Juifs hassidiques : condamnés à l’errance et au nomadisme à cause d’un mode de vie à contre-courant des règlements?

Selon TVA Nouvelles, la municipalité de Val-David dans les Laurentides envisage d’introduire un recours collectif devant les tribunaux contre la communauté juive hassidique qui y vit durant une partie de l’année. On lui reproche de ne pas se soumettre à la réglementation municipale. Une situation qui en rappelle une autre, celle des juifs hassidiques qui ont été expulsés de Sainte-Agathe-des-Monts, une municipalité voisine, toujours pour le non-respect des règlements municipaux.

RCI avec Radio-Canada et TVA Nouvelles

Juifs hassidiques : une nation dans la nation?

Les juifs hassidiques ont une identité particulièrement remarquable du fait de leur mode de vie qui frise l’autarcie. Autrement, ce sont des personnes qui vivent en quasi-vase clos, envisagent et font tout en communauté, entre eux, loin de quelque regard indiscret que ce soit.

Chez eux, tout doit passer par le prisme de l’« autocentrisme » et de « l’autosuffisance » qui ont très souvent pour corollaire la culture de l’« isolationnisme » d’un petit groupe au sein d’une vaste population. Du coup, cela donne l’impression que ce groupe crée et vit dans sa propre nation, selon ses propres principes, dans une nation qui a d’ores et déjà fixé les balises, en ce qui a trait au mode de vie dans une société libre, démocratique et laïque.

L’impression d’une nation dans la nation rend difficile la cohabitation des juifs hassidiques avec les habitants de différentes municipalités.

Cela s’est vu au courant des derniers jours où la municipalité québécoise de Sainte-Agathe-des-Monts a donné un ultimatum à cette communauté, lui intimant l’ordre de quitter la localité avant le 26 juillet. Une décision prise à la suite d’une injonction de la Cour supérieure du Québec.

Ce délai – qui expirait jeudi à 17 h – a été respecté, a confirmé un porte-parole de la ville vendredi.

L’inverse aurait pu coûter cher aux leaders de la communauté : l’entente conclue avec eux prévoyait une amende de 20 000 $. Sans compter qu’une accusation d’outrage au tribunal aurait pu être déposée si l’injonction n’avait pas été respectée.

Après des années de plaintes, la Ville de Sainte-Agathe-des-Monts, dans les Laurentides, a obtenu un jugement de la Cour supérieure du Québec ordonnant aux membres d'une congrégation juive hassidique occupant une maison dans un quartier résidentiel de quitter le bâtiment d'ici dimanche après-midi. Toutefois, des pourparlers avec les propriétaires de la maison ont mené à une entente : les lieux seront évacués au plus tard le 26 juillet. Les détails avec Mélissa François

Comment en est-on arrivé là?

Il se trouve que cette petite communauté juive organise des activités festives tard le soir dans une maison qu’elle occupe durant l’été. Des soirées vivement animées, rythmées de musique, de l’allumage de grands feux, qui ne manquent pas de créer des nuisances sonores et de troubler la tranquillité des habitants de cette paisible municipalité des Laurentides.

Cette situation qui perdure depuis quelques années a depuis assombri le ciel des relations entre cette communauté, la population et la municipalité qui a dû recourir aux tribunaux pour obtenir l’expulsion du trop bruyant groupe, avec comme motif le fait qu’il violait une réglementation municipale, en utilisant notamment un bâtiment situé dans un quartier résidentiel comme un lieu de culte et un dortoir où s’accumulent des tas d’immondices, probablement des restes de leurs tables festives.

« À la suite d’un drame, Alexandra Ackerman, une jeune fille russe intelligente et curieuse, est séparée des siens et trouve refuge chez des hassidim du quartier Outremont à Montréal. Déracinée, elle est obligée de se fondre dans des traditions ancestrales qu’elle remet sans cesse en question » dans ce livre. Crédit RCI

Il faut rappeler que la petite communauté juive appartient à la congrégation « et Yechiva », une congrégation marquée par sa foi particulière, son rituel et son éthique sociales qui peuvent parfois aller à contre-courant des règles de vie dans une société libre, démocratique et laïque. Le bâtiment, qui abrite leurs activités, leur avait été loué par une autre communauté juive, les Lev Tahor. Ces derniers avaient dû, eux aussi, quitter les lieux dans la précipitation, il y a quelques années, pour trouver refuge en Ontario, puis au Guatemala, parce que leur mode de vie avait aussi fini par leur causer des ennuis.

Il faut aussi préciser que la solution extrême de les expulser est intervenue en dernier recours, selon la municipalité, après de nombreuses tractations infructueuses avec les hauts dignitaires de la congrégation, pour tenter de trouver un terrain d’entente sur la meilleure manière de cohabiter avec le reste la population sans contrariété.

La maison festive d’où les juifs hassidiques de Sainte-Agathe-des-Monts ont été expulsés. Crédit : Radio-Canada

Val-David sur les pas de Sainte-Agathe-des-Monts?

S’il n’est pas question d’expulsion des juifs hassidiques de Val-David, du moins pour le moment, on ne serait pas surpris que cela arrive bientôt, comme ça a été le cas à Sainte-Agathe-des-Monts.

Dans les deux cas, même si on leur reproche de contrevenir aux règlements municipaux en ce qui a trait au zonage résidentiel, les faits sont quelque peu différents. Dans le premier cas, les nuisances sonores ont été au centre du litige, tandis qu’à Val-David, la municipalité reproche à la communauté juive d’avoir établi des écoles et des centres communautaires dans un quartier résidentiel. Une situation qui risque d’entraîner un recours collectif devant les tribunaux.

L’affiche de la mairie de Val-David Photo : Radio-Canada/René Saint-Louis

Cette communauté a l’habitude de vacances estivales dans cette municipalité depuis 50 ans. Elle est presque autosuffisante dans sa façon de fonctionner, avec ses écoles particulières, ses propres autobus d’écoliers, ses propres secouristes, etc.

Les responsables municipaux ont estimé qu’en raison du non-respect de la réglementation en ce qui a trait au zonage résidentiel, après de nombreuses mises en demeure qui se sont soldées par des amendes payées par la communauté juive, sans toutefois démanteler réellement les écoles et centres communautaires situés dans les lieux interdits, il est temps de faire appel à la Cour supérieure. Entre temps, les deux parties auraient convenu de se rencontrer vendredi pour tenter de négocier une entente et éviter les tribunaux.

Rappelons que les tensions entre les juifs hassidiques et la population des Laurentides ont des fois atteint des sommets et conduit même à des incendies d’origine criminelle d’une synagogue et d’autres bâtiments de cette communauté.

Mise au point
À la suite de notre article, nous nous sommes entretenus avec Kathy Poulin, la mairesse de Val-David. Mme Pouain met en garde contre toute velléité haineuse à l’endroit des membres de la communauté juive hassidique.

La mairesse de Val-David, Kathy Poulin Photo : Radio-Canada/René Saint-Louis

Elle souligne qu’il s’agit de personnes qui entretiennent des relations apaisées avec la municipalité, qui sont ouvertes au processus qui mène à la résolution du problème en lien avec la réglementation sur le zonage municipal. Selon ses propos, il n’y aurait rein de bien grave , si ce n’est chercher à régler, de manière pacifique, une situation qui n’est pas spécifique à une communauté, étant donné que des cas de violation de la réglementation existent partout ailleurs, dans les autres municipalités, du fait d’autres groupes sociaux, d’où la nécessité d’éviter de tomber dans le piège de la stigmatisation à outrance.

Écouter la mairesse, Kathy Poulin.

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Catégories : Politique, Société
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