Les poumons d'une personne atteinte de tuberculose Photo : getty images/istockphoto / stockdevil

Que sont devenus les déportés de la tuberculose des communautés inuites du Canada?

Dans les années 1950 et 1960, des milliers d’Inuits atteints de tuberculose avaient été déportés de leur communauté vers des hôpitaux du sud du Canada dans le but d’y recevoir des traitements. Ces déportations étaient prévues dans le cadre des mesures gouvernementales pour combattre la maladie qui faisait des ravages au sein de cette communauté. De nombreux déportés ne sont jamais retournés chez eux et leur sort demeure un mystère jusqu’à ce jour. En cette journée internationale de lutte contre la tuberculose, la maladie continue de sévir durement chez les Inuits Nunangat.

Mystère autour de malades disparus

Quelques-uns seulement des Inuits touchés ont réussi, après plusieurs années, à regagner leur communauté par leurs propres moyens.

Plus de 50 ans après ces événements, plusieurs déportés manquent toujours à l’appel, les familles n’ayant aucune idée du sort qui leur a été réservé.

Svadba : Association canadienne de santé publique
En 1956, un septième de l’ensemble de la population inuite était soigné dans le sud du Canada. En moyenne, un séjour durait deux ans et demi, et certains patients restaient plus longtemps. Bon nombre de familles n’étaient pas averties lorsqu’un patient atteint de tuberculose mourait dans le Sud. Les morts étaient enterrés dans des fosses communes dans des cimetières au Sud. Le ministère des Affaires du Nord finançait les enterrements.

C’est une situation préoccupante, qui en rappelle une autre, celle des pensionnats où des enfants autochtones avaient été déportés pour y être soignés, scolarisés et éduqués à l’Occidental. Une expérience qui avait tourné au vinaigre. Entre maltraitance, viols et autres disparitions mystérieuses, ces enfants avaient vécu les pires humiliations de l’histoire.

Le taux de mortalité, des suites de la tuberculose chez les Autochtones, dans les années 1930 et 1940 dépassait les 700 décès pour 100 000 personnes. Il s’agit d’un des taux les plus élevés jamais signalés au sein d’une population humaine. Tragiquement, le taux de mortalité des suites de la tuberculose parmi les enfants des pensionnats était encore plus élevé : 8000 décès pour 100 000 enfants.Association canadienne de santé publique

Quand la tuberculose s’alimente de pauvreté et de stigmatisation

En 2018, cette maladie continue de sévir dangereusement au sein des Inuits.

Son taux d’incidence était 300 fois plus élevé que celui de la population non autochtone du Canada en 2016.

La situation va en s’empirant au fil des ans, ce qui exige des efforts multiples sur le plan de la sensibilisation, de la prévention et des traitements.

Accroître la sensibilisation est un objectif prioritaire dans la mesure où la maladie est encore grandement stigmatisée et les malades sont discriminés. Cela ralentit la volonté des personnes touchées d’aller vers les centres de traitement.

Le traumatisme, qui existe toujours au sein des communautés qui ont perdu toutes traces de leurs membres partis pour des soins dans le Sud, n’est pas du tout stimulant pour les nouveaux malades qui ont peur d’aller à la rencontre des soignants.

D’un autre côté, la pauvreté, qui frappe toujours très durement les communautés autochtones du pays, encourage la propagation de la maladie.

C’est ainsi qu’il est important d’attirer davantage l’attention sur les mesures d’hygiène et de mettre à leur disposition des ressources qui leur permettront d’améliorer leur condition de vie.

Le budget fédéral 2018 prévoit 27,5 millions sur 5 ans pour améliorer la prévention, le dépistage, le diagnostic et le traitement de la tuberculose dans l’Inuit Nunangat. Photo : Luke MacGregor / Reuters

Éradiquer la tuberculose d’ici 2030

En raison de l’ampleur du problème, le gouvernement fédéral s’est donné pour mission d’éradiquer complètement la maladie au sein des communautés concernées d’ici à 12 ans.

En 2025, il entend réduire de moitié sa propagation.

Parmi les actions proposées pour atteindre cet objectif, il y a la prévention, le renforcement des ressources destinées au diagnostic et au traitement, l’élimination des inégalités sociales, l’élaboration d’une stratégie nationale qui prend en compte les déterminants sociaux de la santé au sein des communautés, soit le logement, la sécurité alimentaire et le développement des enfants. Un groupe de travail sur la tuberculose a été mis sur pied.

En 2016, on dénombrait environ 65 000 Inuits au Canada. Près des trois quarts (72,8 %) vivent dans quatre régions inuites au Canada, collectivement appelées l’Inuit Nunangat. Les régions inuites sont la région visée par le règlement de la revendication des Inuvialuit dans les Territoires du Nord-Ouest (T.N.-O.), le Nunavut, le Nunavik (le Nord-du-Québec) et le Nunatsiavut (le Nord du Labrador). Selon l’Inuit Tapiriit Kanatami, l’espérance de vie des Inuits est de 10 ans inférieure à la moyenne canadienne, 52 % des Inuits vivent dans des maisons surpeuplées, l’insécurité alimentaire est répandue et 52,5 % des Inuits sont sans emploi.

Lire aussi : 

La tuberculose, une maladie du passé de retour dans le Grand Nord

Qui souffre encore de tuberculose au Canada? La réponse en carte

À noter au sujet de la tuberculose

  • C’est une maladie infectieuse causée par un bacille qui se propage dans l’air lorsqu’une personne infectée tousse, éternue, chante ou parle. Elle s’attaque principalement aux poumons et aux voies respiratoires, mais peut aussi toucher d’autres parties du corps.
  • Pour la plupart des gens au Canada, le risque de contracter une infection active à la tuberculose est très faible. Toutefois, les taux de TB active sont plus élevés chez les Autochtones nés au Canada et plus élevés encore dans les collectivités inuites que chez les non-Autochtones.
  • La tuberculose touche annuellement plus de 10 millions de personnes dans le monde.
  • En 2016, on a signalé 1 737 cas de tuberculose active au Canada, un taux de 4,8 cas pour 100 000 habitants.
  • En 2016, les Autochtones nés au Canada avaient un taux d’incidence de 23,5 cas pour 100 000 habitants.
  • En 2016, le taux d’incidence au sein de la population inuite était de 170,1 cas pour 100 000 habitants.
  • Parmi les cas signalés au Canada en 2015, 85 % avaient été guéris ou avaient été traités.

RCI avec des informations du gouvernement fédéral, CNW et l’Association canadienne de santé publique

Catégories : Autochtones, Santé, Société
Mots-clés : , , , , , , ,

Vous avez remarqué une erreur ou une faute ? Cliquez ici !

Pour des raisons indépendantes de notre volonté et, pour une période indéterminée, l'espace des commentaires est fermé. Cependant, nos réseaux sociaux restent ouverts à vos contributions.