprès des autorités saoudiennes la libération du blogueur Raïf Badawi
Cela fait près de deux ans qu’Ensaf Haidar réclame sur toutes les tribunes la libération de son mari Raïf Badawi en Arabie saoudite et qu’elle sollicite l’aide du Canada.
En ce qui a trait aux échanges commerciaux, l’Arabie saoudite est actuellement le deuxième marché d’exportation en importance du Canada dans la région.
Découvrez :
« Aide-moi », lance au premier ministre canadien l’épouse d’un prisonnier d’opinion en Arabie saoudite
La femme de Raïf Badawi, le blogueur qui croupit derrière les barreaux en Arabie saoudite depuis près de 1600 jours, estime que le premier ministre canadien doit « intervenir directement » auprès de Riyad.
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RCI avec la contribution de Marie Villeneuve, Claude Bernatchez, Marjorie April et Grégory Bernard de Radio-Canada
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Payer ou ne pas payer les rançons aux terroristes? – Radio-Canada
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