À la 22e conférence internationale sur le sida à Amsterdam, bonnes et mauvaises nouvelles se succèdent. (REUTERS/Yves Herman - RC1C53A5EA20

VIH/Sida : la prise de médicaments a priori protégerait les séronégatifs

L’utilisation des médicaments contre le sida comme moyen de prévention lors de rapports sexuels à risques peut aider les personnes non infectées à ne pas contracter le VIH. Voilà ce que confirment deux nouvelles recherches dévoilées à la 22e Conférence internationale sur le sida, à Amsterdam, aux Pays-Bas.

Il est impensable pour une personne séronégative d’avoir des rapports sexuels non protégés avec un partenaire infecté du VIH. Pourtant, selon deux nouvelles recherches, la prise d’une pilule combinée à deux autres médicaments tous les jours ou juste avant et après des rapports sexuels avec une personne infectée peut mettre à l’abri du virus.

Il été question de ces deux études mardi à Amsterdam. L’une montre que de tous les hommes homosexuels ayant pris part à la recherche, aucun n’a attrapé le virus. Dans la seconde étude, aucun homme non infecté n’a attrapé le virus s’il avait eu des rapports sexuels uniquement avec un partenaire dont le VIH était bien supprimé par des médicaments.

Réels espoirs dans la prévention

Le Dr Anthony Fauci, premier scientifique des États-Unis en matière de sida, a qualifié ces résultats de « très impressionnants » et de  «vraiment frappants ». M. Fauci, qui dirige l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses, estime que la seule façon de mettre fin à l’épidémie du sida est de prévenir d’autres cas de transmission.

Selon le grand responsable de la recherche sur le sida aux États-Unis, les médicaments constituent des « outils qui, s’ils sont largement mis en œuvre, pourraient théoriquement mettre fin à l’épidémie ». Élargir l’accès à ceux-ci n’est pas seulement une politique humanitaire, elle est aussi une politique intelligente, a-t-il ajouté.

Pour Anthony Fauci, on peut faire d’une pierre deux coups : sauver la vie de la personne infectée et rendre pratiquement impossible la transmission du virus de cette personne à son partenaire sexuel.

À l’heure actuelle, quelque 36 millions de personnes dans le monde ont le VIH et 1,8 million de nouvelles infections se produisent chaque année. En attendant la mise au point d’un vaccin, les préservatifs demeurent le meilleur moyen de protection contre l’infection par le VIH. L’ennui c’est que, pour toutes sortes de raisons, tout le monde n’utilise pas les préservatifs ou le fait juste occasionnellement. D’où la nécessité d’explorer d’autres options.

Le Truvada… la protection a priori

Une combinaison de deux médicaments utilisés pour traiter les personnes infectées par le VIH, vendue sous le nom de Truvada par Gilead Sciences et sous forme générique dans certains pays, s’est révélée particulièrement efficace dans la prévention du VIH pour les couples hétérosexuels avec un partenaire séropositif et l’autre séronégatif.

Le Truvada est un médicament que même des personnes non infectées au VIH prennent à titre préventif.

Environ 1600 homosexuels de la région parisienne qui couraient un risque élevé de contracter le VIH en raison du grand nombre de leurs partenaires sexuels, et de leur réticence à utiliser des préservatifs, ont servi de cobayes à l’étude.

On leur a offert les pilules préventives soit pour un usage quotidien, comme cela est recommandé aux États-Unis, soit « sur demande », avant et après les rapports sexuels non protégés. Un peu plus de la moitié ont choisi « sur demande » et ont été testés tous les trois mois pour voir s’ils avaient attrapé le VIH.

Un an plus tard, le responsable de l’étude, le Dr Jean-Michel Molina de l’Hôpital Saint-Louis à Paris, a constaté que l’utilisation à la demande semble être au moins aussi efficace que l’utilisation quotidienne.

Aucune personne n’a cessé d’utiliser les médicaments à cause des effets secondaires. Somme toute, on a eu la confirmation de l’efficacité totale dans la prévention du VIH de la prophylaxie pré-exposition (PrEP).

Tout cela fait dire à la Dre Linda-Gail Bekker, chef de la conférence sur le sida et directrice adjointe du Centre VIH Desmond Tutu à l’Université du Cap en Afrique du Sud, que nous pouvons avoir autant confiance dans le traitement que dans la prévention, autant pour les couples homosexuels que pour les couples hétérosexuels.

Option au préservatif?

La seconde étude a testé une approche différente. Elle a porté sur 779 couples homosexuels masculins dans 14 pays européens, avec un partenaire séronégatif et l’autre prenant des médicaments pour supprimer le VIH. Le virus du partenaire infecté était fortement affaibli par des médicaments, ce qui au départ réduit considérablement le risque de propagation.

Ces hommes étaient testés tous les 6 à 12 mois pour voir si le partenaire infecté avait encore le virus sous contrôle, et si l’autre partenaire l’avait attrapé. Après une période médiane de 18 mois, aucun des hommes infectés n’a transmis le VIH à son partenaire, malgré environ 75 000 rapports sexuels sans préservatif.

De nombreux progrès ont été réalisés dans la recherche sur le sida au cours des dernières années.

Il y a cependant eu 17 nouvelles infections au VIH chez les hommes qui n’étaient pas infectés au début de l’étude. Mais les tests ont montré que ces infections étaient issues de rapports sexuels avec des partenaires qui ne faisaient pas partie de l’étude.

Déception importante du côté des mères infectées

Mais, dans la lutte contre le sida, de bonnes nouvelles en cachent généralement de mauvaises. Le rendez-vous d’Amsterdam a été l’occasion de confirmer les inquiétudes sur les dangers pour l’embryon d’un médicament sur lequel on fondait pourtant beaucoup d’espoir : le dolutégravir.

Entre août 2014 et mai 2018, quatre cas de malformation du tube neural, le système nerveux central de l’embryon, ont été constatés au Botswana au cours de l’examen de 426 femmes séropositives enceintes, qui avaient pris ce traitement avant de tomber enceintes.

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Les dangers pour l’embryon portent un sérieux coup aux espoirs placés dans le dolutégravir.

Ces malformations peuvent être à l’origine de handicaps graves du cerveau ou des vertèbres, pouvant aboutir à la mort du bébé avant même sa naissance. Cela revient à des malformations dans une grossesse sur 100, 10 fois plus que la normale, selon Rebecca Zash, une chercheuse en santé publique à la Harvard TH Chan School.

Le dolutégravir fait partie de la nouvelle génération de traitements contre le VIH, avec moins d’effets secondaires, et possiblement moins de résistance à long terme. Il était sur le point d’être établi comme principal traitement antirétroviral dans certains pays en développement fortement touchés.

(Avec Reuters. AFP et AP)

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