Un sondage fait auprès de 1019 Canadiens et Canadiennes révèle que sauter des repas, surtout le déjeuner, est de plus en plus la norme.
Une pratique qui touche davantage les femmes, les personnes célibataires et ceux dont le revenu est inférieur à 40 000 $ par année.
C’est ce que contient cette étude préliminaire menée par l’Université Dalhousie, à Halifax, en Nouvelle-Écosse.
Pourquoi observe-t-on cette tendance et y a-t-il une différence entre les milléniaux, la génération X et les baby-boomers?
Des questions que Maryse Jobin a posées à Sylvain Charlebois, professeur en distribution et politique agroalimentaires à l’Université Dalhousie qui a supervisé cette étude.
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Au total, 1 019 Canadiens ont participé à ce sondage réalisé en anglais et en français sur une période de trois semaines en avril 2017.
L’étude fait également ressortir d’importantes différences entre les générations et les régions géographiques. Les baby-boomers sont deux fois plus portés à préparer un petit déjeuner à la maison que les milléniaux (nés entre 1977 et 1995). Le petit déjeuner sur le pouce est deux fois plus populaire chez les milléniaux que chez les baby-boomers. Les consommateurs ontariens sont davantage portés à manger leur petit déjeuner sur le pouce ou dans un restaurant que les autres Canadiens.
« Le petit déjeuner n’est pas en voie de disparition au Canada, mais les habitudes sont différentes selon les différents groupes de consommateurs, conclut le professeur Charlebois. Les générations plus jeunes ont un rapport différent au petit déjeuner comparativement aux personnes plus âgées. »
Si presque 67 % des Canadiens prennent le petit déjeuner seuls, ce sont 86 % des milléniaux qui mangent seuls le premier repas de la journée. Les consommateurs québécois sont les moins portés à prendre leur petit déjeuner seuls et, inversement, ce sont les Britanno-Colombiens qui déjeunent seuls dans la plus grande proportion.
En ce qui concerne les habitudes relatives au repas du midi, les résultats montrent des tendances similaires. Encore une fois, les femmes sont davantage portées à sauter le dîner, et les personnes célibataires ont plus de chance de sauter le dîner que les personnes mariées ou divorcées. Les consommateurs âgés de moins de 21 ans ayant un diplôme d’études secondaires sont également plus enclins à sauter le repas du midi.
Manger un lunch à son poste de travail semble être une habitude assez répandue. Près de 50 % des consommateurs de la région atlantique prennent le repas du midi à leur poste de travail, une proportion plus élevée que dans toutes les autres régions du Canada. La plupart des Canadiens mangent seuls le midi. Le pourcentage de consommateurs de l’Ontario, des Prairies et de la région de l’Atlantique qui mangent seuls le midi est plus élevé que la moyenne canadienne, mais il est seulement de 36 % chez les Québécois.
Les chercheurs ont également découvert que de nombreux consommateurs sont portés à manger plus fréquemment à l’extérieur et continueront à le faire. Chez les personnes célibataires, 42 % prévoient manger sur le pouce ou au restaurant plus souvent dans l’année à venir, et 46 % de ceux qui ont un diplôme d’études secondaires prévoient en faire autant.
Les habitudes concernant le souper présentent également des différences selon les groupes. Sans surprise, les chercheurs ont constaté que les consommateurs qui n’ont pas d’enfant souperont trois fois plus au restaurant que les personnes ayant des enfants. Comme pour le repas du midi, les personnes célibataires et celles qui ont un diplôme d’études secondaires sont plus enclines à souper à l’extérieur que tout autre groupe.
« Les consommateurs ayant des revenus et des niveaux de scolarité inférieurs sont portés à manger plus souvent à l’extérieur, ce qui expose ce groupe démographique à des choix alimentaires moins sains », déclare M. Somogyi.
Le sondage portait aussi sur les habitudes de cuisine, la consommation de collations et l’omission de repas. Au moins 57 % des consommateurs de la génération X (nés entre 1965 et 1976) ne cuisinent pas durant la semaine, mais le font durant le week-end, alors que 46 % des milléniaux en font autant. Seulement 38 % des baby-boomers (nés entre 1946 et 1964) cuisinent le week-end. Près de 51 % des consommateurs de la génération Z (nés après 1995) disent ne pas avoir le temps de cuisiner, tout comme 52 % des Britanno-Colombiens, ce qui est presque quatre fois plus que les consommateurs québécois.
Les résultats du sondage démontrent une forte corrélation entre les habitudes de sauter des repas et de prendre des collations. Encore une fois, ce sont les femmes (46 %), les personnes célibataires (36 %) et ceux ayant un diplôme d’études secondaires (51 %) qui sont les plus enclins à prendre des collations. Ce sont eux qui sautent des repas le plus souvent.
« De nos jours, la question des repas ne concerne pas seulement les milléniaux. Tous les consommateurs canadiens sont amenés à revoir leur stratégie concernant la gestion des repas. Prendre trois repas par jour semble être une pratique en voie de transformation au Canada », constate M. Charlebois.
« D’après les résultats de notre enquête, il est assez facile de tracer un portrait générationnel concernant les habitudes de cuisine au Canada. Les baby-boomers ont le temps de cuisiner et ils le font. Les consommateurs de la génération X ne semblent pas savoir cuisiner et s’en sentent coupables. Et ceux qui appartiennent aux générations Y et Z veulent à la fois cuisiner et manger à l’extérieur », a-t-il ajouté.
Par contre, pour les chercheurs, sauter les repas est la tendance la plus inquiétante.
« Nous devons comprendre pourquoi tant de femmes, de personnes célibataires et de personnes moins scolarisées sautent des repas plus fréquemment que les autres groupes démographiques. Les recherches démontrent que ces tendances engendrent des niveaux d’insécurité alimentaire plus élevés, ce qui n’est pas souhaitable, dit M. Charlebois. Nous sommes la seule espèce au monde qui cuisine. Une population qui sait cuisiner jouira d’une plus grande sécurité alimentaire. Enseigner la cuisine aux plus jeunes générations pourrait entraîner des effets bénéfiques en matière de santé pour l’avenir. »
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