Après des semaines de débat et de manoeuvres parlementaires, le Sénat canadien a finalement adopté, mardi soir, les amendements de la sénatrice Ratna Omidvar au projet de loi C-6. Elle se bat pour assurer un droit d’appel aux personnes dont la citoyenneté est en voie d’être révoquée.
Le projet de loi C-6 avait pour but premier de modifier la mesure du gouvernement Harper qui révoque la citoyenneté canadienne à toute personne ayant une double citoyenneté et qui se rend coupable de certains crimes. En campagne électorale en 2015, les libéraux de Justin Trudeau avaient répété le slogan « Un Canadien est un Canadien est un Canadien », une manière de dénoncer le traitement discriminatoire des citoyens canadiens selon leur lieu de naissance.
Problème : le projet de loi C-6 maintenait la révocation de la citoyenneté pour fausses déclarations sans offrir un droit d’appel. La sénatrice indépendante Ratna Omidvar s’est alors lancée dans une croisade pour que cette disposition soit supprimée. Les amendements adoptés mardi soir corrigent cette situation. Il reste encore au projet de loi, tel qu’amendé, à passer au vote au Sénat. Et comme il aura été amendé, il retournera, pour approbation, aux Communes.

La sénatrice Omidvar a exprimé sa satisfaction en quittant le Sénat mardi soir. « Je suis très heureuse que nous ayons restauré une procédure équitable pour les citoyens qui perdent leur citoyenneté. » Elle croit réaliste d’espérer une sanction royale le 13 avril, au plus tard.
Au cours de cette saga parlementaire, le gouvernement Trudeau s’est dit prêt à accepter des amendements du Sénat, après ses réticences initiales. Quant aux auteurs de la loi jugée discriminatoire, les conservateurs, dans un baroud d’honneur, ils ont multiplié les manoeuvres pour retarder l’inévitable. Mais ils ne sont plus assez nombreux au Sénat pour décider du sort d’un projet de loi.
Ainsi, la semaine dernière, on a assisté à une danse répétitive alors que chaque sénateur conservateur se levait pour débattre de C-6 et demandait aussitôt qu’on suspende le débat. Cela menait à un vote sur la suspension qu’on appelait, à l’aide des cloches, pendant une heure. Le manège a été répété pendant plusieurs heures.

Soulagement des défenseurs des libertés
Dans la minute qui a suivi le vote de mardi, remporté à 50 contre 33, l’Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique (ALCCB) et l’Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés (ACAADR) ont applaudi le résultat.
« Cette modification corrige la situation absurde selon laquelle un Canadien qui risque de perdre sa citoyenneté et d’être banni de son pays n’a pas le droit d’être entendu et n’a aucune possibilité de se défendre pleinement. Par contre, si un Canadien obtient une contravention pour stationnement illégal, il a le droit à une audience du tribunal pour se défendre », a souligné Josh Paterson, directeur général de l’ALCCB, dans son communiqué.
Les deux associations s’étaient lancées dans une lutte devant les tribunaux pour obtenir ce droit d’appel qui, finalement, sera contenu dans la loi.

Bon à savoir
- Le gouvernement libéral s’était engagé à abroger les dispositions prévues dans la Loi sur la citoyenneté qui confèrent au gouvernement le droit de révoquer la citoyenneté canadienne de citoyens ayant la double nationalité.
- Le projet de loi C-6, déposé au Parlement le 25 février 2016, a pour objectif de mettre en application cet engagement. Il comprend également des modifications pour accorder aux demandeurs une plus grande marge de manœuvre pour satisfaire aux exigences de la citoyenneté ainsi que certaines mesures supplémentaires visant à accroître davantage l’intégrité du programme.
- Entre janvier et septembre 2016, le Canada a reçu 56 446 demandes de citoyenneté. Ce qui représente une chute de près de 50 %, par rapport à l’année précédente. Pas moins de 111 993 demandes avaient alors été reçues.
- Les frais de traitement des dossiers sont passés de 100 $ à 530 $ en 2014-2015. Lorsqu’on y ajoute les frais additionnels de « droit de citoyenneté » de 100 $, le montant global est 630 $.
(Source: Gouvernement du Canada)
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