L'administration Trump pourrait imposer des taxes à l'uranium importé du Canada. (Photo :DAVID BOILY/AFP/Getty Images)

L’uranium canadien et l’automobile dans la ligne de mire de Donald Trump

Après l’acier et l’aluminium, c’est l’uranium qui retient l’attention de l’administration américaine. Elle vient de lancer une enquête visant à déterminer si les importations d’uranium menacent la sécurité du pays. C’est le premier pas vers de nouvelles taxes douanières.

Le secrétaire au Commerce américain, Wilbur Ross, a annoncé jeudi que l’investigation de Washington portait sur tout le secteur de l’uranium, de l’extraction à son enrichissement, en passant par son utilisation par l’industrie de la défense. M. Ross justifie la démarche américaine qui se voudra « approfondie, juste et transparente » par le décalage entre la faible production.

L’enquête du département du Commerce survient après deux plaintes déposées en janvier auprès de ses services par les entreprises américaines Ur-Energy et Energy Fuels. Selon le département de l’Énergie, le secteur a été touché par la chute des prix de l’uranium entre 2009 et 2015 et les emplois liés à cette industrie ont diminué de 60 % pour ne plus représenter que 600 postes. Les centrales nucléaires produisent environ 20 % de l’électricité du pays, utilisée pour éclairer les foyers, mais aussi pour faire fonctionner les sous-marins et les porte-avions de l’armée américaine.

Les États-Unis disent avoir importé en 2017 pour 1,4 milliard de dollars d’uranium enrichi, ainsi que pour 470 millions de dollars de minerai d’uranium et 1,8 milliard de dollars de composés et alliages d’uranium. Le Canada et le Kazakhstan fournissent environ la moitié de l’uranium importé utilisé dans les centrales nucléaires. Les autres sources majeures d’approvisionnement sont l’Australie, la Russie et l’Ouzbékistan.

La sécurité nationale, l’argument passe-partout

L’argument de la sécurité nationale a déjà servi de justification aux taxes douanières supplémentaires imposées par Washington aux importations d’aluminium et d’acier. Cette décision, rappelons-le, a déclenché une série de représailles des principaux partenaires des États-Unis, dont le Canada, l’Union européenne et la Chine.

Toujours au nom de la sécurité nationale, le département du Commerce a aussi lancé en mai une enquête sur les automobiles et pièces détachées importées chaque année dans le pays. L’administration Trump envisage l’imposition de tarifs douaniers sur ces produits, afin d’aider les travailleurs de l’automobile aux États-Unis. Mais les grands noms de l’industrie automobile ont mis en garde contre le protectionnisme dans leur secteur.

Même General Motors, qui bénéficierait apparemment de droits imposés à ses rivaux étrangers, est opposé au plan du président Trump. Une telle mesure, selon les analystes, pourrait faire grimper les prix des voitures, réduire la compétitivité des constructeurs américains et susciter des mesures de représailles de la part d’autres pays, dont le Canada.

Les parlementaires américains s’intéressent aux mesures protectionnistes de l’administration Trump. (Photo de Tasos Katopodis/Getty Images)

D’ailleurs, les velléités protectionnistes de l’administration Trump dans le secteur automobile font l’objet d’une opposition très marquée au Congrès. Une attitude qu’on n’a pas vue chez les élus américains lors des mesures punitives de Washington contre les importations d’acier et d’uranium.

Opposition plus large et plus féroce

Outre les constructeurs automobiles, des fournisseurs, des concessionnaires et des diplomates étrangers se relayent jeudi au Congrès pour tenter de convaincre l’administration Trump d’abandonner son plan sur les tarifs dans le secteur automobile. Après l’audience, le département du Commerce va déterminer s’il considère les véhicules et les pièces automobiles importés comme une menace ou non à la sécurité nationale et si des taxes punitives sont pertinentes.

En annonçant l’enquête dans le secteur automobile en mai, M. Ross a affirmé qu’il y a des éléments montrant que, pendant des dizaines d’années, les importations de l’étranger ont érodé l’industrie automobile intérieure américaine. Une évaluation contestée par quelques acteurs importants de ce secteur aux États-Unis.

Le sénateur démocrate Doug Jones de l’Alabama est hostile aux tarifs sur les véhicules importés aux États-Unis. (Photo by Justin Sullivan/Getty Images)

Le sénateur démocrate Doug Jones, de l’Alabama, et le républicain Lamar Alexander, du Tennessee, ont déjà annoncé leur intention de présenter des mesures législatives pour s’opposer aux éventuels tarifs de 25 % qui seraient imposés sur les automobiles. Les deux hommes soutiennent que ces tarifs menacent des dizaines de milliers d’emplois dans leur État.

Les automobiles et les pièces automobiles étrangères ne sont pas une menace à notre sécurité nationale. Mais vous savez ce qui constitue une menace? Une taxe de 25 % sur le prix de ces biens étrangers. Doug Jones, sénateur démocrate de l'Alabama

Une guerre commerciale dans le secteur de l’automobile causerait beaucoup plus de dégâts que celle en cours entre Washington et Pékin dans le secteur de la haute technologie ou encore que celle sur l’acier et l’aluminium. Et pour cause! L’an dernier, les États-Unis ont importé des véhicules pour une valeur de 192 milliards de dollars et des pièces automobiles pour 143 milliards. Ces montants sont largement supérieurs aux 34 milliards en biens chinois taxés par l’administration Trump, aux 29 milliards de l’acier et aux 23 milliards de l’aluminium.

(Avec AP et l’AFP)

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