Selon des militants qui militent en faveur de la protection des immigrants, une cinquantaine de « détenus de l’immigration » dans la province de l’Ontario auraient amorcé lundi une grève de la faim.
Ces détenus sont des personnes arrivées au Canada et qui ont été mises en détention provisoire jusqu’à ce que les autorités canadiennes déterminent leur statut et leur sort. Ces détenus, envoyés dans des prisons provinciales, sont parfois mêlés à des criminels endurcis.
Le réseau End Immigration Detention, qui milite en faveur de l’abolition de ces détentions, soutient que les grévistes de la faim veulent protester contre leurs conditions de détention, notamment le recours de plus en plus fréquent au confinement en cellule, voire à l’isolement.
Les protestataires souhaitent aussi l’abolition des détentions indéfinies dans des prisons à sécurité maximale. Les grévistes de la faim souhaitent obtenir une rencontre avec le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale.
Les grévistes de la faim sont actuellement détenus au Centre correctionnel à sécurité moyenne et maximale de Lindsay et au Centre de détention de l’Est à Toronto, des établissements provinciaux ontariens.
La nouvelle politique canadienne de détention obligatoire pour réfugiés
Dans le nouveau système canadien de tri des réfugiés adopté en juin 2012, des groupes d’hommes, de femmes et d’enfants de plus de quinze ans peuvent dorénavant être détenus pendant un an, en attendant que l’État canadien décide de leur sort.
Cette mesure de détention est un des nouveaux outils que s’est donnés le gouvernement canadien afin de dissuader spécifiquement les flux de « faux » réfugiés et l’arrivée d’étrangers clandestins au pays.
Plusieurs experts estiment cependant que cette politique de détention obligatoire est une réaction irrationnelle, inefficace, coûteuse et dangereuse.
Le saviez-vous?
Plus d’Habeas Corpus pour protéger ces immigrants au Canada
– Les critiques font valoir que les dispositions sur la détention de la loi C-31 adoptée par le gouvernement conservateur canadien de Stephen Harper en 2012 vont à l’encontre de plusieurs droits et libertés garantis par la Charte : la liberté contre la détention arbitraire, le droit à un examen rapide des motifs de la détention, le droit à la liberté et à la sécurité de la personne, et la liberté de peines cruelles et inusitées.
– Mais la Cour suprême du Canada a donné raison au gouvernement lorsqu’il a suspendu le droit d’Habeas Corpus de ces réfugiés.
– L’article 9 de la Charte des droits et libertés du Canada stipule que « chacun a le droit de ne pas être arbitrairement détenu ou emprisonné. »
– L’article 10 (c) prévoit que toute personne arrêtée ou détenue a le droit « d’avoir la validité de la détention déterminée par voie d’Habeas Corpus et d’être libéré si la détention est illégale. »
– Ces dispositions constitutionnelles s’appliquent à tous les citoyens canadiens ou résidents permanents, mais plus maintenant aux demandeurs d’asile.
Les détentions comme dernière option
Le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, avait indiqué en mai dernier qu’Ottawa tentait de trouver de nouvelles approches pour ces immigrants, comme la libération sous caution ou les dispositifs de surveillance à distance, en attendant de statuer sur leur sort.
Un porte-parole de M. Goodale a affirmé lundi que le ministre examinait des aspects reliés à la détention et qu’il espérait pouvoir présenter des propositions avant la fin de l’année.
Le porte-parole de M. Goodale a indiqué que, selon la loi canadienne, la détention est autorisée seulement si l’identité de la personne n’est pas prouvée ou s’il y a un risque de fuite ou un danger pour la sécurité publique.
Scott Bardsley a ainsi affirmé par courriel que l’Agence des services frontaliers du Canada devait évaluer toutes les solutions de rechange raisonnables avant de mettre une personne en détention.
Promesses non tenues
Selon le réseau End Immigration Detention, des détenus de l’immigration avaient déjà amorcé une grève de la faim le 21 avril et avaient finalement obtenu une rencontre avec les autorités de l’Agence des services frontaliers du Canada, qui est responsable de ces immigrants. Mais il semble que les promesses de l’agence n’aient pas été tenues, ce qui a poussé les détenus à reprendre leur grève de la faim, cette fois dans l’espoir de rencontrer des élus, selon l’organisme.
Dans un communiqué, Toby Clark, détenu de l’immigration depuis août 2014, estime que ce traitement constitue « une peine cruelle et inusitée », en violation, notamment, de l’article 12 de la Charte canadienne des droits et libertés.
Selon Sharmeen Khan, du réseau End Immigration Detention, les détenus de l’immigration sont souvent confinés à leur cellule pendant l’été — parfois durant des jours —, incapables de communiquer avec leurs proches ou d’obtenir de l’aide juridique. Mme Khan soutient que certains grévistes de la faim sont déjà malades ou mal en point, et que ce moyen de pression pourrait mettre leur santé en péril.
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