Lishtenia est responsable de lésions buccales, peut même toucher le foie, la rate, la moelle osseuse et causer la mort. Crédit : Istock

Réussira-t-on à vaincre la leishmaniose, maladie parasitaire chronique qui touche 12 millions de personnes par an?

La question se pose puisqu’une équipe pluridisciplinaire composée de chercheurs issus de diverses institutions au Canada et à l’étranger a réussi une percée scientifique majeure. À coup sûr, elle ouvrira de nouvelles perspectives dans la lutte contre le parasite Leishmania responsable de cette maladie. 

Une maladie qui s’attaque aussi bien aux humains qu’aux animaux

Le professeur Albert Descoteaux et le doctorant Guillermo Arango Duque de l’INRS Photo : © INRS

Le chercheur principal des études qui ont mené à cette découverte est Albert Descoteaux, professeur à l’Institut national de recherche scientifique (INRS). Son groupe a bénéficié de la collaboration de chercheurs de l’Université de Montréal, de l’Université McGill et de l’Université nationale japonaise Tohoku, basée à Sendai.

Leurs travaux, publiés dans la revue PLOS Pathogen, ont porté notamment sur la façon dont le parasite fait son incursion dans la cellule qu’elle conquiert à un rythme vertigineux pour finir par la coloniser entièrement, entraînant une des maladies infectieuses parmi les plus virulentes du monde.

Selon l’OMS, la leishmaniose touche chaque année de 700 000 à 1 000 000 de personnes.

Elle se manifeste sous trois formes :

  • la forme cutanée considérée comme la plus fréquente,
  • la forme viscérale qui est la forme la plus sévère touchant le foie, la rate, la moelle osseuse,
  • la forme muco-cutanée menant à la dégradation des mycoses du nez et de la bouche. (Source : communiqué de presse)

D’après les explications données à Alice Chantal Tchandem par le professeur Descoteaux, le parasite Leishmania se comporte en quelque sorte comme une personne hypocrite et sournoise qui vous approche avec gentillesse et conquiert votre cœur en ami pour ensuite profiter de votre naïveté pour bouleverser votre existence, voire même vous tuer.

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À propos du Leishmania

C’est un parasite qui sévit principalement dans les pays les plus défavorisés.

Il se transmet aux mammifères par la piqûre d’une mouche des sables infectée.

L’infection est effective dans la cellule par l’action virulente de deux molécules : la métalloprotéase GP63, et le lipophosphoglycan (LPG).

Une fois introduit dans le corps, le Leishmania se réfugie dans une vacuole qui est une espèce de poche protectrice qu’il réaménage, en créant notamment un compartiment pour échapper au contrôle du système immunitaire de son hôte. Ensuite, il commence son travail destructeur en se répliquant et en transportant les facteurs de virulence de la vacuole vers le cytoplasme de la cellule infectée.

Le foie n’est pas à l’abri des ravages de Leishmania. Crédit : iStock

Les chercheurs ont réussi à percer son mystère en tentant de comprendre la façon dont le parasite réussit à échapper aux défenses naturelles de l’organisme pour créer les dégâts.

Guillermo Arango Duque, qui a récemment obtenu un doctorat en virologie et immunologie sous la direction du professeur Descoteaux, souligne que l’équipe de chercheurs a pu constater que le Leishmania utilise la machinerie de la fusion membranaire du macrophage pour faire sortir les facteurs de virulence hors de la vacuole.

« La plupart des groupes s’intéressent aux impacts des facteurs de virulence, mais personne n’avait jusqu’à présent compris comment Leishmania pouvait transférer les facteurs de virulence de la vacuole vers le cytoplasme de la cellule infectée », a-t-il relevé dans le communiqué de presse.

Les scientifiques ont également cherché à savoir ce qui se passe une fois que les facteurs de virulence sont transmis par le parasite de l’autre côté de la membrane de la vacuole. Ils ont noté que ces facteurs de virulence se transportent dans un nouveau compartiment qui est très vaste en surface et qui entretient des liens étroits avec tous les autres compartiments de la cellule.

Cette interconnexion faciliterait la propagation des deux facteurs de virulence (GP63 et LPG) à l’intérieur de la cellule, concluent les chercheurs qui ont aussi réussi à déterminer les molécules des mammifères dans le système qui font en sorte que les facteurs de virulence se propagent dans la cellule. Cela leur a permis d’observer qu’en agissant sur les molécules que sont Sec22b et syntaxine-5, ils peuvent « bloquer la redistribution des facteurs de virulence à l’intérieur de la cellule infectée et interférer avec leur action ».

Cette découverte apparaît comme une « grande percée », affirme M. Descoteaux, qui relève qu’en l’absence d’un vaccin et de traitements efficaces pour vaincre le Leishmania, de nouvelles avenues pourraient être explorées.

Le Leishmania n’existe pas au Canada, mais il n’est pas rare que des personnes qui séjournent pendant plusieurs jours dans les zones endémiques, en Amérique du Sud, dans le golfe Persique, en Afghanistan et dans bien des pays pauvres, reviennent au pays en étant infectées par ce parasite qui ne se transmet pas de mammifère à mammifère.

Le professeur Descoteaux attire cependant l’attention sur le fait que la mouche qui en est le principal vecteur est presque aux portes du Canada, étant donné qu’elle se retrouve déjà dans le sud des États-Unis et qu’elle peut facilement migrer vers le nord à cause des changements climatiques.

Catégories : Santé, Société
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