Des fausses nouvelles, apparemment produites pour le compte de l'Iran ont circulé sur le web, selon des chercheurs canadiens. (Crédit photo : Reuters/Joshua Roberts)

Le phénomène des fausses nouvelles, une plaie pour les démocraties?

Les fausses nouvelles semblent avoir envahi notre quotidien jusqu’à fragiliser les démocraties occidentales. Ces contre-vérités – l’Office québécois de la langue française parle d’infox, un mélange des termes « intoxication » et « information » – enveniment de plus en plus le débat public.

La panique est telle que plusieurs pays sont sur le point de légiférer en la matière, c’est le cas de l’Allemagne et de la France. Mais qu’en est-il au Canada? On en parle avec Louis-Philippe Lampron, professeur titulaire à la Faculté de droit de l’Université Laval.

Les fausses informations sont très difficiles à définir, déclare en entrevue Louis-Philippe Lampron. « On peut dire de manière générale que c’est quelque chose qui va porter ou déformer des éléments en lien avec par exemple une étude scientifique ou le comportement d’un politicien. Mais il faut distinguer la fausse nouvelle de la diffamation dont cette dernière peut être contestée devant les tribunaux. La fausse nouvelle, c’est quelque chose d’insaisissable qui se rapproche davantage de la rumeur. Sa définition est un grand enjeu qui rend la lutte contre le phénomène plutôt difficile. »

Les fausses nouvelles, les ragots ou les rumeurs ont toujours existé, rappelle le professeur. « Ce qui a dramatiquement changé, c’est leur impact sur la société. Les réseaux sociaux ont contribué à leur donner un lourd degré de pénétration chez les populations des pays occidentaux. »

Écoutez l’entrevue avec Louis-Philippe Lampron (7 minutes et 14 secondes) :

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La France et l’Allemagne ont décidé de s’attaquer aux fausses nouvelles en proposant des lois contre ce que les deux pays européens nomment la « manipulation de l’information ». Au Canada, la situation est différente.

« Jusqu’en 1992, il existait une disposition dans le Code criminel canadien rendant passible de sanctions criminelles le fait de diffuser des fausses nouvelles, raconte M. Lampron. Cette disposition a été invalidée en 1992 dans le cadre de l’arrêt Zundel rendu par la Cour suprême qui expliquait alors les risques de censure par l’appareil gouvernemental. En fait, le problème est de savoir qui va déterminer ce qui est faux ou ce qui est vrai. C’est une notion très problématique en ce qui concerne la liberté d’expression. »

Il existe néanmoins des limites importantes à la liberté d’expression, ajoute le professeur. « La propagande haineuse ou la diffamation peuvent être poursuivies. Ce qui contribue à la panique en ce qui concerne les fausses nouvelles, c’est qu’on réalise à quel point elles attirent plus de clics que les véritables nouvelles ou celles qui sont crédibles. Mais c’est le propre des réseaux sociaux. Les gens qui ne s’informent qu’à partir des réseaux sociaux vont voir la réalité informationnelle déformée par cette espèce de résonance découlant des algorithmes. »

Une question : pourquoi la vérité nous paraît-elle moins puissante que le mensonge?  « Il y a des acteurs puissants qui s’attaquent aux faits sur lesquels il existait jusqu’ici un consensus. Une démocratie repose sur la reconnaissance de faits vérifiés et vérifiables à partir desquels on peut prendre des décisions. Lorsqu’il n’y a plus de faits communs, la démocratie tombe. Ce qui peut faire l’affaire à des gens qui veulent garder le pouvoir. »

Une vraie fausse nouvelle pour sensibiliser les internautes. Une vidéo fait le tour des médias sociaux. Quel sera son impact? Entrevue avec Jonathan Jarry.

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