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Guerre commerciale : gros nuage sur la croissance mondiale

Le Fonds monétaire international prévoit une croissance de 3,9 % pour l’économie mondiale cette année. Cela représente une hausse inchangée par rapport à son estimation publiée en avril. Mais l’organisme prévient que le conflit commercial déclenché par l’administration de Donald Trump contre ses partenaires traditionnels pourrait compromettre à brève échéance la croissance économique de la planète.

Même si le FMI maintient pour le moment sa prévision d’expansion pour 2018, il prévient cependant que le risque que les tensions commerciales actuelles s’amplifient, avec un impact négatif sur la confiance, les marchés et l’investissement, représente à court terme la menace la plus grande pour la croissance mondiale.

L’économiste en chef du FMI, Maurice Obstfeld, affirme que, selon des modèles, « si les menaces actuelles sur le commerce se réalisent et la confiance des entreprises s’érode, cela pourrait abaisser nos projections actuelles de l’ordre de 0,5 point d’ici 2020 ».

Mais cette donnée dissimule de grandes dissimilitudes. Si pour le moment la projection de croissance des deux premières économies du monde, États-Unis et Chine, reste stable pour cette année, il n’en est pas autant pour d’autres pays avancés comme la France, l’Italie, le Royaume-Uni, le Japon et l’Allemagne. Dans ces pays, la croissance devrait s’établir à 2,4 % (-0,1 point) avec les États-Unis faisant la course en tête (+2,9 %) sous l’effet de la réforme fiscale adoptée fin 2017. Une réforme qui s’est traduite par une baisse d’impôts pour les ménages et les entreprises.

La menace protectionniste

Le choix du président américain Donald Trump d’imposer un virage résolument protectionniste à l’économie de son pays est le gros nuage qui plane au-dessus de l’économie mondiale. Un nuage qui se résume en taxes douanières de 25 % sur les importations d’acier, de 10 % sur celles d’aluminium contre les principaux partenaires commerciaux des États-Unis, dont le Canada, la Chine, l’Union européenne et le Mexique. Sans oublier des tarifs punitifs de 25 % sur 50 milliards de marchandises chinoises.

Depuis son accession à la présidence des États-Unis, Donald Trump a pris une série de mesures protectionnistes contre de nombreux pays, dont le Canada.

Non seulement ces pays ont riposté aux mesures américaines par des taxes sur des dizaines de milliards de marchandises américaines, mais en plus, certains d’entre eux ont porté plainte contre Washington à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Dans tout ce qui a l’air d’une surenchère, la Maison-Blanche menace déjà d’imposer de nouvelles taxes de 10 % sur 200 milliards de dollars d’importations chinoises supplémentaires et d’infliger des tarifs de 25 % sur les importations du secteur automobile, une industrie stratégique au centre des échanges mondiaux.

Quelques cas notables

Pour l’heure, et en l’absence d’un signe de la baisse des tensions commerciales, le FMI a revu à la baisse la croissance du volume d’échanges de marchandises. Sa prévision pour la zone euro a été baissée de 0,2 point à 2,2 %, avec des estimations moins optimistes pour l’Allemagne (-0,3 point à 2,2 %), la France (-0,3 point à 1,8 %) et l’Italie (-0,3 point à 1,2 %), en raison du ralentissement de l’activité économique plus marqué que prévu au premier trimestre pour les deux premiers et des incertitudes politiques qui ont pesé sur le troisième.

Le Japon, dont la croissance devrait s’établir à 1 % (-0,2 point), a lui enregistré une consommation et de faibles investissements au premier trimestre, qui devraient toutefois retrouver de la vigueur le reste de l’année. Le Royaume-Uni aura une croissance de 1,4 % (-0,2 point). Le pays souffre du caractère confus des termes du Brexit, en dépit de mois de discussions.

Christiane Lagarde, directrice du FMI.
Christiane Lagarde, directrice du FMI.profite de toutes les tribunes pour mettre en garde contre les effets néfastes du protectionnisme sur l’économie mondiale. © AFP/NICOLAS ASFOURI

Le chef économiste du FMI soutient par ailleurs que des ruptures d’approvisionnement et les tensions géopolitiques ont contribué à faire grimper le prix du pétrole, ce qui bénéficie aux pays exportateurs comme la Russie, tout en pénalisant des importateurs comme l’Inde, dont la croissance est néanmoins estimée à 7,3 % (-0,1 point).

Globalement, les perspectives sont bonnes pour les pays émergents et en développement avec es projections de 4,9 % en 2018 et de 5,1 % en 2019. En Afrique subsaharienne, les données sont respectivement de 3,4 % et de 3,8 %. En ce qui concerne l’Amérique latine et les Caraïbes, le Fonds monétaire abaisse sa prévision à 1,6 %, soit 0,4 point de moins que lors de la prévision du printemps. Cette nouvelle estimation reflète les difficultés de deux économies clés de la région, l’Argentine et le Brésil. La première a d’ailleurs obtenu récemment une aide financière du FMI. La seconde pâtit des effets de grèves et de l’incertitude politique.

Le cavalier seul est intenable

À l’ère de l’interconnexion des relations commerciales, le repli sur soi n’est pas le bon choix selon le FMI. Face aux problèmes d’intérêt commun, une réponse strictement nationale est insuffisante. Il faut « éviter les mesures protectionnistes et trouver une solution coopérative, qui promeut la croissance du commerce des biens et services, demeurent essentiels pour préserver l’expansion mondiale », insiste le FMI.

Le Fonds recommande donc de renforcer le système commercial multilatéral, de réduire les déséquilibres mondiaux excessifs, de veiller à la stabilité financière, de contrer les cybermenaces et autres menaces terroristes, de lutter contre les maladies et le réchauffement de la planète, etc. La coopération est aussi indispensable pour gérer efficacement les pressions migratoires internationales qui déstabilisent tant les pays de transit que les pays d’accueil.

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