La procureure Bonnie Cole et l’administrateur Gilbert Terrance devant la cour d’Akwesasne le 26 septembre dernier.

La procureure Bonnie Cole et l’administrateur Gilbert Terrance devant la cour d’Akwesasne le 26 septembre dernier
Photo Credit: Ryan Remiorz La Presse canadienne

Justice sans préjudice au premier tribunal autochtone du Canada 

Le conseil des Mohawks de la réserve d’Akwesasne lance ce qui est considéré comme étant le premier système de justice 100 % autochtone au Canada et qui est indépendant du cadre fédéral défini par le gouvernement central à Ottawa.

Une bande autochtone particulièrement bien connue des Canadiens vivant le long de la frontière américaine et de l’État de New York vient de combiner des aspects du système de justice canadien avec les principes de justice réparatrice amérindienne traditionnelle.

Or, ce qui distingue le nouveau tribunal, c’est qu’il a été élaboré par la communauté indépendamment d’Ottawa. Ian McLeod, un porte-parole du ministère fédéral de la Justice, a confirmé que des pourparlers avaient été lancés entre Ottawa et les gouvernements du Québec et de l’Ontario afin d’élaborer un encadrement pour reconnaître ce nouveau système juridique. Il a toutefois prévenu que « les discussions en étaient encore à un stade très précoce ».

Les limites et les balises de l’action du nouveau tribunal autochtone

Précisons d’emblée que les causes criminelles demeureront gérées hors du système judiciaire de la réserve — dans les juridictions provinciale et fédérale.

Les juges de paix et les procureurs du tribunal auront le pouvoir de rendre la justice sur 32 règlements qui couvrent essentiellement des affaires civiles, dont des règlements sur le tabac, l’hygiène, les élections, la propriété, ainsi que sur la conservation de la faune.

Les plaignants et les défendeurs plaident leur cause devant un juge de paix, ce qui est semblable au processus canadien, mais la plupart des autres aspects reposent sur des principes mohawks.

Un drapeau mohawk près de la frontière canado-américaine
Un drapeau mohawk près de la frontière canado-américaine. Alors que les conseils de bande des Premières Nations ont adopté et appliqué plusieurs règlements sur leurs réserves depuis des dizaines d’années, ces mesures sont assujetties à la Loi sur les Indiens ou encore elles doivent être enchâssées dans des ententes d’autonomie gouvernementale conclues avec le gouvernement fédéral. © PC/Ryan Remiorz

Un outil de réhabilitation et non de punition

Le conseil d’Akwesasne a décidé de combiner des aspects du système de justice canadien avec les valeurs et les principes des Mohawks, dont le fait d’utiliser les compétences des contrevenants au service de la communauté.

Il n’y a donc pas de peine de prison. Les sanctions s’inspirent du concept de justice réparatrice et l’objectif est d’aider à rétablir les relations et l’harmonie dans la communauté.

Par exemple, si quelqu’un tapisse un mur d’école de graffitis, mais que le contrevenant est un bon joueur de crosse, le règlement édicte que cette personne pourrait devoir enseigner le sport aux étudiants.

« Nous ne regardons pas juste [les moyens] pour punir. C’est la vieille façon de penser », souligne Bonnie Cole, la procureure permanente du nouveau tribunal. « Le règlement considère la personne, l’infraction qui est commise et ce qu’on peut faire pour rétablir l’équilibre entre (le contrevenant), la victime et la communauté », a-t-elle ajouté.

Une source d’inspiration pour d’autres communautés amérindiennes?

Kirsten Anker

Kirsten Anker

Une professeure de la faculté de droit de l’université McGill, Kirsten Anker, spécialisée dans la relation entre les Autochtones et la loi, a visité Akwesasne en mai avec une délégation de la communauté crie du Manitoba qui souhaitait en apprendre davantage sur le système mohawk.

« C’est perçu comme un modèle et une source d’inspiration », a-t-elle dit, ajoutant que les Mohawks d’Akwesasne étaient des « chefs de file pour favoriser les ententes d’autonomie gouvernementale ».

« Ce qui n’est pas courant avec cette instance particulière, c’est que le règlement ne prétend pas s’inscrire dans le système [fédéral] », a-t-elle soutenu.

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RCI avec La Presse canadienne

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Catégories : Autochtones
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