Lorsqu’une députée du Bloc québécois a demandé, jeudi, le consentement unanime de la Chambre pour accorder aux blogueurs emprisonnés en Arabie saoudite une citoyenneté canadienne à titre honorifique, elle a été interrompue par les cris de députés conservateurs qui forment l’opposition officielle.
Raif Badawi, dont la femme et les trois enfants habitent au Québec, a été condamné à 10 ans de prison et à 1000 coups de fouet pour la création d’un forum en ligne afin de discuter de questions sociales en Arabie saoudite.
En lui accordant la citoyenneté canadienne, le Bloc québécois y voyait un geste de plus pour attirer l’attention sur son sort et l’aider à trouver une porte de sortie de son cachot où il est cloué depuis sept ans.
« Qu’il soit résolu par la Chambre d’octroyer à Raif Badawi le titre de citoyen honoraire du Canada », s’est mise à lire la députée Christine Normandin, interrompue ici et là par les cris désapprobateurs de députés conservateurs.
Le président de la Chambre a appelé au calme, puis a demandé si la députée avait le consentement unanime pour proposer sa motion. Un « non » collectif a alors retenti des bancs des conservateurs alors qu’Ensaf Haidar, la conjointe de M. Badawi, surveillait la scène du haut d’un balcon.
Un refus qui offusque
Le chef du Bloc québécois, à sa sortie du Parlement, a dénoncé « l’indignité » des députés conservateurs en affirmant qu’octroyer une citoyenneté honorifique au blogueur ne constituait pas un geste honorifique futile comme ils le perçoivent.
« Ce n’est pas qu’emblématique, c’est un outil important », a insisté Yves-François Blanchet, qui note « une ouverture d’esprit du côté des libéraux et du côté du Nouveau Parti démocratique ».
Mme Haidar, qui avait fait le trajet de trois heures entre la ville de Sherbrooke et la capitale canadienne en Ontario est convaincue que cette citoyenneté changerait les choses si son conjoint pouvait se déclarer Canadien à la face du monde.
« Maintenant, quand (le Canada) demande la libération de Raif, l’Arabie saoudite dit que Raif est saoudien. »
La nouvelle grève de la faim de Raif Badawi inquiète le ministre canadien des Affaires étrangères
Pendant un voyage de plusieurs jours en Égypte, le nouveau ministre canadien des Affaires étrangères s’est dit « très inquiet » par la nouvelle d’une grève de la faim de M. Badawi.
« Je suis ça de très près. J’ai l’intention d’appeler mon homologue saoudien avant la fin de l’année pour soulever les inquiétudes du Canada », indiquait jeudi François-Philippe Champagne au cours d’une conférence téléphonique avec des journalistes canadiens.
Rappelons que les relations diplomatiques se sont extrêmement tendues durant le premier mandat du premier ministre Justin Trudeau. Il y a eu l’affaire de l’arrêt de la vente de véhicules blindés canadiens à l’Arabie saoudite et les remontrances canadiennes dans la foulée du meurtre et du démembrement d’un journaliste saoudien en Turquie.
L’ex-ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland avait froissé le royaume en demandant sur Twitter la libération de Samar Badawi, sœur du blogueur et militante pour les droits des femmes.
Ottawa s’est fait sommer de se mêler de ses affaires. Mais le ministre Champagne affirme qu’il ne baissera pas les bras pour autant.
« Il n’y a personne qui va dicter la politique étrangère du Canada à part le gouvernement canadien, a-t-il tranché. La famille de M. Badawi vit au Canada, alors nous avons un intérêt particulier à ce qui arrive à M. Badawi. »
RCI avec La Presse canadienne et la contribution de Radio-Canada
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