Le projet de service à l’enfance inuit franchit une étape importante au Nunavik

Portrait des deux femmes.
Mina Baulne (à gauche) en compagnie de la présidente du conseil d’administration de NIP, Minnie Grey (à droite). Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

L’organisme Nunavimmi Ilagiit Papatauvinga (NIP) a franchi une nouvelle étape dans la concrétisation de son projet de protection de la jeunesse adaptée à la réalité du Nunavik en signant un protocole d’entente avec les autres institutions régionales.

Parmi les signataires, on trouve la corporation Makivvik et la Régie régionale de santé et de services sociaux du Nunavik. Les deux centres de santé régionaux ont aussi participé à cette entente, soit le Centre de santé Tulattavik de l’Ungava et le Centre de santé Inuulitsivik.

Toutes ces institutions ont ainsi réaffirmé leur confiance dans le projet soutenu par NIP, soit de progressivement adapter la protection de la jeunesse à la culture inuit.

Nous devons reprendre ce qui nous a été enlevé : la capacité de prendre soin de nos enfants sans craindre qu’ils soient retirés de leur communauté et perdent leur culture et leur langue, a déclaré le président de la société Makivvik, Pita Aatami.

La directrice générale de NIP, Mina Beaulne, déborde d’enthousiasme face à la progression de ce projet, entamé en 2017.

La signature de ce protocole d’entente, c’est une promesse que nous allons travailler ensemble pour que ça fonctionne, souligne Mina Baulne.

Après avoir travaillé à la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) pendant 13 ans, elle dit avoir pu saisir l’ampleur du décalage entre les façons de faire de l’État et les coutumes inuit.

Je n’aimais pas ce que je faisais. Je savais que c’était un système qui ne fonctionnait pas pour nous, explique Mina Baulne, qui travaille à plein temps sur ce projet.

Deux jeunes jetant un regard sur leur village Quaqtaq
Mina Baulne souhaite prévenir le retrait d’enfants de leur milieu en offrant plus de services d’aide aux familles. (Photo d’archives) Photo : Radio-Canada / Beatrice Deer

NIP espère progressivement prendre en charge certaines responsabilités de la DPJ, avec, par exemple, la gestion des familles d’accueil.

Le cœur du projet se trouve toutefois dans l’implantation de nouveaux services aux familles, en amont, qui permettront d’éviter le retrait d’enfants de leur milieu.

On n’est pas un remplacement de la DPJ. On souhaite construire un continuum de services dans les communautés. C’est pour s’assurer qu’aucune situation ne tombe entre deux chaises, et que des gens refusent des services, par manque de confiance, qui leur éviterait de rentrer dans le système, explique-t-elle.

Parmi ces services de prévention, on retrouve les conseils de famille. Il s’agit de réunions qui permettent d’impliquer la famille immédiate dans la gestion de situations de crise.

En cas de problèmes plus importants, un conseil des sages pourrait aussi être impliqué. Il s’agit d’aînés de la communauté, dont l’expérience et la sagesse pourraient servir à régler une situation familiale inadéquate.

C’est une façon de faire beaucoup plus proche de la culture traditionnelle, plutôt que de directement impliquer un service de l’État, avec des travailleurs qui ne sont généralement pas issus de la région.

Avant, c’étaient les aînés de la communauté qui rencontraient les parents quand il y avait un problème. Ils vont tenter de conseiller la famille, pour qu’ils acceptent l’aide dont ils ont besoin. Parfois, il y a une barrière de la langue, une incompréhension des services, explique Mina Baulne.

NIP ne souhaite pas complètement éclipser le travail de la DPJ dans la région. Certaines situations de négligence plus grave ou d’abus physiques et sexuels nécessiteront toujours une prise en charge de l’État, croit Mme Baulne.

Nous savons qu’il y aura toujours des enfants qui devront être placés à long terme, mais nous voulons nous assurer qu’ils ne perdent pas leur langue, leur culture, qu’ils restent connectés à leur famille et leur communauté, ajoute Mina Baulne.

Bâtir les services

Le projet NIP est actuellement en forte expansion, avec de nouvelles embauches. D’autres sont à prévoir dans les prochaines années, afin de construire l’offre de services.

C’est dans la communauté d’Inukjuak que l’organisme amorcera ses premiers tests d’ici l’automne, dans le cadre d’un projet pilote nommé Pigiarviliutik.

Le village de Kangiqsujuaq sous la neige, mars 2023.
L’implication de la famille et de la communauté dans la gestion de crise fait partie de la culture inuit. (Photo d’archives). Photo : Radio-Canada / Félix Lebel

La prochaine étape sera de retourner dans la communauté et de construire le continuum de services avec nos membres. Il y aura aussi de la formation, ajoute Mme Baulne.

C’est la première étape d’une construction progressive des services, qu’elle espère voir naître dans les 14 communautés du Nunavik d’ici 2030.

Le projet d’Inukjuak sera une manière pour elle de prouver l’efficacité de ces mesures, avant de s’asseoir avec Québec pour négocier le partage des responsabilités avec la DPJ.

Félix Lebel, Radio-Canada

Journaliste à Sept-Îles

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