Les ministres français et québécois de l’Économie ont exprimé deux opinions divergentes jeudi quant au rachat du distributeur français Carrefour par le géant canadien Couche-Tard.
Mercredi, le groupe canadien a confirmé les révélations de l’agence Bloomberg concernant sa volonté de fusion avec le groupe français.
Ces révélations ont suscité plusieurs inquiétudes, notamment dans l’Hexagone. Mercredi soir, sur France télévision, le ministre Bruno Le Maire indiquait ne pas être favorable à ce rachat.
“Ce qui est en jeu, c’est la souveraineté alimentaire des Français”, a-t-il précisé.

Le ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire, se dit inquiet de l’offre de Couche-Tard. (Photo : Thomas Coex/Reuters)
« Je n’ai rien contre cette grande entreprise canadienne, je pense que Carrefour est une entreprise très solide et je lui fais pleinement confiance pour améliorer son modèle et développer un nouveau mode de distribution », a ajouté M. Le Maire lors d’une intervention à la conférence Reuters Next jeudi.
« Mais que Carrefour se fasse racheter par une entreprise étrangère serait une difficulté majeure pour nous tous, a-t-il poursuivi. La sécurité alimentaire est au cœur des défis stratégiques de tous les pays développés. »
Depuis 1980, Alain Bouchard, à la tête d’Alimentation Couche-Tard, a su développer ce géant québécois des dépanneurs qui dénombre aujourd’hui environ 130 000 employés dans 14 200 magasins dans le monde.
De son côté, le groupe Carrefour, créé en 1959 par Marcel Fournier, compte aujourd’hui près de 320 000 employés dans plus de 12 300 enseignes présentes en France et à l’étranger. En plus d’être un pionnier en matière de distribution alimentaire, Carrefour se fait également le relais du patrimoine culinaire régional.

Les produits “reflets de France” ont été lancés en 1997 par le groupe Carrefour afin de promouvoir les produits locaux. (Photo : Éric Gaillard/Reuters)
Rappelons qu’il ne s’agit aujourd’hui que de discussions préliminaires et qu’aucun accord n’a pour l’instant été signé. Il ne s’agit pour l’instant que de “démarches amicales […] pour un projet de rapprochement” a indiqué Carrefour.
Cependant, il semblerait que ce projet puisse rencontrer plusieurs obstacles du côté français. En effet, depuis 2005, certains secteurs stratégiques doivent se soumettre à l’autorisation préalable du ministre de l’Économie, avant de procéder à des investissements étrangers.
Or, depuis le 1er janvier 2020, la sécurité alimentaire nationale compte parmi ces secteurs stratégiques. Dans ce cadre, le décret exige l’autorisation du ministre de l’Économie dès qu’une entreprise étrangère souhaite racheter 25 % ou plus du capital d’un groupe de distribution alimentaire français.
Depuis juillet 2020, la COVID-19 a cependant suscité certains réajustements concernant ce décret. Jusqu’au 31 décembre 2021, l’autorisation préalable du ministre de l’Économie sera requise pour tout rachat, dès qu’ils concernent 10 % du capital.
Pour ce qui est de l’offre de Couche-Tard, elle est basée sur un prix de 20 euros par action Carrefour, ce qui représenterait au total près de 20 milliards de dollars canadiens.

Depuis 1980, Alain Bouchard, à la tête d’Alimentation Couche-Tard, a su développer ce géant québécois des dépanneurs qui dénombre aujourd’hui environ 130 000 employés dans 14 200 magasins. (Photo : Christinne Muschi/Reuters)
Une source familière des discussions a déclaré à Reuters que “20 euros par action n’étaient pas suffisants, mais constituaient un point de départ pour les discussions”.
Une autre source proche de Carrefour a toutefois indiqué à l’agence de presse que le groupe était surpris par les commentaires de Bruno Le Maire.
« Nous sommes surpris par cette réaction alors que nous ne sommes qu’à un stade très préliminaire », a dit cette source.
Si le ministre français de l’Économie ne semble, pour l’instant, pas favorable à ce rachat, son homologue québécois semble, lui, plus enthousiaste.
Selon le ministre québécois de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, cette transaction pourrait représenter grand nombre d’avantages et son gouvernement, en contact avec l’Élysée, promeut actuellement “le fait que Couche-Tard pourrait être un bon propriétaire, comme Alstom est devenue un bon propriétaire de Bombardier Transport”, indique Reuters.
Avec les informations de Reuters.
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