Subrepticement, mais fermement, le nationalisme est de retour. Dans l’indifférence la plus générale. Parallèlement, la Déclaration universelle des droits de l’homme est la cible d’attaques féroces d’extrémistes, de dirigeants autoritaires, de populistes, de démagogues, de relativistes culturels, d’universitaires occidentaux et même de fonctionnaires des Nations unies! Ce constat amer est signé Zeid Ra’ad Al-Hussein. Le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme a dressé ce réquisitoire lors de sa dernière présence à une session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
Zeid Ra’ad Al-Hussein s’apprête à tirer sa révérence. À la fin du mois d’août prochain, il quittera ses fonctions à la tête de l’instance onusienne chargée de promouvoir et de protéger les droits de tous les humains. Lors de sa dernière session lundi à Genève, il a mis en garde contre le retour du nationalisme. Il a interpellé les représentants des États membres, leur demandant pourquoi l’ONU restait aussi « silencieuse » face au retour du nationalisme.
Le haut-Commissaire a souligné, si tant est qu’on l’eût oublié, que d’un point de vue historique, la force la plus destructrice pour le monde a été le nationalisme, porté aux extrêmes par des chefs égoïstes et sans scrupules et amplifié par des idéologies de masse opposées aux libertés. Il a d’ailleurs rappelé que les Nations unies ont été créées précisément pour éviter le retour de ces idéologies. « La raison d’être des Nations unies était de protéger la paix, les droits, la justice et le progrès social », a-t-il dit. Les principes de fonctionnement de l’ONU sont donc clairs et la paix n’est possible qu’en promouvant le contraire du nationalisme.
Le nationalisme, justification de toutes les dérives
L’administration américaine de Donald Trump, qui a choisi de séparer des enfants de leurs parents, afin dit-elle, de décourager l’immigration illégale, est vivement dénoncée par le Haut-Commissaire. Au cours des six dernières semaines, plus de 2300 enfants ont été séparés de force de leurs parents. Ce que M. Al-Hussein qualifie d’« inadmissible ». Selon lui, les politiques américaines punissent les enfants pour les actes commis par leurs parents.
Il a d’ailleurs appelé Washington « à mettre fin immédiatement à cette pratique et à ratifier enfin la Convention relative aux droits de l’enfant, afin que les droits fondamentaux de tous les enfants, quel que soit leur statut administratif, soient au centre de toutes les lois et politiques nationales ».
Cette dernière sortie de M. Zeid n’a certainement pas plu à l’administration américaine qui, mardi, a annoncé son retrait du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, une instance qui a toujours eu maille à partir avec Washington. D’ailleurs, les États-Unis l’ont boycotté pendant trois ans sous le président George W. Bush avant de le réintégrer sous Barack Obama en 2009.
Qu’importe, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a lui aussi joint sa voix aux critiques contre la politique américaine de séparation des enfants de leurs parents. Il a demandé aux États-Unis de traiter les réfugiés et les migrants avec respect et dignité, en accord avec le droit international et de préserver l’unité des familles.
Le rejet de l’Autre
Aux États-Unis également, la politique de séparation des enfants de leurs parents est dénoncée par des citoyens ordinaires, des anciennes premières dames, l’actuelle première dame, et même la propre fille de Trump, Ivanka. Des responsables politiques s’en mêlent aussi, y compris des poids lourds du Parti républicain comme le sénateur de l’Arizona John McCain, critique habituel du président, qui lutte contre un cancer du cerveau.
Pour revenir à M. Al-Hussein, il s’est une fois de plus inquiété de la situation des Rohingyas au Myanmar. Selon lui, il existe des indices clairs que la minorité musulmane continue d’y faire l’objet d’attaques organisées, étendues et systématiques. Et sa conclusion est formelle : « Si le Myanmar a déclaré qu’il enquêterait sur ces allégations et punirait les responsables présumés, ses actes à ce jour ne répondent pas aux critères minimaux de crédibilité et d’impartialité. »
À propos du conflit au Yémen, le Haut-Commissaire a déploré les attaques menées par la coalition saoudienne et émiratie à Hodeïda qui pourraient faire d’énormes pertes civiles et avoir un impact désastreux sur l’aide humanitaire acheminée par le port pour soutenir des millions de personnes.
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